— Retour à vingt-et-une heure précises, pas d'alcool, pas de tabac, pas de drogue, pas d'aliments trop sucrés, pas d'exercice physique, pas de sexe si possible, pas d'écran et pas d'effort inutile, vous ne lui donnez aucun médicament même s'il a mal à la tête, au moindre problème vous nous appelez évidemment, énuméra le médecin en lançant un regard perçant à Osamu. Sakura, je compte sur toi pour prévenir tes parents que ton frère sort.
— Bien sûr, vous pouvez compter sur moi.
Osamu se retint d'hausser les sourcils et de sourire. Il ne connaissait pas vraiment Sakura, mais si elle était comme son frère, sa franchise était douteuse. Ce qui l'amusait un peu.
Le médecin soupira et croisa ses mains sur son bureau. Osamu, Suna et Sakura étaient assis en face de lui et attendaient patiemment qu'il accepte enfin de laisser Suna partir. Le médecin fixa son patient comme pour le détailler du regard. Il avait des yeux bleus perçants, qui semblaient sonder l'âme de quiconque osait le défier du regard. Osamu était bien content que ce ne soit pas lui qu'il regardait.
— Sur une échelle de un à-
— Quatre, coupa Suna.
Il connaissait déjà cette question, on lui posait tous les jours. « Sur une échelle de un à dix, comment est-ce que tu te sens ? », « Sur une échelle de un à dix, à quel point tu as mal », « Sur une échelle de un à dix, à combien de points tu as envie de vomir ? ». On lui posait cette question pour tout, tout le temps. Pour l'instant, ses réponses n'avaient pas encore dépassé la barre de sept. Osamu redoutait plus que tout le jour où Suna dirait dix.
— Tes douleurs sont supportables, demanda le médecin en arcane un sourcil.
— Oui.
— Tu as mangé ce midi ?
— Oui.
Osamu garda ses yeux rivés sur le diplôme accroché au mur derrière le médecin. Quand il avait trouvé Suna dans sa salle de bain, il était en pleine déprime, et quand Suna était comme ça, il y avait peu de chance qu'il mange. Sa capacité à mentir aussi légèrement et aussi facilement était déconcertante. Si Osamu ne connaissait pas bien Suna, il l'aurait cru sans hésiter. Enfin, ce n'était pas vraiment un mensonge, puisque Suna avait quand même mangé aujourd'hui, il avait mangé quelques taiyakis que Osamu lui avait apporté.
— Alors je peux y aller, demanda Suna avec impatience.
Le médecin soupira de nouveau.
— Ne mange pas trop ce soir, ton estomac a rétrécit alors fait bien attention à toi.
De toute façon, il y avait peu de chance que Suna mange beaucoup.
— Allez je veux plus vous voir jusqu'à tout à l'heure, finit par dire le médecin avec un geste de la main.
Ravis, Osamu, Suna et Sakura se levèrent et s'inclinèrent joyeusement devant le médecin pour le remercier, avant de sortir immédiatement de son bureau. Parfait, Osamu avait enfin « obtenu la garde » de son ami. C'était quand même tout une épreuve. Pendant presque une heure, lui et Sakura avaient dûs argumenter sur pourquoi il fallait laisser Suna sortir, et sur les capacités (totalement inexistantes) de Osamu et sa famille pour s'occuper de Suna. Le médecin avait dû répéter au moins une bonne dizaine de fois toutes ses conditions avant d'accepter que Suna sorte. Osamu avait l'impression qu'il était traité comme un enfant particulièrement dangereux, qui ne fallait surtout pas quitter des yeux, sous peine qu'il commette un attentat à l'aide d'une petite cuillère. D'un côté il trouvait cette surveillant obligatoire totalement ridicule, mais d'un autre il la comprenait. Même si Suna disait qu'il n'était pas en sucre, pour Osamu il l'était et il fallait faire attention à lui.
— Il faut peut-être que tu te changes non, dit Sakura en regardant son frère.
— J'ai que des vêtements comme ça ici, dit Suna.
— Tu n'as pas tes beaux vêtements ?
— Pourquoi je les aurais ? Je suis à l'hôpital, remarqua Suna. De toute façon faut cacher... tout ça.
Suna agita ses bras devant son corps et Osamu comprit qu'il parlait de sa maigreur.
— Tu sais ton poids n'a pas d'importance, assura-t-il d'une voix qui se voulait comprenhensive.
— Pour moi si, et j'ai pas envie que tes parents sachent que je suis anorexique, ajouta son ami en haussant les épaules.
— Tu sais que ce n'est pas une honte ?
— Euh si, ça sert à rien de débattre, je changerais pas d'avis.
Osamu regarda Suna avec peine. Il n'y pouvait rien s'il était comme ça, il ne l'avait pas choisit... Osamu secoua la tête. Il ne fallait pas qu'il regarde son ami de cette façon, sinon ça serait encore plus dur pour lui.
— Bon de toute façon on doit repasser par ta chambre parce qu'il faut que je récupère mon téléphone que j'ai laissé dedans, dit-il simplement.
— Ok.
— Moi je vous laisse, j'ai un rendez-vous avec mes amies et je suis en retard, dit Sakura.
— Ok.
Sakura prit son frère dans ses bras et l'étouffa contre elle. Elle avait une force impressionnante, surtout lorsqu'il s'agissait de prendre son frère contre elle. D'une lança un regard blasé à son ami par dessus l'épaule de sa sœur.
— Sakura tu vas me casser en deux, se plaignit-il. Pourquoi est-ce que tu me serres toujours comme si c'était le dernière fois qu'on se voyait ?!
— Désolée Rin, s'excusa sa sœur en riant nerveusement. Allez j'y vais, à bientôt !
Sakura lâcha son frère, elle ne put s'empêcher de lui jeter un regard inquiet et s'éloigna rapidement dans le couloir de l'hôpital. Osamu la regarda partir en silence. Sakura avait l'air de penser que son frère disparaîtrait d'un jour à l'autre. Ça l'agaçait que quelqu'un puisse penser ça, même si lui même ne pouvait s'empêcher de penser ça dès que quelque chose allait mal. Il se détourna d'elle puis Suna et lui retournèrent dans sa chambre.
Effectivement, son ami n'avait que des vêtements simples ou confortables, ils étaient tous semblables. C'était inutile qu'il se change. Et puis, Osamu l'aimait bien comme ça. Suna récupéra la boîte de taiyakis qu'il avait laissé dans la salle de bain, et les rangea dans son armoire, ne sachant pas où la mettre.
— Tes parents vont me prendre pour un cadavre, dit Suna en se regardant dans un miroir.
Un cadavre non, mais un malade oui. Il avait des cernes bleus, une peau aussi pâle que la porcelaine et des joues creuses. Des traits caractéristiques d'une personne malade. En plus de sa, ses yeux étaient toujours légèrement rouge à cause de ses pleures.
Le jeune homme essaya d'effacer toute trace de tristesse sur son visage avec de l'eau. Il passa doucement ses mains sur le visage de Suna et effaça tant bien que mal les rougeurs de ses yeux.
— Pourquoi Atsumu a dit que j'étais ton chéri, demanda soudain Suna.
Le jeune homme tenta de ne pas paraître déstabiliser par cette question. Il savait très bien la réponse à cette question. Son frère était persuadé qu'il aimait Suna, mais il ne se voyait pas lui dire ça comme ça.
— Parce que je tiens à toi et que Atsumu ne sait pas faire la différence entre ami et petit ami, répondit calmement Osamu. Désolé si ça te gêne.
— Non c'est pas grave, dit Suna avec indifférence.
Osamu lui sourit. Suna le regarda un instant, détaillant son visage de ses yeux verts puis un sourire sincère se dessina sur ses lèvres.
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Just come home
FanfictionNous sommes parfois notre propre ennemi, mais Osamu aurait préféré ne jamais le savoir.