Chapitre 10 : Salon de Danse pour Sexagénaire

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            Comment en en étais-je arrivée là ? Debout devant le miroir, à ajuster ma coiffe de soubrette, j'avais du mal à faire le point. Tout ce qui revenait en boucle était : il sait. Darius sait.

Je l'ai encore fait souffrir.

            Jamais je n'avais imaginé culpabiliser à ce sujet. En grande partie parce que je n'avais jamais prévu de le revoir. Il était censé mené sa vie, trouver une femme, être heureux, avoir des enfants. En sept années, il était même surprenant qu'il n'ait pas eu une nuée de bébés illégitimes. Mais non. A mon instar il n'avait jamais trouvé le bonheur ailleurs. Or, maintenant, il s'amusait avec moi dans un esprit de vengeance typiquement Trivarien.

            -Pourquoi dois-je faire un interrogatoire dans cet accoutrement ? Marmonnai-je.

            -Parce que je suis un petit pervers, fit Darius en sortant de la salle de bain.

            A peine vêtu de sa serviette, il exposait sa musculature et ses cicatrices, sans l'ombre d'une gêne. Je détournai le regard, mal à l'aise. Je le connaissais trop bien pour me faire avoir par son sourire resplendissant. Sa méthode était simple : enterrer ses sentiments sous une couche de civilité et d'humour, pour ne montrer aucune faiblesse.

            -Ça, j'avais remarqué.

            -Mmh... J'espère bien...

            Il me fit pivoter vers lui, pour un baiser étrange. Exigeant. Dominateur. Exquis.

            -Tu ne sens peut être rien, fis-je une fois nos lèvres séparées, mais je vais avoir froids aux fesses, moi. Nous sommes en décembre.

            -Prends un de mes manteaux. J'aime bien l'idée de te voir dans un de mes vêtements.

            Je roulais des yeux en touchant le panneau de contrôle de sa penderie. Un pan du mur gris coulissa, révélant des rangées et des rangées de costumes, de robes, de talons aiguilles et de chaussures d'homme d'affaire. Comme deux choses aussi opposées pouvaient-elles être réunies en un seul homme ? Je le trouvais sexy, en plus...

            -Comment se fait-il que tu ne sentes rien ? Demandai-je, pour changer de sujet.

            -Hé, ho. Ce n'est pas que je sens rien, c'est juste que je ne suis pas réceptif à la douleur. Le plaisir, j'en bénéficie pleinement.

            Je roulai des yeux exaspérés, en bougeant ses rangées de costumes. Où se trouvaient donc ses manteaux ? En écartant un peu plus, je découvris le fond du placard. Oh.

            -Je suis atteint d'analgésie congénitale. C'est une insensibilité à la douleur. Je n'ai pas le sens de la nociception, mais toutes mes autres sensations sont conservées. Dingue, non ?

            -Heu... Je... Attend, tu veux dire que tu étais déjà malade quand nous étions ensemble ?

            -Oui, c'est le sens de congénitale. C’est de naissance.

            -Donc, tu ne sens pas la douleur, tu ne sens pas les blessures, ni le sang qui s'échappe hors de toi.

            -C'est exact.

            Mes yeux s’écarquillèrent légèrement.

            -Tu peux mourir sans t'en rendre compte ?

2. Un Agent en Tenue CollanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant