Une Alcoolique Dans Le Bataillon

La réalité c'est qu'il est inquiet pour tout le monde

Je me réveille en sursaut. Les larmes menacent de couler. J'ai refait le même cauchemar.

Il est 5h du matin, j'ai à peine dormi 4 heures cette nuit.

Une douleur au crâne me prend et je comprends directe. C'est à cause du manque d'alcool.

Tout est lié, vertiges, tremblements, du mal à m'endormir, maux de tête, fatigue générale. Tout ça ce sont les signes que mon organisme réclament sa dose d'alcool quotidienne comme il en a l'habitude.

Je me redresse sur mon lit et frotte mon visage. Dans un soupir je me lève. Je le sais, je vais jamais réussir à m'endormir, ça refait comme hier matin. Mais bon après tout c'est pas le plus important puisqu'aujourd'hui, c'est le grand jour ! On part en expédition.

Je descends doucement les escaliers en évitant de faire trop de bruit pour les autres qui dorment.

En réalité, j'ai pas du tout faim, mais bon si je veux être en forme pour aujourd'hui, il faut bien que je m'alimente.

Une chose est sûre, je crève de soif... Je crois que j'ai jamais eu la bouche aussi sèche. Encore le manque d'alcool...

Une fois dans la cuisine, je me remplis un verre d'eau que j'avale en quelques secondes à peine.

- ça fait du bien ! Je chuchote soulagé.

Je me ressers un verre et prends une pomme avant de partir m'asseoir à une table.

Je trifouille mon collier de mes mains tremblantes en repensant au cauchemar. Je suis tellement absorbé par mes pensées que je ne remarque même pas le Caporal s'asseoir en face de moi.

- Encore toi gamine.

Je reviens à la réalité et pose mon regard sur lui. 

- C'est encore un mauvais rêve ?

Je hoche doucement la tête en prenant bien soin de mettre mes mains sous la table. S'il voit mes tremblements il pourrait penser que je suis faible. Je n'ai pas envie qu'il pense que je suis une pauvre fille alcoolique qui ne sait pas gérer son addiction, même si c'est vrai en soit.
En vérité qu'il sache que je suis accro, ne me dérange pas plus que ça. Ce qui me dérange, c'est qu'il sache que pour moi, c'est une réelle torture de ressentir un manque.

- Je t'ai entendu crier cette nuit.

Surprise, mes sourcils viennent automatiquement se froncer.

- Comment ça ? Je lui demande dubitatif.

- Tu criais un prénom. Je crois que tu disais Sakura.

Je l'observe une minute. Son ton est toujours aussi froid et confiant. Néanmoins, je crois bien que pour la première fois, il évite mon regard. Lui qui a pour habitude de me fixer bien droit dans les yeux. Là, il ne le fait pas et je l'avoue ça me surprend.
Je ne pense pas qu'il ait peur d'aborder ce sujet, ou encore, qu'il soit nerveux. Je pense plutôt qu'il n'a pas l'habitude de parler de choses privées et surtout en ce qui concerne la vie de quelqu'un d'autre.

- C'est rien du tout. Je rétorque sèchement.

Honnêtement, j'aurais préféré qu'il ne m'entende pas ou même qu'il ne m'en parle pas. À présent, il doit certainement se poser des questions et clairement, je n'ai pas envie d'en donner les réponses. Ce qui est assez logique puisque je ne connais rien de lui et qu'il en sait déjà bien assez sur moi.

- T'as de la chance gamine. Je ne dormais pas alors ça m'a pas réveillé. Il me répond calmement.
Tu ne manges pas ta pomme ?

Je fixe quelques secondes ses beaux yeux bleus, gris. Son regard est tellement froid, je dirais même intimidant. Beaucoup auraient détourné le regard. Pas moi, je ne le fais pas, au contraire. Je le maintiens me perdant dans cet océan de glace. C'est à la fois hypnotisant et effrayant. Parfois, il est tellement neutre que j'en viens à me demander s'il arrive à éprouver des émotions...