IX

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Pdv : Finn


Le cœur battant, je toquais contre le panneau de bois qui, je le savais, me séparait de mon amant et uniquement de mon amant. Quelques heures auparavant, j'avais assisté au départ de Jeremiah et de mon frère pour Londres avant de préparer mes affaires en vitesse afin les y rejoindre le lendemain et de me hâter chez Isaiah. Ma poitrine était légère et je respirais calmement, défait de la crainte de me trouver à nouveau en la présence de celui qui avait percé à jour notre plus lourd secret : le père de mon amant. Je ne me préoccupais nullement de la possibilité qu'il aurait de tout révéler à Tommy pendant leur voyage mais uniquement aux futurs moments de tranquillités que j'allais pouvoir vivre aux côtés de celui que j'aimais.

La porte s'entrouvrit après de longs instants et je me glissais à l'intérieur, impatient. Dans la pénombre de la maison je parvins à distinguer, refermant la porte, mon Isaiah, le torse nu, une serviette enroulée maladroitement autour de la taille et une expression de joie sur le visage. Devant cette situation des plus inattendue, je ne pus m'empêcher de rire, quelque peu à ses dépens, déposant tout de même un rapide baiser sur ces lèvres.

- Quoi ? Grogna-t-il sans cesser de sourire, tu es venu tôt !

- Ho, je suis désolé, je peux toujours repartir ! Répondis-je ironiquement.

- Maintenant que tu es là, je compte bien en profiter...

Son regard était empli de sous-entendus tandis qu'il s'avançait au plus proche de moi, posant ses mains sur ma taille et entreprenant d'embrasser le haut de mon cou. Ses lèvres frôlaient ma mâchoire mais, bien que mon envie de le laisser continuer et aller plus loin était des plus féroces, je me dégageai rapidement et lui ordonnais de partir s'habiller d'une manière plus convenable, précisant que je n'étais pas venu pour cela. Qu'il m'enlève mes vêtements et me conduise dans sa chambre si tôt dans la soirée ne faisait pas partie de mes plans ! Bien que maugréant quelques mots, il partit finir de se préparer, me laissant seul dans l'entrée de la maison de son père. Quelque chose était différent ce jour-là. J'étais incapable de poser des mots exacts sur mes ressentis, mais j'avais le sentiment qu'Isaiah me cachait un je-ne-sais-quoi qui semblait pourtant le tracasser.

N'y prêtant pas plus attention, j'entrepris de fureter dans la pièce, attendant le retour de mon amant, et m'arrêtais devant la seule photographie qui décorait le mûr. Je n'y avais jamais réellement prêté attention auparavant mais savais parfaitement ce qu'elle représentait. Isaiah se trouvait au centre de l'image aux côtés de son père, une médaille pendue autour de son cou, souriant fièrement en direction de l'appareil. Je ne pus me retenir de sourire en voyant cette expression sur le visage de l'adolescent qu'avait été mon amant. Le temps avait rendu mes souvenirs flous mais je savais que cette photographie était probablement l'unique témoin de ce moment où j'avais compris. Compris que je ne ressentirai jamais pour Isaiah ce que tout homme ressent pour ses simples amis.

Et, en regardant avec plus d'attention, je l'aperçus. Un garçon se tenait en arrière-plan, dans l'ombre de l'image. Un garçon frêle, le teint pâle et la tête basse. Un garçon qui avait perdu le combat de boxe ce jour-là et qui savait qu'il s'apprêtait à se faire disputer et à entendre une nouvelle fois qu'il menaçait l'honneur de sa famille. Un garçon que j'avais été, sept ans auparavant.

Sachant que si je ne me forçais pas à me déplacer je serais capable de rester à cet endroit exact pour le restant de la soirée, je décidai de continuer mon exploration de la pièce et fis le tour du salon sans y trouver d'élément retenant mon attention avant que mon regard ne se pose sur un journal aux pages froissées qui semblait avoir été jeté et abandonné sur un meuble. Sur la page à laquelle il était ouvert se trouvait un article certainement publié par les forces de l'ordre, dressant un rapport des arrestations les plus importantes des jours passés. Je n'avais alors jamais vu un article comme celui-ci et un frisson me parcourut à l'idée que chacun puisse avoir accès aux identités de ceux qui avaient le malheur de se retrouver incarcérés. La curiosité était tout de même trop puissante et je finis par lire le rapport. Les profils étaient variés, allant du voleur de poissons au prostitué homosexuel, mais tous étaient décrit comme ennemis et troubles au bon fonctionnement de la société.

FisaiahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant