Chapitre 10

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Maintenant qu'ils étaient de retour à YunShen Buzhi, dans ses brumes nuageuses et à l'abri des regards indiscrets, Xichen se détendait peu à peu. Ce soir il avait délaissé ses quartiers de chef de secte pour se rendre au pavillon de la Chambre Calme, dans les appartements qu'occupaient son frère et son époux. Il songea avec nostalgie et reconnaissance qu'à la suite de l'incendie de leur résidence, ordonnée par Wen Xu, YunShen Buzhi avait été rebâti à l'identique, avec l'aide de Meng Yao. Un détail, selon lui, que les membres de sa secte avaient tendance à oublier trop facilement. Il prit à témoin le fils adoptif de Wangji pour lui révéler :

— Sizhui, sais-tu que c'est grâce à Jin GuangYao que nous avons pu récupérer tous nos rouleaux, et reconstruire notre Pavillon de la Bibliothèque ?

Sizhui ne répondit rien mais leva seulement vers son oncle un regard surpris.

— Frère... soupira Lan WangJi, au comble de l'embarras. Sans vouloir te manquer de respect, permets-moi de te rappeler que lorsqu'il s'agit de LianFang-Zun, ton impartialité est souvent mise à rude épreuve, voire quelquefois... carrément défaillante.

Wei Wuxian leva un sourcil amusé à la répartie de son mari, qui devait sacrément avoir été choqué pour réussir à se montrer aussi loquace, mais qui reprit rapidement les rênes.

— Je suppose que tu fais allusion à ce qui s'est passé avant-hier, avec les cultivants, présuma Lan Xichen.

Comme à son habitude, son frère ne prit pas la peine de lui répondre, estimant que les choses étaient assez explicites. Xichen ferma les yeux et inspira profondément.

— Je sais, Wangji, et crois-moi, je ne suis pas fier de moi ! Mais tu as vu comme ils étaient remontés, tous ? Je ne pouvais pas...

— Tu pouvais tout à fait te taire et ne pas inventer tous ces mensonges, l'interrompit calmement son cadet.

Il avait raison, bien sûr, et Xichen en était douloureusement conscient. Ce qu'il avait fait deux jours auparavant, dans cette auberge, n'était pas digne d'un chef de clan. Pourtant il savait que si c'était à refaire, il aurait agi exactement de la même manière. Il ne pouvait tout simplement pas livrer à la vindicte populaire le sort de... eh bien, de l'homme qu'il aimait, tout simplement !

Sizhui le prit alors à parti :

— Zewu-Jun, est-ce que vous allez rendre visite à Jin Ling ? Aussi mal en point qu'il soit, il ne cesse de vous réclamer, comme si quelque chose le tracassait particulièrement.

Lan Xichen hocha la tête :

— Bien sûr. La santé de Jin Rulan m'importe énormément...

Wei Wuxian avait suivi les échanges des trois cultivants avec attention et patientait, le regard fixé sur Zewu-Jun.

Allons, combien de temps vas-tu tourner autour du pot ?

Il avait quitté Jin Ling à regret, mais il le savait entre de bonnes mains, et surtout il savait qu'il ne pourrait jamais aussi bien l'aider, qu'en restant collé à Xichen, comme la misère sur le dos du pauvre.

Il se dirigea vers l'entrée, qu'il ferma avec application, avant d'y installer des parchemins de silence en nombre. Sous le regard intrigué de Sizhui, qui avait du mal à mettre ses idées bout à bout, depuis l'accident de son ami, il dessina également à même la porte des glyphes d'alerte.

Il s'installa ensuite face à Xichen, sans un mot, le dos droit, le visage décidé. Celui-ci eu la décence de lui adresser un sourire où perçait une excuse. Wei Wuxian garda le silence, comme tous les autres dans la pièce, mais son regard parlait pour lui, et bientôt Xichen reprit la parole :

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