Chapitre 21

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Il était parti. Comme ça. C'était tellement tragique. Tellement injuste. Le destin nous avait choisi, nous et c'était tout. Nous n'étions que des marionnettes exécutant à la perfection les envies du futur. Je ne croyais plus au hasard. Je ne croyais plus en rien. Drago était parti. C'était tout ce que je retenais.

J'étais vide, telle une coquille. Tout en moi mourrait. Chaque cellule de mon corps s'éteignait au fil des secondes qui s'égrenaient. Plus Drago s'éloignait, plus je me perdais. Ca avait commencé par mes jambes. Elles s'étaient dérobées sous mon poids et je m'étais faiblement laissée choir sur le sol sale et glacé de la bibliothèque. Puis c'était remonté dans mon estomac qui se tordait de douleur sous les assauts violent de mes tripes mécontentes. Et ça avait touché mon cœur. La mort m'aurait effleurée, l'effet aurait été le même. C'était comme si on écartelait ma poitrine. Comme si des liens invisibles me tiraient de part et d'autre dans le but de séparer mon corps en deux. C'était douloureux. Je me consumais de l'intérieur. Ca brûlait. Je les sentais, ces flammes qui léchaient chaque centimètre carré de mon corps. De ma peau. Bientôt ne resterait de mon être qu'un tas de cendres. Je ne pouvais même plus pleurer. Je ne pouvais plus penser. Seulement imaginer ce qu'aurait été ma vie si Drago et moi ne nous étions pas lancés dans cette tragique affaire.

La solution est juste sous vos yeux.

Et cette phrase qui tournait en boucle dans ma tête depuis que Naomi Adams l'avait prononcée. Que pouvais-je faire ? Sous mes yeux il n'y avait rien. Qu'un sol poussiéreux et un désespoir grandissant.

La solution est juste sous vos yeux.

Dans un dernier geste sensé, j'appuyai avec force chacune de mes mains sur les côtés de ma tête. La voix devait se taire. Elle n'était rien. N'existait pas. Ce n'était qu'un fragment de sons sorti des limbes de mon esprit. Je devais m'en défaire. Parce que je ne supporterais pas de savoir Drago mort alors qu'il y avait quelque chose à faire. Mais mon âme était trop détraquée, trop brisée pour répondre aux exigences de ma faible lucidité et c'est avec horreur qu'une scène que je ne connaissais que trop bien s'imposa face à moi. Il n'y avait plus uniquement cette voix, froide et dénuée de vie qui me dictait un espoir impossible. Il y avait Naomi Adams. Dans sa cellule humide et sombre, je percevais encore son regard mort et vide.

La solution est juste sous vos yeux.

Anéantie, le leitmotiv ne me faisait presque plus rien. Devant moi, seul le vide subsistait. Uniquement cette triste vision d'une femme frêle et dont la vie la quittait à chaque seconde passée. Et puis je compris. Dans un dernier sursaut illusionniste, j'hurlai le nom de Psycho-Matt qui résonna longuement contre les parois des hautes étagères.

Ne vous avais-je pas prévenu que mon histoire était tragique ? Rappelez-vous, je l'avais abordée par le mariage d'Harry et Ginny. Tout était parti de là. Un simple mariage avait changé ma simple vie. Encore maintenant il m'est impossible de distinguer si tout cela aura engendré de bonnes ou de mauvaises choses. Je n'en sais rien. Je n'en saurais sans aucun doute jamais rien. C'est comme ça. C'est la vie, aussi injuste soit-elle. Je sais, je sais, vous trépignez d'impatience de connaître la suite de ce tragique conte. Mais avant de vous lancer dans cette lecture délicate, prenez le temps de lire ces quelques mots. Je me dois de vous mettre en garde. Parce que la suite est pire que ce que vous n'auriez jamais pu imaginer. Encore plus abominable. Encore plus cruelle. Suivez mon conseille. Arrêtez votre lecture. Posez ce cahier, brûlez-le, et continuez de vivre. Suspendre le temps pour lire ces quelques lignes ne valait pas le coup. L'histoire n'en est pas enchanteresse.

Je n'avais aucune idée de ce que je faisais. La tête vide de tous discernement, je ne pouvais m'empêcher de continuer d'hurler le nom de mon assassin. Assassin, parce qu'en tuant Drago, il me tuait.

EphemeralOù les histoires vivent. Découvrez maintenant