Mardi 03 Novembre, 22 : 09
<Kill Somebody ~ YUNGBLUD>
Je ne suis pas revenue au lycée. Zoé non plus.
Je le sais car hier, tout comme ce matin, j'ai reçu plusieurs messages de Clara et d'Emily sur notre groupe Instagram a toutes les quatre qui nous demandaient où nous étions et si nous allions bien. Je n'ai pas répondu. Zoé n'a pas vu le message.
Samedi soir, j'ai abandonné Iris, Louise et Dan en fuyant lâchement la fête avant même que minuit ait sonnée. En rentrant chez moi, je pleurais et tremblais comme une gamine, encore dans mon costume ridicule de vampire. Mon téléphone n'arrêtait pas de sonner dans ma poche : c'était des appels d'Emily et de Clara qui me demandaient sûrement où j'étais partie et si j'avais retrouvé Zoé. J'ai fini par l'éteindre, fatiguée d'entendre sa sonnerie stridente qui hurlait sans s'arrêter. Le froid de l'automne me donnait de violents frissons, tout comme la pluie qui s'était mise à tomber : j'avais oublié ma veste à l'appartement où se déroulait la soirée. Puisque je n'avais jamais fait le trajet de retour auparavant, je me suis perdue dans le quartier de Lyon, j'avais froid, j'étais épuisée, l'alcool me faisait encore tourner la tête et la pluie avait ruiné mon maquillage et fait frisotter mes cheveux. Frigorifiée, j'ai finis par attraper un gros rhume, ce qui me donnait l'air d'un clown dépressif qui n'arrêtait pas d'éternuer. Au fond de moi, je savais que les personnes que je croisais m'évitaient parce que je leur faisais peur, mais mon cerveau m'inventait pour je ne sais quelle raison des scénarios improbables dans lesquels tout le monde était au courant ce qu'il s'était passé et me contournait car je suis la pire meilleure amie de l'univers. Et ils auraient eu raison : je suis une merde. J'avais juste envie de dégueuler mes tripes et de pleurer jusqu'à ce que je disparaisse, morte noyée dans mes larmes et mon vomi.
Au bout d'une heure environ, j'ai pu retrouver mon immeuble et me suis précipitée à l'intérieur. L'appartement était silencieux : il était plus de minuit, mes parents dormaient probablement, et Pogno restait chez Julie pour la nuit. J'avais envie d'hurler et de réveiller tout le monde. Je ne savais même pas pourquoi j'avais envie de faire ça. Au final, j'ai enlevé mes chaussures, me suis glissée silencieusement sous mes draps et suis restée sous ma couette toute la nuit, encore habillée et maquillée, à éternuer et à sangloter.
Je suis la pire amie qui puisse exister. J'avais une meilleure amie, une meilleure amie formidable qui a toujours été là pour moi, et à cause d'une jalousie presque maladive sortie de nulle part et des horribles conseils de la part d'un ami, j'ai décidé de l'ignorer et de l'éviter, pour « apprendre à vivre sans elle ». Le pire dans cette histoire ? Ca avait presque marché. Au début, c'était dur, je n'arrêtais pas de penser à elle et à ce rendez-vous qu'elle avait avec Théo. Puis, petit à petit, je me suis passée d'elle. En l'espace de trois semaines, je suis allée vers les autres, me suis fait de nouveaux amis et me suis amusée sans penser à elle, l'oubliant complètement. A la fin de ce lapsus de temps, je sentais mieux dans ma peau, davantage sûre de moi, plus spontanée. Je me sentais moi-même, pas juste la meilleure amie de quelqu'un. Je me suis dis que peut-être que vivre sans Zoé n'étais pas si mal ; après tout, elle voyait d'autres gens que moi, je me voyais d'autres personnes qu'elle, alors où était le mal ? Puis hier soir, en la voyant enragée et désespérée devant moi, j'ai compris. J'ai compris que même si je me faisais un tas d'autres amis et que je profitais seule de mon adolescence, rien de tout cela ne vaudrait avoir ma meilleure amie à mes côtés. J'ai compris que Zoé me manquait et que je m'étais comportée comme la pire des connasses avec elle.
Mais maintenant, c'est trop tard. J'ai tout gâché avec mon égoïsme. Alors que je pensais à danser avec mes nouveaux potes, me réjouir de mes seize ans et multiplier les expériences, elle traversait seule des bouleversements intenses dans sa vie. Ses parents divorçaient, détruisant son équilibre familial et engendrant un tas d'autres soucis financiers et de logement. Elle était au plus bas et je n'étais même pas là pour la soutenir, essayant de l'oublier alors qu'elle avait besoin de moi. Zoé a dut vivre tout cela seule, et je me déteste pour cela. Je crois que je ne me suis jamais autant haï qu'à cet instant.
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Le Théâtre Du Cœur
Teen FictionBeth est une jeune fille passionnée de théâtre, poursuivant une vie paisible avec sa famille, sa troupe et ses amis. Son équilibre parfait va se trouver basculé à seize ans, quand elle va découvrir les troubles, émois et évènements diverses qui impl...