Chapitre 2 : Le pouvoir des fleurs
« Tout va bien, monsieur ? demanda Harry avec un soupçon de crainte dans la voix. »
Le Docteur et lui avaient fui l'école comme deux vagabonds fuyant la peste noire : dévalé la rue piétonne, traversé un boulevard, bousculé une vieille dame, renversé un étalage de légumes, cavalé derrière un chien enragé (à moins que ce ne soit l'inverse) et atterrit dans un parc où ils avaient communément décidé de se poser.
Ils s'étaient installés confortablement à côté d'une marre, Harry étant le plus mature avait expliqué au Docteur comment s'assoir sans tâcher irrémédiablement son pantalon. Il s'apprêtait à lui demander son nom et d'où il sortait quand l'adulte poussa un hurlement de frustration. Sans la moindre explication, il bondit loin de la mare pour déterrer contentieusement chaque fleur de ce massif.
Perplexe, Harry commençait à se demander s'il n'était tout simplement pas échappé de l'hôpital psychiatrique du coin. Cela expliquerait ses vêtements élimés, son aspect morbide et ses réactions irréelles.
« Vous avez l'air contrarié, insista-t-il courageusement.
- Des fleurs, grommela péniblement le Docteur. Cette journée était l'incarnation de la perfection : un génocide, une énorme explosion et une course-poursuite, quoi demander de mieux ? Evidemment, c'était trop beau et j'aurai dû m'en douter. Qui est l'imbécile qui a décrété que les plantes égaillaient les lieux publics, c'est complètement absurde ! Il n'y a rien de plus déprimant au monde que ces machins multicolores aux formes relaxantes. »
Rageur, il creusait la terre avec ses ongles comme un chien sans se soucier une seconde des regards consternés à son égard. Harry leur adressait un sourire compatissant en haussant les épaules pour bien signifier qu'il ne comprenait pas vraiment ce qu'il se passait, lui non-plus.
« Pourriez-vous arrêter ça ? supplia l'enfant qui détestait être un centre d'intérêt. Tenez-vous correctement, je vous en prie. »
A son plus grand étonnement, le Docteur cessa immédiatement tout comportement suspect et s'assis convenablement comme s'il était une personne parfaitement normale. Bon, en fait, il essayait et c'était déjà un bel effort. Sans doute ses parents ne lui avaient pas expliqué qu'on ne devait pas mettre ses pieds dans une mare publique, ah les aléas de l'éducation….
« Merci monsieur, répliqua Harry avec un sourire gêné envers les passants.
- Oooh, non non non ! s'écria soudainement le Docteur d'un air catastrophé. Argh, pitié, nooon. »
Il se pencha au-dessus de la mare et regardait son reflet déformé tout en s'agitant de plus en plus. D'une main fébrile, il saisit une énorme touffe de cheveux et tira dessus. Très perturbé, il secouait la tête dans tous les sens comme s'il cherchait quelque chose dont il ne voulait pas se souvenir.
« Harry, déclara-t-il sombrement. J'ai une question vraiment très importante à te poser et tu dois me dire la vérité la plus absolue. Ça ne va pas être facile, je regrette mais je n'ai malheureusement pas le choix. »
Malgré son ton sérieux, il continuait à faire d'horribles grimaces à son reflet : tirer la langue, cligner des yeux, gonfler ses joues… Le décalage entre l'attitude et les mots employés contredisait l'existence du Docteur, il était là mais dans un autre monde.

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Moi, le Renard et nos rayures || RANTBOOK
Non-FictionRantbook - Graphiste & Auteur || Geek • Écriture • Dessins || 🏳️⚧️ PAN & ACE 🏴☠️ 26 ans - PARIS Handicap