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Le vent s'était levé sur Los Angeles et il planait dans les airs comme une odeur de mort et de désespoir.

L'air lui frappait le visage et faisait sécher le sang qui lui tâchait la peau, et dérangeait sa petite mèche blonde qui lui retombait sur le front.

Il avait froid, mais ça, ça faisait bien longtemps que c'était le cas. Il ne se souvenait même plus de la dernière fois qu'il avait pu ressentir la chaleur d'un corps contre le sien, ni même celui d'une main qui le retient ou de bras qui le serrent. Il ne peut pas vraiment dire que ça lui manque, étant donné qu'il n'avait jamais pu en profiter, mais il aurait aimé essayer de ressentir une telle chose avant de mourir, et il était trop tard désormais.

Il ne s'était jamais tenu aussi prêt de la mort, si prêt qu'il pouvait sentir son haleine lui souffler au visage, et pourtant, bien qu'il s'était imaginé cette scène de nombreuses fois, ce n'était pas du tout comme il se l'était inventée. Il n'avait pas peur et encore moins de regrets. Il était prêt et il s'était résolu à ce qu'aujourd'hui soit son dernier jour de vie. Il aurait juste aimé avoir le temps de dire au revoir aux personnes qui avaient encore un peu d'espoir en lui, et s'excuser auprès de celles qui l'avaient perdu.

Il savait que s'il partait maintenant, tout ce qu'il aurait aimé régler ne le serait pas, mais il savait aussi que le meilleur moyen que ce soit le cas, c'est qu'il ne soit plus là à créer de nouveaux problèmes. Alors il n'était pas triste, ni déçu, et ses jambes ne tremblaient même pas. Il tenait encore debout sur le bord de ce mur, la pointe des pieds dans le vide et le regard au loin, et sa main tenait encore ses côtes avec ferveur, tandis que ses chaussures étaient parsemées de petites explosions de gouttes rouges.

Il n'avait pas arrêté de saigner et il savait que ce que le type qui tenait l'arme dans son dos attendait, c'était qu'il se vide de son sang et que son corps vacille et tombe en avant.

Il n'avait jamais pressé la détente auparavant et c'était aujourd'hui que c'était arrivé, et Evan retenait la bile qui lui était remontée dans la gorge à ce moment, essayant de cacher son envie de vomir et la douleur qui lui avait traversé la poitrine quand la balle avait détonné.

Il ne s'était pas encore retourné, mais pouvait sentir les yeux pointés vers lui et l'impatience grandissante de l'homme qui tenait l'arme, prêt à tirer s'il avait la mauvaise idée de tenter quelque chose à nouveau.

Mais Evan n'avait plus la moindre force pour ne serait-ce que se retourner. Sa vue se brouillait au fur et à mesure et la fatigue lui donnait le tournis, et la seule chose qui ne faisait pas tomber en avant, c'était le vent de face, assez puissant pour le maintenir debout.

-C'est quand tu veux Evan, le pressa t-il en avançant à nouveau et une lignée de frissons lui parcoururent la colonne vertébrale quand il sentit le métal du canon au travers sa veste déchirée.

Il ouvrit une dernière fois les yeux, son oeil gauche tressautant, dérangé par l'hématome qui grossissait autour de sa paupière. Il baissa la tête vers le sol et ses yeux se posèrent sur les petites voitures jaunes, noires ou grises qui roulaient dans la rue en dessous, et il priait pour ne pas tomber sur l'une d'entre elles, pas parce que la chute serait douloureuse, il s'en fichait il mourrait avant de toucher le sol probablement. Mais parce qu'il ne voulait pas partir en tuant une jeune femme au volant de sa voiture, ou un bébé dans son siège à l'arrière. Alors il profita du carrefour et du feu qui passa au vert, pour décider que peut-être, c'était le moment.

-Evan, non!


Dix minutes plus tôt...

Il leva la main à son oreille et grimaça quand il vit la couleur rouge du liquide poisseux sur le bout de ses doigts.

Remember Me? (Buddie)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant