Chermane : un nouveau départ

Chapitre 29

- Ça me fait plaisir que te revoir Ashley. C'est pervers de dire ça vu que ton retour vaut la venue de tes problèmes d'anxiétés, me salue ma psy.

Retour à la case départ. Ça fait depuis hier soir que je suis rentré et je n'en peux déjà plus d'être ici. Je veux retourner à Chermane. Je ne pensais pas autant m'attacher à un endroit, surtout pas à un qui soit tellement loin de chez moi.

- Bonjour, soufflais-je en montrant ma mauvaise humeur.

- Comment vas-tu ?

Elle commence toujours ses consultations avec cette question. Comment vas-tu ? J'ai le choix entre lui mentir et lui dire la vérité mais elle sait très bien que ça ne va pas, ça servirais à rien que je mente.

- Bien, j'allais très bien avant qu'on ne me rapatrie ici.

- Je te parle de maintenant, du moment présent. Je le vois bien que tu es de mauvaise humeur.

- Vous avez raison. Tout allait bien avant que je ne revienne en Belgique. Vraiment ma vie était cool.

- Ta vie là-bas n'est pas finie tu sais. Ce n'est pas parce que tu es revenue ici que ça veut dire que tu as fait une allée sans retour. C'est ma décision et celle de tes parents de choisir si tu es apte de repartir à Chermane.

Elle marque une pause en me regardant dans les yeux en espérant voir une réaction venant de moi. Je ne laisse rien paraître.

- Sens-tu une évolution dans ton anxiété depuis la dernière fois que nous nous sommes vus ?

- Mes crises sont moins fortes. Pour être courte, je n'ai pas le temps de penser à ça, à part le soir quand je suis seule. J'ai fait des choses que je trouvais impossibles à faire comme prendre l'avion, quitter ma maison et mes parents, mes routines, faire connaissance avec des inconnus, et encore je n'ai pas fini.

- C'est formidable Ashley, je suis très contente pour toi. Tu sais très bien que l'anxiété est comme une balançoire : tu vas de l'avant pour revenir en arrière, fournir des efforts pour revenir dans tes retranchements et perdre ses efforts là. Quand cela arrive, plus rien n'a de sens et on baisse les bras pour ensuite ne plus faire d'efforts.

Je baisse la tête et joue avec ma bague sur mon annulaire droit. Ce qu'elle dit est tellement vrai.

- Je pense que j'ai tellement été poussé dans mes retranchements que je sais la sensation et à quel point c'est désagréable et horrifiant. Je ne veux plus revivre ça.

Je termine et je sens mes larmes qui ne demandent qu'à sortir pour me laisser aller et enfin me défouler.

- Je sais, je sais. On a travaillé là-dessus et c'est bien que tu puisses t'en souvenir et te battre pour ne plus être aussi bas.

C'est bon, je ne sais pas me retenir plus longtemps et je laisse mes larmes couler. Je peux enfin extérioriser les poids qui pèses sur mes épaules, la tristesse et la colère que je ressens en moi. Chaque goute qui coule sur mon visage m'aide à me libérer de mes pensées et de tout ce que je ressens au plus profond de moi-même.

- Ashley, je pense que ta..., enfin je veux dire, tes crises que tu as eues dans cet internat viennent surement d'un problème plus profond. Qui se cache en toi et peut-être que tu ne t'en rends même pas compte. Est-ce qu'il y a quelque chose qui te tracasse ?

- Je ne sais pas. J'ai eu une dispute avec un garçon qui m'a dit m'aimer et mon frère est « porté disparu » et je dois tout garder pour moi-même.

Ma vie est top en ce moment. Je rigole bien sûr, elle est nul, vraiment nul. Mais d'un point de vue extérieur seulement. Quand je suis occupé avec mes amis tout va bien mais dès que je suis seule avec mes pensées tous mes problèmes me reviennent et je me sens dépassée.

- Parle-moi un peu plus de l'histoire de ton frère. Qu'est-ce qu'il se passe ou qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- C'est une très bonne question. Moi-même je n'ai pas la réponse. Pour la faire courte. J'étais contente quand je me suis posé à Chermane et j'avais vraiment très envie de revoir Joey pour enfin passer du temps avec lui, je l'ai cherché mais je ne l'ai pas trouvé. Plus tard, j'ai fait connaissance avec un groupe de personnes et ils se sont révélés être des amis de mon frère. J'étais contente car ils pouvaient m'aider à le retrouver mais un seul garçon a pu être en contact avec mon frère mais je me suis disputé avec lui et il ne veut plus me parler.

- Je vois, c'est complexe comme situation. Ce garçon ne t'a rien dit au sujet de ton frère ?

- Les seules choses que je sais c'est qu'il est parti avec sa petite amie et qu'il veut qu'on l'oublie mais je suis sa sœur. Il peut duper les parents mais moi je sais trop de choses lui concernant pour baisser les bras.

Je marque une pause, inspire profondément pour enfin lui dire le fond de mes pensées.

- Il m'obsède. Joey m'obsède. Je rêve de lui pratiquement toutes les nuits. J'essaye de trouver des informations lui concernant, je lui envoie des messages tous les jours mais il ne me répond pas. Je veux le revoir, j'ai... j'ai besoin de le revoir.

Je m'effondre en larme. Ma psy me laisse pleurer et m'aide à retrouver mon rythme de respiration qui s'était accéléré. Je me mouche et finis par boire une grosse gorgé d'eau. Elle me regarde dans les yeux pour juger si je suis apte à continuer la discussion tout de suite.

- Ashley, je pense que tu devrais parler de toute ta situation avec Joey à tes parents.

- Je le sais et je ressens que j'en ai besoin mais l'envie de ne pas créer de problème envers mon frère me bloque. Je le lui ai promis. Je lui ai promis de ne pas en parler.

Si mes parents s'inquiétaient de Joey, peut-être, que je pourrais vivre sans que mes parents s'inquiètent de moi et je pourrais retourner à Chermane. Je peux utiliser l'argument de James. Si je dis à mes parents que James peut me parler de lui, qu'il peut me donner des indices, alors on aura réglé le problème et je pourrais enlever le poids du secret de Joey et mon stress s'envolera comme par magie.

- Tu ne trouves pas que ta santé est plus importante que la promesse de ton frère ?

J'acquiesce et ravale mes larmes.

- Je vais en parler à mes parents.

Je vois un petit sourire naitre sur son visage.

- Parfait ! Parle-moi un peu de ce qu'il s'est passé la dernière fois que tu as fait une crise d'angoisse. On va trouver des choses pour t'aider si une crise te revient.

La consultation continue et je me sens plus libre. J'ai enfin pu extérioriser mes pensées et mes émotions et je me sens plus qu'apte à retourner à Chermane.

...

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