Chapitre III « Vente de rose »

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― Je pense que nous en avons fini pour aujourd'hui, dis-je aux trois hommes face à moi. Cette réunion est terminée. Bonne soirée messieurs.

Ils me saluent comme ils le doivent vis-à-vis de mon rang, je hoche la tête et nous sortons tous les quatre de la salle de réunion. Je ramène mes dossiers dans mon bureau privé. Une fois passé les portes, je les referme à clef et vais m'asseoir dans mon gros siège en cuire. La journée a été longue... comme toujours j'ai envi de dire...

Pour éviter de passer toutes ces heures à penser au plus gros problème de mon existence, ou plutôt à ce souci que moi je peux ignorer sans trop de difficulté, mais qui inquiète plus que de raison mon entourage politique. Pour oublier ses visages et ces insinuations aussi énervantes que stressantes, je me suis noyé dans le travail. J'ai enchaîné les réunions, j'ai rempli des dossiers à la pèle, j'ai prévu des dates pour d'autres réunions, j'ai donner des dossiers à travailler à d'autre personnes, j'ai organisé des dates de visite dans d'autre villes, j'ai passé des coups de fil, etc, etc...

Mais je crois que maintenant que je m'accorde un instant seul, je ne peux plus le nier. Je dois réfléchir à ce problème. Ma sultane. Ou plutôt mon absence de sultane...

Je passe une main dans mes cheveux, ébouriffant mes boucles, lâche un soupir désespéré. Non. Plutôt frustré. Le problème, si nous pouvons appeler ça un problème, c'est que je suis tombé amoureux trois fois dans ma courte vie... non, je dirais plutôt que j'ai désespérément chercher de l'affection auprès de trois femmes pour oublier mes devoirs et la perte de mes parents, une fois la nuit tombée, et pour me sentir moins seul au moment des repas. Je cherchais aussi à me sentir mieux en me disant que j'aidais quelqu'un dans le besoin, et qu'au final, c'était juste à cause du temps passé ensemble qu'une inclinaison se créait naturellement. Mais peut-on appeler cela de l'amour ? Je ne crois pas. Lorsque les sentiments se tarissent, chez un parti comme chez l'autre, nous nous séparions, comme dans n'importe quelle relation.

Mais je ne pouvais me résoudre à les jeter hors du palais, sans le soue, sans aucun point de chute, sans connaître aucun soutien...

Je dois avoir l'air fin : trois ex sous mon toît et aucune petite amie à l'horizon, encore moins de fiancée, et je ne parlerai même pas de femme !

Il n'empêche que, au fond, j'espérais que l'une d'entre elle ferait une bonne dirigeante. Mais je ne crois pas que ce soit le cas. Je ne crois pas que l'une d'elles ait les capacités pour être à la tête d'un pays... ce sont encore et toujours les mêmes arguments qui reviennent en boucle. Histoire d'enfoncer toujours plus le clou, je décide d'appeler ma sœur, ma petite sœur.

Halo ?
― Malika, c'est moi.
Je sais que c'est toi, gros malin. Je vois ton nom affiché sur mon portable, me lance-t-elle. M'enfin... au son de ta voix, ça n'a pas l'air d'aller. Que se passe-t-il ?
― Comme d'hab...
Ah...

Je sens à sa voix et à quelques bruits de fond que jusqu'ici elle était avachie et que maintenant elle se redresse.

Ta sultane...
― Oui...
Que veux-tu que je te dise Kail ? Rien n'a changé depuis la dernière fois !

Je me cale un peu plus dans le fond de mon fauteuil pour continuer cette discussion.

― ... que tu me remettes les idées en place ? demandé-je.
Bien... Tu m'énerves, hein ? Tu as de la chance que je t'aime ! Alors, tu as besoin d'une sultane, d'une jeune femme en forme avec qui tu auras une descendance, qui saura être une bonne mère, une femme intelligente qui pourra diriger le pays à tes côtés, qui aura les nerfs et le charisme pour ça, mais surtout, tu as besoin d'une femme qui saura t'aimer car tu es capable de passer ta vie à diriger auprès d'une sultane sans amour, mais tu ne seras pas capable de la mettre dans ton lit juste pour la mettre enceinte telle une poulinière.
― Malika, ton langage...
― Ensuite, tu as, aux dernières nouvelles, toujours trois exs : Ady, Isis et Blossom. Tu espérais trouver la perle rare auprès de l'une d'entre elles. Sauf que, même si Ady est noble, c'est une vraie vipère à corne ! Je me demande toujours pourquoi tu es sortie avec elle...
― Erreur de jeunesse...
Mouais. J'essaie encore de ne pas tenir rigueur du Kail de vingt ans... de toute façon elle n'a pas les capacités d'une sultane, juste la présomption du titre. Isis est mieux, elle a un bon fond pollué par Ady. De toutes manières, elle n'a pas les épaules d'une dirigeante, mais...
― Mais ?
― Le « mais » n'a toujours pas changé. Je crois vraiment qu'Isis est quelqu'un de bien au fond, que si elle en a un jour, elle aimera réellement ses enfants, mais toi...
― Nous ne nous aimons plus, depuis longtemps. La flamme ne se ravivera pas. Il n'y a plus que de l'affection entre nous, une sorte d'attachement nostalgique.
― Quel poète !
― Mal...
― Oui, oui... Quand à Blossom, elle est douce et intelligente. Je pense qu'en tant que mère elle serait formidable. Je crois également qu'avec un peu d'expérience elle pourrait largement t'aider à la gouvernance du pays et qu'elle serait appréciée par le peuple. Mais saurait-elle allier maternité et royauté ? Je ne crois pas. Sans parler d'amour !
― Hmm... même si c'est entre nous deux que ça à tenu le plus longtemps et que, elle, je crois que je l'ai réellement aimée... marmonné-je pensivement.
― Je sais... tu étais vraiment malheureux lorsque Blossom t'a quittée. Ce n'est pas trop dur de la voir encore dans le palais ?
― Ne t'en fais pas, c'est passé. Et Adil m'assure qu'elle aussi, va bien de son côté.
― C'est fou. Je ne m'y attendais pas du tout ! La dernière fois que je vous avais vu ensemble, vous ressembliez à un couple de rêve, heureux, épanouie, et tout et tout.
― Moi aussi cela m'a surpris, mais je n'avais pas d'autre choix que d'accepter sa décision... Enfin, bref. Je ne t'appelle pas pour parler de Blossom, repris en secouant la tête. Comment font les autres, sérieusement ? J'ai l'impression que ne ne trouverais jamais la femme qui me correspond ! J'ai aussi l'impression que tous mes amis sont déjà casés, mariés, qu'ils ont une maison, un chien toujours sale, en voitures familiale et surtout, les enfants qui vont avec !
Arrête un peu ! Tu sais ce qu'on dit : le mieux est l'ennemi du bien. Alors continu tes recherches, grand-frère, m'encourage-t-elle. Tu finiras par trouver la perle rare, mais ne précipite surtout pas les choses. Ce n'est pas un choix anodin. C'est ta position qui t'oblige à avoir des critères très élevée, mais ce sont ces même critères qui feront que tu trouveras une femme vraiment faite pour toi, avec qui tu seras en confiance et heureux. Peut-être même que c'est elle qui te choisira ! Attention, rit Malika à l'autre bout du combiné.

La Rose Des SablesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant