Chapitre 11 - Tomas

1K 106 36
                                    

Nous voilà de nouveau sur la route. J'ai eu le temps de faire les achats nécessaires pendant que Javi a terminé l'installation des nouveaux pneus. Le patron du garage a voulu nous faire une remise, ce que Javi a catégoriquement refusé.

- C'était entièrement pour notre convenance personnelle si j'ai mis la main à la pâte alors vous n'avez aucunement besoin de nous faire une remise. Vous avez tenu vos délais et croyez-moi, je connais très bien les exigences du métier. C'est à nous de vous remercier de m'avoir laissé faire. S'il vous plait, c'est important pour moi.

Javi a obtenu gain de cause, payé la somme due et nous sommes remontés en voiture. J'ai insisté pour conduire, espérant que ma concentration sur la route calmerait mon esprit mouvementé. Sauf que c'est raté, Javi occupe toutes mes pensées. Je crois que je suis dans la merde parce que l'attitude détachée que j'ai eu ce matin était du pipeau !D'accord, j'ai couché avec Javi, je suis même l'initiateur de notre rapport. Pourquoi suis-je passé à l'action ? Si vous avez la réponse, donnez-la moi, elle me serait utile. L'alcool ? Réponse trop simple. La douceur du moment ? Non, je ne suis pas aussi facile. Ses yeux ? Même s'ils ont fait pencher la balance, je ne suis pas aussi réducteur. Je ne couche pas juste pour des beaux yeux. Enfin, je crois...

J'essaie de me convaincre que c'est sûrement le mélange de tous ces facteurs qui m'a poussé à agir. Cette explication est la seule possible: quasiment une bouteille de vin dans l'estomac,une belle gueule en face de toi qui te fait les yeux doux,... forcément tu chavires. Et j'ai chaviré...

Bizarrement, je n'ai pas de regrets, j'ai eu la meilleure partie de jambes en l'air de mon existence. Javi a peut-être tout du magnifique apollon, mais il n'y a pas que ça qui soit plaisant. C'est un amant passionné qui offre autant qu'il reçoit. Si quelqu'un m'avait dit un jour que je coucherais avec Javi, je lui aurais ri au nez.

J'ai été agréablement surpris par son attitude lorsqu'il est revenu avec un petit-déjeuner à la main. C'est bête, mais j'étais persuadé qu'il paniquerait dès le lendemain. Lorsque je me suis réveillé seul dans la chambre, convaincu du drame à venir j'ai finalement été soulagé par son discours: « pas de regrets mais pas d'attaches ». Ma crainte a diminué d'un cran.

Maintenant se pose la question en or : Comment je me sens ? Si je veux être honnête avec moi-même, "paumé" est le mot qualifiant mon état d'esprit à cet instant. Je suis quelqu'un qui a besoin de réfléchir, de tourner et retourner une situation cent fois dans sa tête avant de prendre une décision. L'empressement ne me va pas du tout. Sauf qu'aujourd'hui, je dois choisir un chemin, celui qui déterminera la nouvelle direction de ma relation avec Javi.

Les prochaines heures seront fatidiques, plusieurs choix s'offrent à moi :

1- Est-ce que je reste sur ma position de départ, celle de le détester ? Oublier ses excuses, oublier cette nuit passée ensemble et garder le statu quo établi depuis des années.

2- Est-ce que je fais le mec complétement détaché ? Ignorer ses excuses, car je ne les attendais pas, et accepter de dire qu'on a passé un bon moment, sans épiloguer dessus, et s'accorder sur une entente amicale mais sans plus.

3- Est-ce que j'accepte de faire des concessions ? Pardonner, lui affirmer que plus jamais nous ne coucherons ensemble et devenir amis.

4- Est-ce que je remets les compteurs à zéro ? Accepter ses excuses, lui avouer qu'il ne me laisse pas totalement indifférent et espérer le début d'une nouvelle histoire.

Clairement, la première option est impossible, je ne suis pas un enfoiré. Javi s'est excusé et je ne peux pas faire comme si de rien n'était. En même temps, je ne pense pas être capable d'effacer l'ardoise et d'oublier notre passé aussi facilement. Cependant, il a fait un premier pas, c'est assez inespéré, je me dois d'en tenir compte. Il m'a paru vraiment sincère lors de notre discussion de la veille. Je le crois quand il me dit qu'il regrette, je l'ai vu dans son regard. Les yeux ne mentent pas. Seulement, la question qui me turlupine, c'est de savoir s'il n'est pas trop tard. Je me suis construit à partir de ce passé, j'ai peur de m'effondrer en le modifiant. Toute cette situation est complexe, j'ai aussi l'impression que j'ai le devoir de ne pas accepter ses excuses au risque de minimiser les actes du passé et les réduire à un problème mineur. Un peu comme si le crime n'était d'un stupide vol de crayon. J'exagère sûrement, mais c'est mon ressenti, l'abandon va avec le pardon.

Faux départOù les histoires vivent. Découvrez maintenant