𝟎.

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Se sentir comme morte alors que votre personne, elle, continue de fonctionner par inadvertance. Votre cerveau est dénué de tout sens, quant à votre cœur, tari plus que jamais de tout sentiment. Égarée dans ses retranchements, désemparée par l'anarchie de survivre. Manger n'est plus qu'une option parmi tant d'autres. Plus de saveurs, plus de satisfaction. Seulement un besoin terne et vital après un incalculable de repas sauté. Toute passion évanouie, qui autrefois, faisait maintenir la cadence de ce mécanisme complexe et confus qu'est le cœur. Cette machine qui pompe non seulement le sang, mais toute émotion jusqu'à un non retour. Malgré ce décès intérieur, vous continuez de croire à un semblable de futur prospère qui viendrait combler les pièces manquantes de votre bonheur ôtaient, jadis, sans votre accord.

Ce sentiment... Peu importe les phrases ou les adjectifs pouvant le qualifier, rien n'est assez fort pour décrire combien il est dévastateur et destructeur d'une personne. Même en langage de fleur. Ni le chrysanthème, ni la gentiane ne peuvent témoigner de la souffrance, des tourments ou encore des pleurs qu'il cause jusqu'à la perte de votre âme et de votre conscience.

Dans mon cas, il était né de la mésentente entre moi et les mœurs de cette société indécente. C'était simple: je voulais la liberté, quant à elle, l'asservissement.

La liberté... La liberté de penser et d'agir sans le consentement d'un individu. Je pris goût à la souhaiter depuis l'enfance. Plus précisément, depuis le jour où j'avais lu Orgueil Et Préjugés d'une certaine dénommée « A Lady ». À travers l'histoire, il n'y a non seulement de diverses visions de l'amour et du mariage, mais également des accusations qui pointent du doigt la société dans laquelle je vis, lui reprochant de freiner les pensées et l'amour. Les personnages eux-mêmes représentent les défauts de la société. Certains évoluent, d'autres non. Et restent alors détenus de leur attitude. C'est-à-dire l'hypocrisie, le mépris et la vantardise. Et du haut de mes huit ans, je l'avais compris. Dès lors, j'avais pris conscience du monde qui m'entourait. Mais plus les années passaient, et plus la liberté que j'espérais tant devenait inatteignable.

Et ce sentiment, plus accru que jamais.

À la mort de mon père, tout un monde s'était écroulé pour laisser place à un nouveau, atroce et invivable. Celui de mon frère aîné, Victor, qui avait pris aussitôt les rênes. Et l'absence de ma mère ne m'avait guère aidée. Son temps étant pris par la Garde-Robe de l'Impératrice, j'avais l'impression de ne plus avoir de parents —et tout en étant coupée du monde— je commençais à me sentir seule et incomprise. Notamment à l'âge de l'adolescence, où la notion de l'union conjugale surgissait à chaque phrase énoncée. Alors, ce qui maintenait ma bonne humeur jusqu'à là, se fanait de fil en aiguille. Arrêtant de tourner leurs pages et sentir leurs odeurs, les livres ne sont devenus que des étrangers à mes yeux —cédant peu à peu à l'endoctrinement de Victor, épuisée par ce sentiment vénéneux.

Le jour de mes douze ans, tout songe de liberté s'était envolé lorsque Victor m'avait annoncée mes premières fiançailles arrangées. Et c'était à ce moment-là, que les syndromes de ce venin avaient pris bien plus d'ampleur. Cesare avait tenté de m'aider, mais en vain. Quant à mère, elle pleurait silencieusement la mort de son mari à chaque nuit tombée, priant qu'il revienne et arrange ce chaos.

Ce fut le début d'un cauchemar récurrent. Au fil des ans, j'avais été liée par trois mariages arrangés, chacun plus insupportable que le précédent. Chaque union me volant un peu plus de mon âme et me réduisant à une marionnette sans volonté propre. Pendant longtemps, j'avais nourri une rancœur amère envers Victor, convaincue qu'il était l'architecte de mon malheur. Mais à mesure que les années passaient, j'avais fini par comprendre que Victor, bien que sévère, n'était qu'un pion dans les plans machiavéliques de Cesare. Là où j'avais vu en Victor un geôlier, j'avais découvert en Cesare le Diable. Avec le temps, il orchestrait mon existence avec une précision cruelle, transformant chaque tentative de rébellion en un acte futile. Mes mariages n'étaient pas des alliances, mais des chaînes forgées par son ambition dévorante. Chaque époux, choisi pour renforcer sa position et consolider son pouvoir, me liant plus étroitement à son réseau de manipulation et de contrôle. Il savait comment utiliser mes sentiments de culpabilité, ma douleur, et même mes rares moments de joie contre moi. Son emprise était totale, et chaque jour qui passait me rapprochait un peu plus du désespoir.












𝐁𝐎𝐑𝐍 𝐓𝐎 𝐃𝐈𝐄Où les histoires vivent. Découvrez maintenant