1. Le cœur à la fête

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Assise au bar, je regarde les gens danser. Je n'ai aucune envie de m'amuser ni d'être ici mais c'est l'anniversaire de Marcus. Et ça ferait de moi la pire des amies d'enfance si je n'étais pas présente.
Depuis deux mois, je suis célibataire, et évidemment ce n'est pas ma décision. J'ai vingt-deux ans et c'était ma première copine. On s'est rencontré en soirée, des amis en commun... Encore un problème d'ailleurs ! Tout le monde doit s'organiser pour qu'on ne se voit pas. Je ne déteste pas Julina mais je ne supporte pas de la voir. Ça me rappelle à quel point je suis mal depuis qu'elle m'a quitté. Je l'ai retrouvé en train de flirter avec une fille alors que nous étions en froid. Plus qu'en froid, je savais que c'était la fin et je n'ai rien fait, je l'ai laissé partir. Tout était si compliqué.
Mes parents totalement contre l'homosexualité, (non par conviction mais parce que je cite "c'est contre naturanh"), et elle qui s'assumait tellement. Dans la famille de Julina ce n'est pas simple non plus, mais elle savait ce qu'elle voulait en amour et dans la vie. A vingt-cinq ans elle est déjà auto entrepreneur et organisatrice d'événement, très douée dans son domaine, mariage, anniversaire, enterrement vie de jeunes filles. Rien ne lui résiste.
Pourtant la communication n'a jamais été simple entre nous. Au contraire, on se disputait souvent et pour être honnête, elle ne m'écoutait pas. Elle partait du principe que j'étais en tord parce que je n'assumais pas. Elle ne se trompait pas complètement, mais justifier tout nos maux par « C'est ta faute Naëlle » c'est un peu facile.
Je suis bousculée par Delphine qui me sort de mes pensées.

« Meufe, qu'est ce que tu fous seule au bar ?
-Euh, je bois.
-Oui... J'ai remarqué, peut-être trop d'ailleurs hein. Allez pose ce verre. Me dit-elle gentiment.
-J'vais rentrer Delph, je peux plus être là. J'arrive pas à respirer. Je savais que je n'étais pas prête pour voir Julina.
-C'est l'anniversaire de Marcus on ne pouvait pas choisir une de vous tu comprends ?
-Je n'en veux à personne. C'est juste dur pour moi de la voir danser et vivre comme ci de rien n'était, alors que je peine à la regarder.
-Tu devrais te lever de cette chaise, ralentir sur la boisson par la même occasion, et te lever pour danser avec nous. Allez fais-le pour moi, j'ai pas envie de te voir dans cet état. »

Je me lève, et nos regards se croisent. Julina est tellement belle, je la fixe et continue d'avancer. Soudain je sens mon corps basculer. Je viens de percuter quelqu'un .
« Naëlle ça va ?
-Excuse-moi Soan je ne t'avais pas vu.
-Ouais, j'ai pas fait attention non plus, désolé ! Tu regardais Julina je me trompe ?
-Non t'as raison, et je viens sûrement de me ridiculiser. J'aurais du rester à ma place.
-Dis pas n'importe quoi. Ça arrive à tout le monde de tomber. Allez viens, on va danser. »

Soan est un ami de Julina ils se connaissent depuis toujours, quand elle est arrivée de Martinique il a été son voisin et entre eux ça a tout de suite matché.

J'essaie tant bien que mal de me lâcher et de danser avec Soan mais mon regard ne se détache pas d'elle. Je la regarde me sourire mais je n'ose pas approcher. Depuis deux mois je ne lui ai pas adressé un mot. Elle s'avance vers nous, et je sens mon cœur louper un battement. Mes mains se font tremblantes et je manque de souffle.
« Salut vous deux. Soan je peux te l'emprunter ?
-Bien sûr on avait fini toute façon, à toutes les meufes ! »
Soan s'éloigne, me laissant seule avec Julina. Nous nous dirigeons vers un endroit plus calme. Le silence règne. Aucun mot ne veut sortir de ma bouche, pourtant je voudrais lui crier les choses que je n'ai jamais osé dire.

« Je sais pas par où commencer Naëlle, ça fait un peu prise d'otage, si tu veux partir, tu peux, enfin tu es libre.
-Non, non. Vraiment, merci d'avoir fait le premier pas. Dis-je en baissant les yeux. Julina pose trois doigts sous mon menton pour relever ma tête.
-Naëlle, en deux mois t'as pas voulu qu'on se parle ou qu'on se voit. Et j'avais besoin qu'on ai une conversation. On s'est quitté en très mauvais termes et je ne supporte pas la situation. On a été ensemble presque deux ans. T'as vécu avec moi même si c'était que trois mois. Je pense qu'on mérite au moins une conversation. »
Pendant son monologue mes yeux n'ont pas quittés ses lèvres. Je meurs d'envie de l'embrasser. Ses paroles m'ont fait du bien, mais si nous parlons, ça deviendrait réel. Tout prendrait fin.

« D'accord, si j'ai pas voulu parler c'est parce qu'affronter la réalité n'a jamais été mon fort.
-Attends si tu veux on pourrait rentrer ensemble à la fin de la fête ? On prendrait le temps qu'il faut pour discuter. Je veux faire les choses bien si il n'est pas trop tard. »
Ça voudrait dire aller chez elle, mon ancien cocon. Est-ce une bonne idée ? Je n'ai pas le temps de pousser ma réflexion que j'entends la foule crier le nom de Marcus ! C'est l'heure de souffler les bougies.

La vie est une fête.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant