Chapitre 9

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Posté devant le tour à bois, DongJu tentait vainement de se concentrer pour sculpter son bougeoir, mais il était bien trop agité pour travailler correctement. Cela faisait déjà deux fois que son professeur le rappelait à l'ordre, plus qu'étonné de le voir rater son travail alors qu'il était habituellement l'un des meilleurs de sa classe.

Mais à vrai dire, réussir son bougeoir n'était pas ce qui lui importait pour le moment, à son grand désarroi. Parce que s'il pouvait oublier ne serait-ce quelques secondes que YeongJo venait le chercher à la fin de sa journée, croyez-le, il le ferait. Mais voilà, il avait accepté — avec tout le courage du monde — de voir l'auteur seul à seul et il se retrouvait désormais à hésiter entre y aller ou simuler un malaise pour y échapper.

Y échapper. Il en parlait comme d'une condamnation et pourtant cela faisait une semaine qu'il attendait ce moment. Il ne se comprenait plus lui-même, un jour il pouvait être impatient d'y être et un autre regretter amèrement d'avoir accepté. Il ne savait même pas réellement ce qu'il ressentait envers YeongJo, s'il était attiré par lui seulement parce que ce dernier daignait lui accorder un peu d'attention, ou si son aura masculine et provocatrice le chamboulait réellement.

C'était peut-être les deux. Étant très peu considéré par ses pairs — bien que jusqu'ici il ne s'en soit jamais plaint, au contraire —, DongJu était tout retourné d'être au centre de l'attention de quelqu'un. Mais comme Keonhee l'avait dit, YeongJo était un homme très attirant et l'étudiant ne pouvait nier avoir été séduit par ses traits et son attitude dès la première fois, quand l'auteur n'avait pas encore laissé croire qu'il "voulait lui mettre le grappin dessus", pour reprendre les mots de DongMyeong. Donc c'était un peu des deux, finalement.

Arrivé à la fin de son dernier cours, DongJu quitta l'établissement presque à reculons. Considérant son envie de rester le plus loin possible de la race humaine, il n'avait pas vraiment d'amis — si on omettait ses outils et son tour à bois mais c'était triste alors il évitait de le dire. Il venait et quittait donc l'école seul, la plupart du temps la lanière droite de son sac sur son épaule et les mains dans les poches de son pantalon en toile. Des fois, pour passer encore plus inaperçu il portait un masque mais c'était assez rare, il aimait trop sentir l'odeur qui émanait de son école, celle du bois coupé, poncé, vernis.

Seulement en cette fin de journée, il avait mis les deux lanières de son sac sur ses deux épaules, il avait les bras parallèles à son corps et était crispé de la tête aux pieds, si bien qu'on aurait pu le confondre avec un playmobil. Ses pas étaient lents, il le faisait exprès. Il n'avait pas envie d'arriver au portail. Pas encore. Il voulait encore quelques minutes de plus. De toutes petites minutes.

« DongJu ! »

C'était raté. Il avait été repéré et le pire était qu'il n'avait même pas encore passé le portail.

« DongJu, je suis là ! »

Oui, c'est bon, il l'avait vu. Il l'avait même sacrément bien entendu la première fois. Peut-être qu'il pouvait encore faire demi-tour ? Il était encore dans l'enceinte de l'établissement, officiellement il n'était toujours qu'un étudiant, pas encore un jeune homme en route pour un rendez-vous. Donc s'il faisait demi-tour maintenant, il pouvait plaider non-coupable si on l'accusait de fuite. J'avais encore du travail.

« DongJu ! »

Cette fois, le noiraud avait élancé sa main en l'air pour lui faire signe. Résigné, DongJu finit par le rejoindre à petits pas, les yeux fixés sur ses chaussures et les bras toujours collés à son corps. En arrivant devant la voiture — qui hurlait le luxe, par ailleurs —, le brun leva enfin le regard sur le trentenaire et celui-ci lui fit un grand sourire. Un sourire comme la dernière fois, rassurant.

« Vocalement vôtre » - Xion x ? ✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant