Chapitre 18

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Ryelk est parti chercher quelque chose à manger. Une fois le désir assouvi, la faim nous a assaillis. Je profite de son absence pour me rafraîchir dans la salle de bain. Je prends une petite douche rapide, histoire de rincer mon corps de cet échange.

Mon professeur revient avec des sandwichs. Ils n'ont pas l'air très appétissants, mais c'est tout ce que nous pouvons espérer en milieu d'après-midi. Ryelk s'installe sur le lit, et je décide de m'asseoir tout près de lui.

- Alors, c'est quoi ta couleur préférée ?

- J'aime bien le marron, pourquoi cette question d'un coup ? demande-t-il.

- Pour discuter, on est venu ici pour ça au départ, non ?

Il sourit la bouche pleine.

- Et toi alors, c'est quoi ta couleur préférée ?

- Ça varie en fonction de mon humeur, en ce moment j'aime bien le vert. La couleur des sapins.

- C'est joli, oui. Ton roman préféré ?

- J'ai commencé à lire "L'esseulé", ils ont découvert son carnet où il a écrit tous ces symboles bizarres.

- J'ai adoré ce livre, mais je ne t'en dis pas plus, dit-il en me faisant un clin d'œil.

- Sinon, j'aime bien les romans fantastiques, surtout des mondes où personne n'a d'habileté magique et les personnages doivent utiliser mille et un stratagèmes pour arriver à leur fin. Et toi ?

- Je lis beaucoup de policiers, je devrais tester d'autres genres, mais je n'ai jamais pris le temps de trouver autre chose.

On continue de se poser des questions simples comme ça, mais j'en apprends beaucoup sur lui. En plus d'un diplôme en connexité, il a un certificat en sciences physiques de la magie. Il a été professeur assistant de Mr Heban avant d'avoir sa propre classe. On a aussi quelques points communs, notamment que sa famille est originaire de Pismigérie, ils ont déménagé à Rivsk quand Ryelk était tout petit, mais il lui reste de la famille éloignée là-bas. Il vient du centre du pays, alors que je suis de la côte.

- Iskis, je voulais te demander, dit Ryelk timidement.

Sa voix est basse, presque hésitante. Il a l'air préoccupé, comme s'il y avait quelque chose qui le tracasse depuis un moment. Il chiffonne et déchiffonne frénétiquement l'emballage vide de son sandwich.

- Qu'est-ce qu'il se passe ?

- Et bien, cela fait quelque temps que l'on se voit, dit-il en souriant nerveusement. Je voudrais savoir si tu as l'intention de voir d'autres personnes aussi ?

Sa question me fait rougir immédiatement. Personne ne m'intéresse autant que lui et, pour le moment, je n'imagine pas voir quelqu'un d'autre.

- Non, je préfère voir une personne à la fois, dis-je en souriant aussi. Et toi ?

- Non plus.

Il passe sa main dans ses cheveux.

- C'est sûrement trop tôt pour discuter de cela, mais j'avais envie de savoir si on est sur la même longueur d'onde sur la situation. Avec les risques qu'on prend...

- Je comprends. J'aime beaucoup passer du temps avec toi.

- Moi aussi.

J'approche ma main de son visage, il se tourne vers moi. Je ne suis pas très sûre où j'en suis avec lui, ce que je sais pour l'instant c'est que j'aime sa compagnie. C'est mon professeur, j'y verrais peut-être plus clair à la fin de ce week-end. Je pose un baiser sur ses lèvres douces.

- Il y a encore du soleil, on peut aller se balader si cela te tente, dit Ryelk.

- Pas en loups.

- Non bien sûr ! dit-il en rigolant.

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Le voyage, l'amour, la promenade... tout cela m'a fatigué. Après un dîner léger à l'auberge, concocté par le gérant, nous rentrons dans notre chambre. Je vais réellement passer la nuit avec mon professeur, dormir au chaud dans ses bras. Je me glisse sous l'édredon coloré de tulipes et de jonquilles. Tout est fleuri dans cette auberge, des draps aux rideaux, en passant par les tapis... C'est la seule touche joyeuse de la décoration, le reste pourrait figurer dans un musée. La moitié des objets, qui prennent la poussière d'ailleurs, sont des antiques dont l'utilisation m'est complètement obscure.

- C'est étrange, tu sais, dis-je à Ryelk.

- Qu'est-ce qui est étrange ?

- Il y a quelques mois, tu étais mon prof et maintenant on va s'endormir ensemble dans une auberge au milieu de nulle part.

- C'est seulement maintenant que tu réalises notre problème ? Dit-il avec son sourire charmeur. Cela ne t'a pas sauté aux yeux la première fois que l'on s'est retrouvé nu l'un contre l'autre ?

- Si bien sûr, tu es bête. Mais ça me fait bizarre quand j'y pense.

- Est-ce que tu regrettes ?

- Non ! Je m'exclame sur un ton plus fort que j'aurais voulu. Je ne veux pas que ce week-end se finisse.

- Il nous reste toute la journée de demain, dit Ryelk en se déshabillant.

- C'est vrai et je suis fatiguée, une bonne nuit de sommeil nous fera du bien.

Il s'installe sous les draps à son tour. Il gigote comme pour mieux répartir la couette et se rapproche de moi.

- Viens par-là, dit-il.

Il m'agrippe et vient coller son corps froid contre le mien.

- Tu es glacé ! dis-je en m'écriant.

- Et toi t'es pile à la bonne température.

Rapidement, nous créons une bulle chaude sous l'édredon. Ce moment platonique me fait me sentir encore plus proche de lui. Il est capable d'une grande tendresse, dans ses bras je suis plus calme. Mon nez trouve refuge dans son cou et je m'endors sans penser à nos soucis.

- -

Le retour à l'université est plus long que le voyage d'hier, pourtant nous prenons le même bus et le même train. J'aurais aimé que ce week-end dure plus longtemps, nous n'étions pas à court de sujet de conversation. Ryelk peut être très bavard quand il s'y met et j'aime bien l'écouter. Le ton qu'il prend quand il explique quelque chose est doux et posé, je pourrais l'écouter pendant des heures peu importe le sujet. Il arrive à rendre simple et compréhensible même les sujets les plus compliqués, surtout quand il parle de sciences physiques.

MétamorphesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant