Je vis. Deux mots si simples et qui sont si lourds de sens pour moi aujourd'hui.
Nous avons affronté cette ultime épreuve assez différemment tous les deux. Théo n'a probablement pas gambergé autant que moi, tout occupé qu'il était à garder les communications actives avec les secours. Il a subi sa condition à demi gelé sans faillir, sans réaliser... De mon côté, j'ai passé de nombreuses heures particulièrement exposé à la tourmente faute de place. Ma position n'était pas tant pire mais me concernant je n'avais pas d'autres distractions que mes mortifères pensées. J'ai tenu jusqu'au bout malgré ma résignation et mon fatalisme. Je dois mon salut à mon camarade qui a réussi à contacter les secours par téléphone quand j'en étais incapable et il me doit probablement le sien car je l'ai enveloppé et protégé du mieux que j'ai pu.
Cette tempête avec des vents à plus de cent trente kilomètres par heure, nous aurions pu la tenir, mais nous avions sous-évalué le danger. Nous nous sommes exposés et à partir de là, c'était déjà trop tard. Quelqu'un de plus avisé que nous en survie n'aurait fait guère mieux pendant le grain selon moi. Si ce n'est déballer tout le matériel utile plus tôt. Par contre, et c'est bien là notre plus grande faute, il se serait arrêté bien avant pour se retrancher, voire n'aurait jamais quitté son camp le matin.
Comme dira Théo, la cruelle réalité c'est que le blizzard était déjà là, bien à l'heure. Quand nous sommes partis, nous n'avons pas eu assez de deux cerveaux pour assimiler l'information correctement.
Nous nous en sommes finalement tirés indemnes et sans séquelles. Le froid a été suffisant pour nous anesthésier mais pas assez vif pour geler nos cellules en profondeur. Nous étions mi-cuits seulement.
Maintenant que cette aventure est derrière moi, je puis dire que je ne la vis ni comme un fiasco, ni comme un traumatisme. J'en garde une expérience à la fois bonne et mauvaise. Ma joie de vivre et mes envies d'aventures n'ont jamais été aussi fortes qu'à cet instant.
Cette histoire me rappelle la fois où je me suis enlisé en plein champ avec le camping-car de ma mère dans ma quête d'un bout de nature. M'attribuant avec fierté et par la même occasion le statut de digne petit-fils de mon grand-père, lui aussi assujetti en son temps aux mêmes déboires. Je n'aborde pas cette expérience comme un échec mais comme un coup du sort, une épreuve, une leçon même ! Je n'en ressors qu'avec encore plus de niaque et une volonté farouche de continuer à partir. J'aspire à plus dur, plus loin, à repousser mes limites.
Tout va bien qui finit bien en somme. Il ne reste plus qu'à fomenter de nouveaux projets, de nouvelles marches et de ne pas s'apitoyer. Je dis merci à la vie, je chante la vie, je danse la vie, je ne suis qu'amour !
Remerciements
À Théo, mon ami, sans qui je ne serais probablement pas en train d'écrire ces lignes qu'il m'a d'ailleurs aidé à corriger.
À tous les agents et opérateurs ayant été impliqués dans le secours.
Au père de Théo qui nous a été d'un grand soutien et qui a vécu la tempête à distance.
À ma copine, Mathilde, qui était dans mes pensées dans les moments les plus durs et qui m'a aussi aidé à perfectionner ce récit.
Enfin, à tous mes proches et ma famille particulièrement, pour leur soutien inconditionnel et l'amour qu'ils me donnent.
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ICELAND une semaine à la neige
MaceraAvec une luge et un ami, il décide de traverser l'Islande à skis, du Nord au Sud, au cœur de l'hiver. Mais l'île a ses caprices et tout ne se déroulera pas comme prévu... Voici le récit véritable de son périple.