Chapitre XLVII : Profanation de tombes

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Les mains croisées dans le dos, le Nain observait les deux tombes dressées face à lui. En trois années, on aurait pu s'attendre à découvrir une épaisse couche de poussière sur leur couvercle de pierre.

Or, il n'en était rien.

Les noms des défunts s'illuminaient sous les douces lumières des bougies qui éclairaient la pièce, comme s'ils venaient d'être gravés.

Un sourire étira les lèvres du Nain. Il s'avança de quelques pas et, debout entre les deux tombes, posa ses mains sur chacune d'elles. Ses yeux s'illuminaient d'un plaisir perfide – sadique – de découvrir les neveux bien aimés de son demi-frère.

Fili.

Kili.

Quel plaisir ressentirait-il de profaner leur tombe ! Ils étaient morts après tout ! Dégager leurs corps putréfiés et puants n'était rien de plus qu'une provocation supplémentaire.

Une souffrance plus douloureuse pour Thorïn.

D'un air distrait, Aldaïn tapota du bout des doigts la tombe de Fili. Il imaginait le désespoir ressenti par son demi-frère de voir ses neveux mourir. Quelle souffrance cela avait dû être pour lui ! Quelle joie aurait-il ressenti de voir Thorïn victime de sa culpabilité ! Quelle exquise euphorie que d'imaginer l'expression horrifiée d'Ecu-de-Chêne de découvrir les corps de ses bien aimés neveux !

La tentation d'ouvrir les tombes était telle qu'Aldaïn commençait déjà à pousser le lourd couvercle de pierre où reposait Fili. Pendre leurs restes n'était que justice ! Ces frères étaient aussi coupables que leur oncle ; l'un prêt à monter sur le trône à la mort de Thorïn et l'autre prêt à devenir Prince sous la Montagne.

Les dents serrées, Aldaïn poussa des deux mains la lourde pierre qui cachait Fili. À peine l'eut-il poussé de quelques centimètres qu'une odeur putride le frappa en plein visage. Si la pestilentielle odeur aurait dû le répugnait, le Nain ne ressentit qu'un plaisir grandissant que d'imaginer Thorïn réduit à cet état de cadavre puant.

Après un dernier effort, le couvercle tomba sur le sol de pierre dans un grand bruit qui résonna sans doute dans la Montagne. Poussé par une curiosité morbide, Aldaïn se pencha pour découvrir les restes pourris de Fili. De son cadavre ne restait que ses vêtements décharnés, son épée et son squelette où se trouvaient encore quelques morceaux de chair noircis par la décomposition.

Entraîné dans sa folie, le Nain se tourna vers la tombe de Kili. Euphorique par sa terrifiante idée, Aldaïn poussa le lourd couvercle et observa le corps du cadet des frères. Le cadavre n'avait rien à envié à celui d'à côté.

Un sourire vicieux sur les lèvres, Aldaïn s'essuya les mains avant de s'éloigner des tombes profanées.

- N'est-ce pas un peu excessif ?

Le Nain ne se retourna pas lorsqu'Earthran le rejoignit d'un pas lent. Les yeux pétillants, Aldaïn tourna la tête de droite à gauche.

- Pour détruire son ennemi, rien ne vaut que d'appuyer sur ses faiblesses.

Le Nain se tourna enfin vers le sorcier.

- Thorïn en a à volonté. C'est à se demander comment il est parvenu à rester en vie jusqu'ici.

Aldaïn pinça les lèvres avant de reposer ses pupilles sur les tombes. Envahi par la puanteur que dégageaient les cadavres des neveux d'Ecu-de-Chêne, Earthran mit sa main sur son nez et respira par la bouche.

- L'amour est sa plus grande faiblesse. Ce sera sa perte.

- Ou la vôtre.

Aldaïn toisa le sorcier du regard.

Le Hobbit : Sombres présages [Tome 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant