Music is what feelings sound like

"Chip at your heart, We just fight for freedom" (BLUE ENCOUNT - Freedom)

Il est 18h30 quand il part enfin de chez lui, les écouteurs dans les oreilles avec du Blue Encount, profitant de l'air frais. Il n'est toujours pas de bonne humeur, et vérifie la localisation de son compagnon sur son application de suivi des vols même si c'est inutile. Mais il doit s'occuper l'esprit, et il est persuadé qu'être au bar lui fera du bien, même s'il est fermé jusqu'au surlendemain. En ce dimanche soir d'hiver, il n'y a personne dans les rues, et ça arrange le jeune homme. Le vent frisquet fait rougir ses joues, et il finit par relever son écharpe pour y cacher son nez. Il n'est pas frileux, mais à cet instant, il a hâte de se réchauffer auprès du chauffage électrique d'appoint qu'il allume toujours quand il reste seul au bar.

Quand il s'y retrouve avec lui-même et ses pensées, cet endroit est un véritable refuge. Le bar a été un sujet de dispute avec Oikawa au début, lui qui aurait voulu quelque chose de bien plus visible, tant pis pour le budget. Mais Iwaizumi a toujours préféré les ambiances intimistes où chacun se sentirait comme chez lui. Il a fini par gagner contre son compagnon lorsqu'il ont visité ce local, qui n'était qu'un magasin quelconque à l'époque. Les travaux ont duré des mois, et il les avait réalisés pour la majorité lui-même (sauf l'électricité et la plomberie, il n'était pas suicidaire non plus), en même temps que sa rééducation, pendant les absences d'Oikawa, et avec l'aide de Matsukawa qu'il venait de récupérer alors qu'il hésitait à arrêter le piano après son abandon forcé du conservatoire. Ushijima les avait rejoint à cette période aussi, à la grande surprise des deux hommes, qui ne s'entendaient pas spécialement avec lui à l'époque. Et maintenant, ils sont un pilier de la vie de nuit du quartier, et même de la ville pour toute cette partie de la société discriminée. Et Iwaizumi en est fier : il gagne bien sa vie, travaille avec des amis, est un lieu refuge pour des personnes de tous les âges, et il continue d'avancer, malgré la disparition de ses rêves à ses 21 ans après sa blessure.

Mais être un pilier de la communauté, c'est aussi être la cible d'idiots. Et alors qu'il essayait de réfléchir aux bons côtés de sa vie depuis son achat il y a 4 ans, il fait face à un spectacle auquel il n'arrive pas à se faire. C'est loin d'être la première fois pourtant : la première année, ça arrivait une fois par mois, même plus, il ne sait même plus. Mais là, voir à nouveau son bar tagué de propos homophobes, avec les noms et prénoms de ses employés, et de quelques-uns de ses amis et clients écrits, sa lanterne cassée et son affichage détruit, lui brise le cœur. Il ne prend même pas la peine de lire les propos insultants et les menaces de mort, il a l'habitude, depuis le temps, l'originalité est toujours absente. Par contre, il vérifie la liste de noms : il sait que certains de ses habitués n'ont jamais fait leur coming-out, ou juste assumé leur sexualité, et ça pourrait les détruire. Par chance, ce n'est que la liste de personnes qui s'assument. Ça amuse le gérant de bar d'ailleurs : ces crétins pensaient vraiment gêner ces personnes... Le seul problème dans l'immédiat, c'est que le nom de Sawamura est inscrit : il se demande s'il va pouvoir déposer sa plainte avec lui s'il est concerné. Ils voient aussi écrits tous les noms de ses employés, même Ushijima alors que personne ne connaît vraiment son orientation.

Il sort enfin de sa contemplation quand il entend des voisins murmurer dans son dos. Il se retourne, le regard noir, faisant fuir les comères. Mais il croit percevoir un "bien fait" qui le rend fou. Il prend son téléphone, et appelle son ami le plus proche. Il tombe sur Hanamaki.

- Désolé Iwa, Issei est à la douche.

- J'appelle à un mauvais moment peut-être.

- Bah non, on a fini c'est bon, puisqu'il se lave.

- Je me passerai des détails.

- Ça va Iwa, t'as une drôle de voix ?

- Nan, ça va pas. Tu peux dire à Matsukawa de me rappeler quand il sort de la douche ?