Music is what feelings sound like

"I do my best, but everything seems ominous"(Animals, Architects)

Matsukawa voit Hanamaki partir du coin de l'œil. Il ne peut répondre au geste de sa main, il n'en a pas le droit, mais ça lui fait plaisir. En quelques heures seulement, malgré les attaques, il s'est vite rapproché du châtain. Il faut dire que trouver avec un humour aussi limite que le sien, et ce n'est pas toujours évident. Il a aussi hâte de pouvoir jouer ce soir, peut-être avec lui s'ils ont des morceaux en commun. Il va falloir qu'ils s'entraînent ensemble les après-midis ou les matins dans les semaines à venir. Mais cette perspective le rend heureux, et de toute façon, il ne s'inquiète pas : il a bien remarqué pendant la jam session qu'ils étaient connectés musicalement, et que ça allait le faire. Même quand il faisait l'idiot sur son piano, le contrebassiste arrivait à suivre, l'entraînant également dans une autre spirale musicale. Vraiment, il s'était éclaté la veille, même si la fatigue commence à se faire sentir.

Il est seulement 13h30, il doit encore jouer une demi-heure avant de retrouver Oikawa pour les répétitions du concert dans deux semaines, puis de revenir ici. Ça le déprime un peu d'y penser. Il en a marre de ce poste dans cet hôtel de bourges incultes et coincés. Il a envie de s'amuser, mais il ne peut pas. Heureusement, les concerts avec le grand Oikawa étaient bien plus drôles, puisqu'il avait l'excuse de suivre l'autre musicien, même si c'était lui qui avait composé les arrangements.

Et il espère tenir ce soir aussi malgré sa nuit blanche : même si Iwaizumi est son ami, il n'aime pas lui faire faux bond à cause de la fatigue. Après tout, la majorité des habitués du bar venait pour l'ambiance musicale, c'est-à-dire principalement son art. Puis il semblerait que Tendô passe aujourd'hui, ça peut être marrant. Il risque de s'entendre avec Hanamaki, et ça va être le bazar, au grand désespoir d'Oikawa qui a du mal avec Ushijima et son ami.

Il voit sur la montre qu'il installe toujours sur le pupitre du majestueux piano à queue qu'il est enfin 14 heures. Il termine son morceau, avant de saluer les derniers clients présents. Il se fait appeler par quelques généreux donateurs, lui permettant d'arrondir ses fins de mois difficiles, les sommes allant du simple au double. Il se dirige vers les vestiaires en saluant quelques employés, enlève sa veste, son veston, sa chemise et sa cravate pour les laisser dans son casier, pour ne pas les abîmer et les froisser dans son sac pour ce soir. Il enfile son t-shirt noir, prend son sac et se dirige enfin vers le bar, en espérant qu'Oikawa soit réveillé et présent à son arrivée. Il lui envoie un message, ainsi qu'à Iwaizumi, espérant limiter la casse.

Devant le bar, il remarque de la lumière : déjà, Iwaizumi est là. En entrant, il voit Oikawa la tête posée sur le bar, marmonnant à moitié devant son cappuccino, pendant que son compagnon est en train de sortir tous les papiers pour Hanamaki et son dossier de comptabilité, écoutant le violoniste d'une oreille distraite - Matsukawa est même persuadé qu'il l'ignore totalement. Il faut dire qu'il a l'habitude : Oikawa aime traîner jusque tard au bar, mais n'assume jamais le lendemain, même si ce n'est pas un gros dormeur. Iwaizumi salue son ami, tandis qu'Oikawa remue juste la main. Matsukawa soupire.

- Tiens, en buvant ton cappuccino, tu peux regarder les partitions des titres que j'ai arrangées pour piano-violon ? Je suis pas totalement convaincu pour un passage de ce titre de Ludovico Einaudi.

- Mmmh, tu m'en demandes beaucoup dès le matin.

- Il est 14h30, j'ai pas dormi non plus sauf que je bossais ce midi.

- Ooooh, t'as pas dormi avec le petit Maki ?, réagit immédiatement le châtain, comme si sa fatigue s'était évaporée en pensant à la possible vie sexuelle de son ami.

- Vire ce sourire, on a juste discuté.

- Oh, c'est nul, bougonne Oikawa avant de regarder les partitions.