Le garçon sous le saule

20: Citrouilles et serpents

Les jours et les semaines avaient défilé à une telle vitesse que Remus eut l'impression d'être arrivé à la fin du mois d'octobre en un battement de cils.

Le vent glacial de l'automne écossais avait rapidement remplacé la douce brise encore chaude de la fin de l'été. Les arbres du parc et de la forêt avaient peu à peu changé de couleur pendant qu'une pluie de feuilles orangées s'échappaient de leurs branches presque dénudées.

Très vite, des odeurs de citrouille, de sucreries et de feuilles mortes s'étaient mises à embaumer les couloirs du château et il n'était pas rare de voir ci et là quelques chauves-souris virevolter au plafond. Les élèves, qui s'étaient habillés plus chaudement que d'habitude, déambulaient dans l'école pendant que Mr Rusard balayait avec hargne les tas de feuillages colorés que le vent rapportait sans arrêt à l'intérieur.

Le festin d'Halloween approchait à grand pas.

C'était cet événement précis que la petite bande avait choisi pour mettre en pratique leur toute première grosse blague de l'année. Pour coller avec le thème du moment, les nouveaux amis de Remus l'avaient alors modestement baptisée « l'Opération de la Grande Farce à la Citrouille ».

Sans surprise, les Serpentards avaient été d'office désignés comme cible principale pour leur projet. Après tout ce fut la révélation de leur salle commune qui avait fait germer l'idée à James et Sirius. Les deux garçons voulaient absolument que leur précieuse découverte soit mise à l'œuvre dans un grand spectacle pour marquer le coup.

Comme toujours, Remus avait voulu rester raisonnable mais il fallait bien avouer qu'il lui était difficile de cacher son excitation. Et puis il pouvait bien laisser passer leur caprice pour cette fois. Les garçons lui avaient promis de rester discret et que personne n'allait être blessé, et ce même si cela leur en coûtait beaucoup.

Plus le jour fatidique approchait, plus le jeune homme se sentait à la fois stressé et impatient de vivre cette nouvelle expérience. Il pouvait rester des heures les yeux ouverts dans son lit à imaginer tous les détails de leur plan, à chercher la moindre faille ou à trouver de nouvelles idées à proposer à ses amis.

Deux jours avant le festin, la petite troupe s'était retrouvée dans le potager du garde-chasse au beau milieu de la nuit, où d'innombrables citrouilles étaient cultivées spécialement pour la fête. Elles étaient si grosses que certaines d'entre elles faisaient la taille des quatre enfants. Ces derniers s'étaient rassemblés en cercle à l'ombre des légumes géants, profitant de cette cachette pour comploter à l'abri des regards.

« - Tu es sûr que c'est le bon symbole ? murmura Peter. Si on le rate, on risque d'avoir de gros problèmes.

- Certain, lui affirma Remus en leur présentant le parchemin froissé qu'il venait de sortir de sa poche. J'ai dû vérifier dans au moins une bonne douzaine de grimoires pour être sûr que les sources soient fiables.

- Tu n'avais pas besoin de te donner autant de mal, rigola James. Ce sort est un véritable jeu d'enfant.

- Le risque zéro n'existe pas, lança simplement le loup-garou. Mémorisez bien le symbole et ne vous trompez pas lorsque vous le tracerez. Nous n'avons pas le droit à l'erreur. »

À ces mots, les garçons se séparèrent, chacun s'occupant de sa citrouille. Remus s'approcha de l'une d'entre elles, sortit sa baguette et y traça le même symbole dessiné sur le parchemin. Sur son passage, la pointe de l'artefact magique laissa une fine ligne dorée, qui s'effaça presque aussitôt dans la chaire de l'énorme courge.