Tout un tas de questions se bousculent dans ma tête sur le chemin du retour. Je n'arrive pas à croire que j'ai été assez stupide pour accepter ce travail alors que je ne sais même pas gérer ma vie. Mon pas est lent, ma démarche beaucoup moins assurée qu'à l'aller, mes pensées s'affolent face à la catastrophe qui s'annonce. Je me suis laissée prendre à mon propre jeu. Accablée, je ne sais pas du tout comment je vais pouvoir me sortir de ce pétrin. Le seul point positif, c'est qu'il me reste deux jours pour me faire à cette idée. Comment vais-je pouvoir gérer trois enfants, les tâches ménagères, les trajets scolaires et surtout, respecter les horaires de l'école ?
Perdue dans mes réflexions, je ne remarque pas le passant face à moi, et n'en prends conscience uniquement lorsqu'il percute mon épaule. D'instinct, je m'excuse, persuadée qu'il en fera de même, après tout, lui non plus n'a pas daigné se pousser pour me laisser passer, mais ce n'est pas le cas. Malheureusement pour lui, mon humeur est telle, qu'il m'est impossible de ne pas réagir, et sans rien contrôler, je me retourne pour m'exclamer d'une voix tendue et agressive :
– Vous pourriez au moins vous excuser !
Une douce chaleur s'empare de mon bas ventre et mon pouls s'accélère en découvrant l'inconnu malpoli.
Vous l'avez deviné, le blaireau dans toute sa splendeur fait son grand retour.
Une fois n'est pas coutume, c'est tout juste s'il se donne la peine de tourner la tête vers moi, indifférent à mon ton exaspéré, néanmoins, hors de question de le laisser encore s'en tirer. Un regain d'énergie me fait oublier toutes les questions accablantes de mon esprit. J'oublie mon désespoir sur la journée catastrophique qui s'annonce lundi, je reprends le contrôle de mon corps et, mâchoire crispée, les poings serrés, j'accélère mon allure d'un pas déterminé ayant pour effet d'augmenter encore d'un cran mon rythme cardiaque.
Le sang cogne dans mes tempes, mais pas suffisamment pour chasser les picotements dans mon ventre ni les paroles de "L'amour est un cadeau" de "La reine des neiges" qui résonnent dans ma tête. Arrivée à son niveau, je l'attrape par l'épaule pour l'obliger à me faire face, bien décidée à lui envoyer toute la rancœur que j'éprouve à son sujet. Mon cœur est à deux doigts de s'échapper de mon corps tant il peine à suivre l'ascenseur émotionnel auquel il est soumis.
– C'est quoi votre problème à la fin ? Vous n'en avez pas marre de jouer le type pédant et insupportable au possible ?
– Je vous demande pardon ?
Ses yeux marron nuancés de bleu trahissent une véritable incompréhension contrastant avec son ton autoritaire qui me donne envie de le gifler... ou l'embrasser, je ne sais plus trop ce que je ressens en ce moment et si je ne me calme pas rapidement, je risque fort de m'évanouir suite à une crise de tachycardie.
– Vous vous fichez de moi ? Votre but dans la vie c'est de me rendre folle, c'est ça ?
Oui, oui, je vous vois venir, j'y suis allée un peu fort et ce n'est pas parce que je sais exactement le nombre de fois où je l'ai croisé, huit, mais je ne vous en veux pas de ne pas tenir les comptes, qu'il est obligé, lui aussi, de se souvenir de moi. Pourtant, il me semble avoir insisté sur le fait que je passe difficilement inaperçue, et j'ai vraiment beaucoup de mal à croire qu'il ne se souvienne pas, au moins, de notre dernière confrontation. Au cas où vous auriez un doute, je parle bel et bien du jour où j'ai perdu mon dernier travail. Malgré tout, et au final sans grande surprise, monsieur joue le parfait innocent d'un ricanement hautain :
– On ne se connaît même pas ! Si vous êtes hystérique ce n'est pas mon problème !
Ses sourcils se froncent sitôt sa phrase terminée, accentuant sa ride du lion, toutes les nuances claires de ses yeux disparaissent pour les rendre aussi sombres qu'un puits sans fond. Je recule d'un pas malgré moi, serre le poing si fort que je sens mes ongles y laisser leurs traces sur mes paumes. L'espace d'une seconde, je repense à ce livre acheté à cause de lui, et dont le récit m'a réellement chamboulée.
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Le papa de l'école
Literatura KobiecaLaissez-moi deviner, vous avez été interpellés par le titre ? À moins que ce ne soit la couverture un brin flashy ? Peut-être même qu'en voyant tous ces post-it, vous êtes déjà en train d'imaginer un papa complètement perdu, essayant de gérer ses en...