District 6.
Elle qui s'était habituée à un matelas sur le toit, était aujourd'hui là où elle aurait aimé que sa sœur le soit. L'appartement racontait une histoire harmonieuse. Couleurs, tissus et senteurs se complétaient. Au cœur de la chambre, un grand lit à baldaquin surdimensionné était entouré de deux tables de chevet. Sa parure était en soie marron chocolat et ses oreillers, en duvet.
Les murs étaient de couleurs Camel, kaki et beige clair. Les fenêtres panoramiques étaient couvertes de rideaux à motifs géométriques. Assise devant la coiffeuse classique, tout droit sortie de la douche à jets, sur elle, un peignoir en velours beige, Jill se regarda dans le miroir. Ce confort sybaritique était si éloigné de ce que Braham, Zoé, Helen et les autres devaient vivre, qu'elle ne prit aucun plaisir, pas même pendant la douche — nécessaire, car Odet ne tarderait pas.
Quelques minutes plus tard, la porte s'ouvrit d'une main légère. Jill se tourna vers la vingtaine de femmes aux crânes rasés qui entrèrent soudain, tenant chacune deux housses de robes à la main. Elles les accrochèrent à tour de rôle sur deux portants en bois dans le coin, puis les dézippèrent.
Jill contempla avec attention les robes en velours, mousseline, satin, organza, pailletées, en dentelles, transparentes à motifs, en forme de sirène, aux épaules dénudées, à bustiers, à manches longues, et toutes de couleurs différentes. Des robes dont les gabarits semblaient être dessinés par des créatrices de mode.
Des femmes qui savaient ce que les femmes recherchaient et ce que signifiait vraiment le mot élégance. Une fois que cela fut fait, une dernière femme entra, tenant une boîte de velours dans les mains. Elle s'avança et la posa sur le lit, avant qu'elles ne disposent toutes progressivement. Porte fermée. Jill se leva machinalement au son des richelieus qui approchaient.
Odet s'arrêta devant elle, les mains dans les poches de ce costume noir, sur un pull à col roulé prune. Ses yeux affûtés la fixaient, pourtant, ses clignements étaient doux — caressants. Jill déroba son regard. Il eut un sourire en coin, puis s'avança avec cette même démarche hypnotisante vers elle. Yeux clos. Soudain, il glissa une main magnétique sur sa taille, et l'autre, sur ses clavicules, puis sur son cou. Ses yeux plongèrent la tête la première sur les lèvres de Jill.
— Vous sentez-vous gênée par ma présence ? susurra-t-il, presque.
Elle rouvrit les yeux en hâte, puis posa lentement son regard sur lui. Déglutition.
— Non, mentit-elle.
— De la gêne physique, alors, dit-il en s'écartant d'un pas d'elle. Avez-vous bien dormi ?
Jill n'avait fait que des cauchemars. Des cauchemars qui avaient eu lieu dans l'appartement. Tard le soir. Pendant l'affection. Une bagarre entre Helen et Zoé, s'entretuant, en boucle, à chaque fois qu'elle refermait les yeux. Ses souvenirs cauchemardesques marquaient chaque pliure de son visage, ses yeux taraudant le mur derrière lui.
VOUS LISEZ
Rouge sur Noir
Science FictionQui aurait pensé que l'Europe pourrait être frappée par un virus plus meurtrier après une première pandémie ? Loin de l'ignorance mondiale, Braham s'en doutait. Pas de doute, le point de non-retour pour l'humanité se rapproche... Trois ans plus t...