Avant que nos étoiles n'explosent

36 - After hours

"- Je sors ce soir, ça pourrait te faire du bien de m'accompagner revoir les autres, tu crois pas?
- Je sais pas..."

Lucas se mordit la lèvre en arrêtant de tourner sur son tabouret. Maxence cessa de ranger les courses pour dévisager le garçon avec un air compatissant. Il reprit :

"- Tu crois qu'il sera là...?
- Ce sera chez Corentin, avoua-t-il, tu veux que je lui demande?
- Non, l'embête pas avec ça." Il secoua la tête, comme soudain découragé. "Il a bien autre chose à gérer en ce moment.
- Si Baptiste vit chez lui je doute qu'il soit tenu à l'écart de vos histoires, tu sais.
- J'aimerais qu'on soit les seuls au courant sans avoir à impliquer tout le monde, soupira-t-il.
- Vous avez meublé nos sujets de conversations ces derniers jours, plaisanta-t-il."

En geignant, le brun posa les coudes sur le bar pour prendre sa tête entre ses mains. Maxence décida de lui laisser un peu de temps et reprit son rangement, mais il continuait de lui jeter des regards inquiets entre deux paquets de pâtes. Finalement, il vint s'asseoir à côté de lui, et posa une main qu'il espérait rassurante sur son épaule.

"- Lucas... Ça fait trois semaines que t'es enfermé ici quand t'es pas en cours, déjà que tu es pâle de base, là on dirait que t'es allergique au soleil ! Tu peux pas fuir éternellement une confrontation, continua-t-il doucement. Votre dispute est insensée, tu t'en rends bien compte, hein ?
- Mais c'est pas moi qui fuis !"

Soudain, alors qu'il n'était que silence et apathie depuis des jours, Lucas explosa.

"- Tout allait bien entre nous, on commençait enfin à se poser. On était heureux ! s'étrangla-t-il. Enfin moi ; il a dit qu'il arrivait pas à être heureux avec moi. Comme si je lui suffisais pas. Comme si, comme si... il était mieux sans moi. Comme s'il avait pas besoin de moi."

Sa voix se brisa et il eut l'impression que s'il n'était pas déjà assis, il s'effondrerait, en dépit de Maxence qui le serait silencieusement dans ses bras, de plus en plus fort.

"- Alors que moi je suis rien sans lui. Après toute cette histoire avec ses parents je pensais qu'on tenait l'un à l'autre. Qu'on s'était manqués mutuellement. Mais peut-être que je me suis fait des idées, peut-être qu'il n'était pas heureux de me retrouver, peut-être que, peut-être que tout ce temps notre amour n'était qu'une illusion. Que je me suis laissé emporter par l'envie de vivre de grandes choses, de beaux sentiments, mais que c'était que de la poudre aux yeux qui devait finir par se dissiper.
- Doucement Lucas, shh, doucement, ralentis."

Mais il ne pouvait pas apaiser ce flux qui semblait sortir tout droit de son cœur sans aucun filtre. Comme s'il vomissait enfin ses peurs qu'il gardait terrées en lui depuis le départ de Baptiste.

"- Ça me parait tellement surréaliste qu'il soit parti comme ça, comme si j'étais dans un brouillard et qu'au lieu de me donner la main pour m'en sortir il était parti sans se retourner. Comment est-ce qu'il a pu m'abandonner comme ça ? Je te jure ça a pas de sens, je me repasse notre dernière discussion en boucle et je comprends toujours rien de ce qu'il m'a raconté. On aurait dit un personnage de film tu sais, qui récitait un discours apprit par cœur. Je croyais que tout allait bien Max, j'y croyais si fort...
- Mais c'était pas le cas Lu', amorça doucement le jeune homme, ne voulant pas le brusquer. Depuis le début vous êtes plein de déséquilibres. Il ne t'avait même pas dit comment sont ses parents avant que tu ne les rencontre. Et regarde comment a finit votre premier baiser !
- Non, c'est, on s'est remis de ça ! Il sait à quel point je m'en suis voulu, il m'a pardonné et-
- Lucas, je dis pas que c'est de ta faute, le reprit-il. C'est sa réaction à lui qui représente bien la dynamique de votre relation. C'est toujours pareil dans vos conflits : il explose et te laisse gérer tous ses sentiments parce qu'il ne sait pas le faire tout seul. Je pense que Baptiste t'aime Lu', autant si ce n'est plus que tu ne l'aimes."