Chapitre 7 - Tomas

1K 104 22
                                    

Je me promets, à moi-même, que c'est la dernière fois que je voyage en voiture. Je le savais, c'est trop de risques. La preuve est là. Nous perdons un temps précieux. Nos amis ont besoin de nous. Et à cause d'un certain mécano de pacotille nous voilà coincés pour un pneu crevé. Si ça ce n'est pas un signe du destin qui se fout de nous.

Ce voyage retour commence vraiment à me faire tourner chèvre. J'air du mal à me reconnaître, mes réactions m'inquiètent. D'abord avec ces deux types à la station, Carla a raison en me signalant que ce n'est pas mon habitude de provoquer, et maintenant l'engueulade avec Javi. Avec, en prime, une attitude de gamin capricieux qui fugue. Moi je le dis, ça va mal finir.

En même temps c'est quand même aberrant que Javi n'ait pas pensé à vérifier la roue de secours avant d'entreprendre un voyage de plus de 40 heures aller-retour avec sa voiture et sans compter les déplacements sur place.

Et maintenant Tomas ? C'est bien, tu es parti tout seul dans ton coin, mais c'était quoi ton plan ? Marcher jusqu'à plus pouvoir tenir debout ?

Je n'en sais rien du tout! J'avance sans but.

Je pense à Bertrand. A sa famille qui angoisse probablement à s'imaginer le pire. A Manu; impuissant face à la détresse de son père. Je n'ose même pas imaginer mon état si c'était mon père dans ce lit d'hôpital. Je m'écroulerais, c'est certain.

Mon frère, ma sœur et moi avons d'excellentes relations avec nos parents. Ils sont notre refuge. Ils ont toujours été à notre écoute, prêts à soulever des montagnes pour nous. Ma mère est une oreille attentive, jamais dans le jugement. C'est d'ailleurs à elle que j'ai fait mon coming-out en premier.

- Maman, est-ce que je peux te dire quelque chose ?

Elle m'a regardé perplexe comme si elle savait que ce que j'allais lui demander était important.

- Bien sûr mon chéri, je t'écoute.

- Est-ce que si les autres nous traitent de quelque chose nous le devenons ?

Elle s'est arrêtée net dans sa tâche et son regard s'est ancré dans le mien. A ce moment-là j'ai su que j'étais en sécurité.

- Parce que les autres ils me traitent d'homosexuel, j'enchaine, et euh... peut-être qu'ils m'ont transformé.

- Qu'ils t'ont transformé ?

J'ai baissé les yeux, un peu honteux. C'était stupide. Ma mère m'a soulevé le menton et m'a souri, bienveillante.

- Tomas, est-ce que tu essaies de me dire que tu es homosexuel ?

- Je crois...oui.

Elle a doucement ri et m'a serré dans ses bras. La pression que je m'étais infligée avait redescendue d'un coup. Malgré moi, des larmes ont coulé sur mon visage.

- Oh mon chéri, m'a-t-elle dit émue, il ne faut pas te mettre dans un état pareil. Tu n'as rien fait de mal.

Nous sommes restés quelques minutes dans cette étreinte chaleureuse avant qu'elle ne m'éloigne pour me regarder une nouvelle fois.

- Tomas, tu as le droit d'aimer qui tu veux. Et si c'est les garçons, et bien... c'est comme ça. Ton père et moi, nous t'aimons quoi qu'il arrive. Tu le sais ?

J'ai hoché la tête et essuyé les larmes avec ma manche. Elle m'a de nouveau enlacé.

- Tu sais ce que nous allons faire, nous allons nous réunir avec la famille après le dîner et nous allons en parler, tous ensemble. D'accord ?

Faux départOù les histoires vivent. Découvrez maintenant