Chapitre 8

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Maëlle a calmé l'orage. Elle a accepté de se rendre au sport, arguant que cela améliorerait ses notes d'EPS qui ne sont pas glorieuses et que cela lui permettrait même, elle avait cru mourir en le disant, de se rapprocher de Clara.

Philippe et Ambre ont été surpris par son choix, Maëlle ayant une haine viscérale de tout ce qui pouvait ressembler de près ou de loin à un tapis de course ou tout autre machine visant à vous faire gagner en muscles. Pourtant Philippe s'en était réjoui. Deux soirs par semaine, il ne verrait plus sa petite tête se balancer au rythme connu d'elle seule tandis qu'elle mettait la table.

Il adresse un sourire victorieux à son épouse, un de ceux qui vous glace le sang. Ce geste n'échappe pas à la jeune lycéenne qui se retient de frissonner. Parfois, son père l'effraie et elle ne sait comment sa mère fait pour avoir vécu et pour continuer de vivre avec lui, pour dormir à ses côtés. Elle, elle aurait déjà essayé de l'étrangler depuis longtemps. Mais, vient lui chuchoter une petite voix à son oreille, Il faut bien avouer qu'Ambre aussi est effrayante et complétement lunatique alors... ils se sont peut-être bien trouvés.

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Elle retrouve Liam, levant une paire de pouces manucurés et victorieux:

« J'ai réussi héhé ! Appelez-moi Maëlle. Maëlle Bond ! »

Elle se réjouit de son succès, d'avoir pu calmer le jeu plutôt que de l'envenimer comme elle a souvent tendance à le faire. Eliott serait fier d'elle. Et Liam aussi d'ailleurs.

Pourtant, il a revêtu son masque froid d'indifférence, comme s'il avait tout bonnement oublié ce qu'il venait de demander à sa sœur. Cette dernière est refroidie et vient s'installer à côté de lui. Il triture sa part de carrot cake, encore intacte.

« Tu as entendu ? J'ai réussi ! Papa et maman sont réconciliés et j'ai même négocié pour qu'on aille manger au resto ce soir. Tu sais, histoire de fêter mon futur nouveau corps d'athlète. »

Elle lui adresse un sourire. Un sourire d'enfant, ceux candides qu'ils offrent à ceux qu'ils veulent impressionner.

« C'est bien, maintenant tu peux me laisser tranquille, merci. Et au passage, donne-moi des Granola. Ton gâteau de lapin t'es gentille mais ça passe pas. »

Elle reste plantée là. Trop abasourdie pour pouvoir bouger ou même répliquer. Il l'a utilisée. Il l'a utilisée pour calmer le jeu. Il n'a jamais voulu qu'ils refassent équipe comme avant. Elle s'est encore fait des films pour rien. Chacun de ces constats lui fendille tant l'âme que le cœur et elle retient à grande peine ses larmes. Quelle idiote ! Non mais quelle idiote !

Elle se précipite dans sa chambre, après avoir balancé à la tête de son stupide frère son paquet de stupides biscuits à la noix, se pelotonne en boule sur son lit, serrant de toute ses forces son lapin en peluche. Puis, saisie d'une rage froide, elle se met à écrire à son correspondant, laissant sa fierté blessée prendre les commandes.

7 novembre 2022

366 Arroïlabaita bidea, 64500, Urrugne

Monsieur Berckley,

Vous avez eu de la chance de rencontrer la femme de votre vie et d'avoir réussi à la garder. A garder cet amour intact sans avoir à le mettre dans une boîte. Certains l'enferment, le protègent et finalement, il se fait la malle. Il disparaît aussi vite qu'il était venu, sans un bruit. Il n'y a rien pour nous avertir, nous prévenir. Il part, tout simplement. C'est un voleur. Il nous dérobe les joyaux de nos cœurs, les laissant mornes et sans éclat. Il s'en va sans se retourner, de peur de se faire attraper. Car on ne peut le retenir. Il s'enfuit dans la pâle nuit de nos illusions, éclairé seulement des étoiles qui rient de nos déconvenues prochaines. Il peut être fourbe, traître.

Les Lettres De MaëlleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant