Je porte une robe noire sobre avec des collants et je passe un long moment dans la salle de bain à soigner mes boucles brunes. C'est le seul soir de la semaine où je laisse tomber mes éternels jean ou leggings avec tuniques manches longues. J'ai redoublé d'efforts, je dois le reconnaître, à la demande de Carole. Ce soir, elle me présente quelqu'un de très très bien. Elle n'a rien voulu me dire de plus sur lui, prétextant qu'il valait mieux garder un peu de suspens et que je me fasse ma propre opinion. J'espère qu'il va me plaire, que je vais avoir le coup de foudre au premier regard et qu'il sera l'amour de ma vie, celui avec qui je vais me marier, avoir trois enfants et un hamster et partir en vacances sur son yacht privé et sa maison secondaire en Corse (oui j'ai l'imagination qui s'emballe).
Je regarde l'heure, c'est normalement à ce moment-là que Roméo et moi sommes censés partir de la maison pour aller rejoindre les autres. Je profite de son retard pour vérifier une dernière fois ma coiffure et essayer de me trouver une démarche confortable avec les chaussures à talons qui jouent avec mon équilibre à chaque pas.
L'heure tourne et lorsque je lève la tête vers l'horloge de la cuisine, il est 21h.
J'ai un doute : est-ce que je devais retrouver Roméo directement au bar ?
Mon téléphone indique deux SMS.
Carole – 20h33
Arrête de te pomponner, tu es déjà parfaite, ramène tes fesses !
Carole – 20h59
Je suis seule avec Nico... Martin ne répond pas. Tu as eu des nouvelles de Roméo ?
Avant de lui répondre j'appelle Roméo. Ça sonne dans le vide, pas de réponse. J'appelle Martin, idem.
Alicia – 21h02
Ni Martin, ni Roméo...
Carole doit être dans le même stress que moi. J'attends patiemment dix minutes, puis je retente d'appeler Roméo. Il bossait, donc si ça se trouve, lui et Martin ont eu un contre temps. Mais pourquoi aucun des deux ne peut prévenir ? Je n'ai pas un instinct ultra développé pour ce genre de choses, mais là je me dis que l'univers est en train de préparer un mauvais coup.
Perchée sur un tabouret de la cuisine américaine, je tourne en rond dans ma tête, en même temps que les aiguilles de l'horloge.
21h30.
22h05 !
C'est officiel, je ne peux pas rester comme ça.
J'attrape ma veste, mes clés et je sors. Je rentre l'adresse sur mon GPS et je conduis jusqu'à la box. Il n'y a pas de place pour me garer, mais j'ai au moins ma réponse : elle est fermée.
Je fais demi-tour pour rentrer à l'appart lorsque mon téléphone vibre.
Carole – 22h27
J'ai eu Martin. Il y a eu quelques soucis ce soir...
C'est l'explosion dans ma tête, un feu d'artifice de possibilités toutes plus angoissantes les unes que les autres.
Je me gare de travers et je reconnais la voiture de Martin. Je monte les escaliers et j'entends leurs voix : lui et Roméo sont sur le pas de la porte. Lorsque j'arrive, Roméo fonce dans la salle de bain sans que je n'aie le temps de voir son visage ou de comprendre ce qui ne va pas. Martin ferme derrière lui, l'air contrarié.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— On a eu un problème.
Martin, avec ses allures de bodybuildeur qui pourrait écraser une voiture avec ses mains nues n'a pas l'air du genre de gars qui a des problèmes.
VOUS LISEZ
Le syndrome Roméo
ChickLit« Si tu vis jusqu'à cent ans, je veux vivre cent ans moins un jour, pour ne jamais avoir à vivre sans toi. Il dit ça comme s'il venait de déclamer un poème. - C'est de toi ? - Winnie l'ourson l'a dit en premier. - Mais c'est trop beau ! - C'est...