ÉPISODE 2

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MARDI, 9 : 00, campus

À 9 heures du matin, je suis déjà devant les grilles du campus. Relativement, j'suis en avance. Mon cours est dans quinze minutes, j'aurais bien pu profiter de ces quinze minutes pour dormir, non ? J'suis trop con. Vu que j'ai zéro pote dans cette fac, je vois pas avec qui je pourrais m'poser pour discuter.

Mon sac sur le dos, je tire sur les bandoulières en soupirant. Dehors, sur les trottoirs bordés d'arbres aux feuilles jaunâtres, des dizaines et des dizaines de fumeurs crachent une fumée dans l'air. Faut savoir que dans cette fac de droit, bah ça fume en quantité énorme. C'est dingue, vraiment.

A l'intérieur du campus, certains étudiants se dirigent vers les bâtiments et moi bah je suis là, à réfléchir à ce que je pourrais bien faire pour que le temps passe rapidement. Franchement. C'est nul à chier de connaître personne, vraiment personne. Y a aucun individu qui était avec moi à l'école, même. C'est grave un monde nouveau l'université, t'es là, t'es paumé et t'as aucun repère. Force à moi.

Avec paresse, je monte les marches de l'escalier qui mène à l'amphi où j'ai un cours de euh... comment s'appelle cette manière déjà ? Ah ouais. Droit constitutionnel. Allez comprendre.

L'amphithéâtre est plein. Il est plein, mais j'arrive quand même à trouver une place vide près de la fenêtre pour m'installer tout seul. Je devrais peut-être m'incruster dans un groupe, y en a pas mal qui discute ; ou alors aborder une personne genre, n'importe laquelle. Mais non vas-y. Dans cette fac, on voit de tout, on peut pas savoir qui est abordable et qui l'est pas.

Peu à peu, la grande salle se remplit d'étudiants. Des chaises grincent, des rires résonnent, des paroles montent. Moi, j'suis toujours là, tête baissée vers mon téléphone. Avec cette posture et la gueule que j'tire, personne va venir m'parler t'façon. J'dois avoir l'air d'un boloss. Sérieux c'est chiant de se sentir seul la première semaine après la rentrée.

Mais cette solitude, elle dure pas tant que ça. Puisqu'une meuf s'approche doucement vers ma rangée. J'vois qu'elle hésite, mais au final elle se poste près de moi.

— Hey... désolée... j'peux m'assoir ici ? ou y a quelqu'un ? elle me demande, de sa voix douce et timide.

Je lève mes yeux et je hoche la tête avec précipitation. Elle peut ouais, après tout.

— Kai !! Viens on s'pose là ! Y a deux places vides, s'exclame-t-elle, s'adressant sûrement à son pote ou je sais pas qui en fait.

— Oh cool, ok.

Du coup, la fille s'installe près de moi et son pote près d'elle à l'extrême droite. Je sors mon ordinateur et frotte l'écran avec la manche de son sweat bleu, dégageant une tache de poussière. Je l'allume en appuyant sur le bouton et avance ma chaise en avant, voyant que la prof vient d'arriver.

J'suis pas une personne très impliquée dans les études. Au lycée, bof, j'avais des résultats moyens. Pas de quoi en être fier en tout cas.

— C'est quoi le mot qu'il a dit ? J'peux voir l'écran ?

La voix de la fille à mes côtés me surprend. J'avais un peu oublié sa présence. D'un mouvement précipité, je m'éloigne et tourne l'écran vers elle pour qu'elle puisse voir ce qu'elle veut. Ses yeux verts scrutent le document Word où des mots tapés à la va-vite sont soulignés en rouge.

— Merci... d'ailleurs, c'est quoi ton nom ? elle me demande avec sympathie, en écrivant sur une feuille blanche quelques mots au bic noir.

— Étienne. Toi ?

— Adélaïde. Mais tu peux m'appeler Adel. C'est plus simple j'trouve, rigole-t-elle, ses joues devenant légèrement rouges.

Je souris et hoche la tête. Ouais j'avoue Adel c'est plus simple. Genre. Adélaïde, c'est trop long. Je peux pas m'empêcher d'appuyer mon regard sur cette meuf. Son piercing au nez, ses cheveux bruns allant dans tous les sens et ses grandes dents quand elle m'lance un sourire.

ÉTIENNE, & kaïOù les histoires vivent. Découvrez maintenant