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P.d.v : Finn

Le journée s'écoulait lentement au rythme du tic-tac incessant de l'horloge pendue au mur décrépis et à la constante mélodie de la pluie sur les vieilles fenêtres vitrées de l'appartement vétuste que j'occupais depuis de trop nombreuses années. Je n'avais mieux à faire que de contempler encore et encore cette eau qui tombait inlassablement depuis des jours sur la ville. Depuis qu'Isaiah était parti avec Thomas à Londres pour leurs affaires, le ciel avait semblé vouloir amplifier ma tristesse en déversant ses déboires sur Birmingham. J'enfouis ma tête dans mon oreiller dans un profond soupir de désarroi.

Un mois sans le voir et je n'étais déjà plus que tristesse et mélancolie, vivant reclus, refusant les visites de ma sœur et fuyant Tommy. Je savais qu'être autant attaché à Isaiah ne serai pas sans conséquences, mais il était le seul à qui j'osais encore faire confiance et en compagnie de qui j'étais capable d'être autre chose qu'une pâle copie fade et morne de moi-même. Cet homme avait changé ma vie et, bien que je n'oserai jamais le lui avouer, l'avait sauvé. Contrairement à toutes les personnes dont je parvenais à me souvenir, Isaiah était le seul qui m'écoutait sans me juger, croyait en moi, en mes rêves et me faisait vivre dans autre chose qu'une peur constante. Le seul qui était présent pour moi depuis le début et qui, je le savais, le serait aussi longtemps qu'il le pourrait. Le seul qui me comprenait et n'essayerai jamais de changer celui que j'étais, le seul qui, en dépit de ses propres difficultés, me ferait toujours passer en premier et le seul qui sourira toujours en me voyant. Isaiah était la seule personne au monde qui me faisait me sentir aimé et la seule que j'aimerai jamais d'un amour si pur et si sincère.

De forts coups frappés résonnèrent contre ma porte et je me surpris à espérer me retrouver face à mon amant une seconde fois en ouvrant le battant de bois et sentis passer sur mon visage une brève expression de déception lorsque je découvris le postier, me tendant un télégramme d'un air renfrogné. Je remerciai l'homme aussi chaleureusement qu'il me fut possible de l'être et saisis l'enveloppe du bout des doigts. J'ignorais qui me faisait parvenir ce message, mais je redoutais le pire ; aucun membre de ma famille ne prenait jamais la peine de me contacter de cette façon, préférant sans doute passer chez moi à l'improviste.

Je sortis lentement le papier et le lu avec attention :

De retour en avance. Passe chez moi ce soir. I

- Isaiah... Murmurai-je dans un soupir.

Il était enfin de retour ! Je ne pus réprimer le sourire quelque peu niai qui s'était installé sur mon visage tandis que je fixais ces mots dont mon regard semblait dans l'impossibilité de se détacher.

N'ayant rien de prévu pour l'après-midi, je passais le restant de la journée à attendre, dans une impatience grandissant à chaque instant, le coucher du soleil. Je tentais vainement de me plonger dans la lecture, mais même les fascinantes aventures du comte Dracula ne parvinrent pas à détourner mes pensées d'Isaiah et à faire taire l'excitation engendrée par l'annonce de son retour.

Enfin, après d'interminables moments passés dans la plus douloureuse des attentes, dix-neuf heures sonna au clocher de Small Heath. J'enfilais une veste du plus rapidement que je le pus et sortis, claquant la porte derrière moi, n'ayant jamais été aussi impatient de quitter mon habitation. Je savais qu'il m'attendait et cette simple certitude engendrait en moi la sensation d'allégresse la plus extrême qu'un homme puisse connaitre.

Lorsque j'arrivai aux abords de la maison de mon amant, je ne pus m'empêcher de me retourner et de regarder tout autour de moi, vérifiant pour la troisième fois si Jeremiah ne s'apprêtait pas à rentrer chez lui ou si ce retour prématuré n'était pas une ruse de mon frère pour contrôler une fois de plus tous mes faits et gestes.

FisaiahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant