Ange Katchan

Pardonne-moi, Izuku.

Chapitre 03 :

- Ange Katchan, pourquoi tu ne manges pas ?
- Je n'y arrive pas. Je n'ai pas besoin de me nourrir.

J'ai failli lui dire : « parce que je suis mort », mais c'est un enfant, alors je ne peux pas parler de ça avec lui. Je sais qu'il peut comprendre, là n'est pas la question, mais je me vois mal lui dire qu'être un ange veut dire qu'on n'est plus de ce monde.

- Et tu dors ?
- Non, je veille sur toi.
- Mais, tu fais comment pour te reposer et prendre soin de toi ?
- Je suis un ange, je n'ai pas besoin de tout ça.

Au fond de moi, j'espère que j'ai raison. Ça fait une semaine que je suis arrivé dans cette réalité et pour le moment, je vis sans rien faire à part le regarder vivre et penser à ma tragique vie.

- Mais... Tu ne t'ennuies pas ?
- Pas pour le moment.
- Quand, tu t'ennuieras, tu feras quoi ?
- Je l'ignore.
- Izuku, arrête de parler et dors, lui ordonne sa mère derrière la porte de sa chambre.
- Oui maman !

Son regard croise le mien, puis il tapote son lit pour que je vienne le prendre dans mes bras. J'ai toujours refusé de l'approcher. Il m'a touché la joue, le jour de notre rencontre. Je sais donc qu'on peut avoir un contact physique. Je ne veux pas qu'il croie que je suis réel. Être imaginaire est préférable.

- Dors, Izuku.
- Je veux m'endormir dans tes bras.
- Pourquoi ?
- Parce que j'ai peur.
- Peur de quoi ?
- De la nuit.
- Izuku, tu as toujours dormi avec moi à tes côtés. Pourquoi serait-ce différent aujourd'hui ?
- Parce que mon papa me manque, répond-il d'une petite voix qui ferait craquer n'importe qui.
- Ton père ?
- Il est parti acheter des courses, mais il n'est pas revenu.

C'est différent de ma réalité. Son père était présent. Est-ce pourquoi je suis là pour lui ? L'absence de son père, va-t-il être l'élément déclencheur de sa perte ? Le pauvre enfant. Je me souviens qu'il était très attaché à son père. Je pose mes yeux sur lui et sa bouille me donne envie de craquer. Le connaissant, il fait le fort pour ne pas inquiéter sa mère, mais devant moi, il ose craquer. Son nounours est écrasé contre son torse et ses yeux se remplissent de larmes à mesure que les secondes passent. C'est un enfant triste. Je me dois de lui rendre le sourire et de l'aider. Je me décide à l'approcher et je me mets à genoux contre son lit d'enfant. Je pose ma grande main sur son épaule, puis je viens caresser sa tête.

- Ange Katchan, tu crois que je vais le revoir un jour ?
- Je ne sais pas.
- Au moins, tu ne me mens pas.
- Je ne vois pas l'intérêt de mentir sous prétexte que tu es un enfant.
- Tu veux bien me bercer ? Pleure-t-il silencieusement.
- D'accord.

Je le soulève pour me placer sous lui, en guise de matelas, puis je le serre contre moi. Il s'agrippe à moi, comme si j'étais sa bouée de sauvetage. Il reste silencieux malgré ses nombreux hoquets. Comme il me l'a demandé, je le berce, mais il ne s'endort pas tout de suite. Il a besoin de déverser toute sa tristesse. Un petit être éprouve bien plus d'émotions qu'un adulte. Enfin, pas toujours... Mais pour son cas, c'est incommensurable. Son émotion est décuplée et ça me peine de le voir ainsi.

Il a pleuré de nombreuses fois dans mes bras ou en face de moi, mais ce n'est que maintenant que je comprends et partage sa peine. Il a fallu que je meure pour comprendre mes erreurs, les accepter et faire avec, sans jamais pouvoir modifier mon passé, puisque je n'existe même plus.

- Pardonne-moi, Izuku, chuchotai-je en le serrant contre moi avec douceur.

Heureusement pour moi, il dort profondément... Je le garde encore dans mes bras pendant une bonne partie de la nuit, comme si ce geste pouvait effacer une partie de mon ardoise. Je ne veux pas qu'il souffre. Je ne veux plus le voir dans cet état. Pourtant, je sens que ma mission ne va pas être sans difficulté. Doucement, je finis par le porter et le placer correctement dans le lit.

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Publié le : 12.09.2021