WICKED - 9 h 44 - 02 février, an 232
Plus les heures se suivaient, plus le ronflement des serveurs et les reflets crus des écrans l'étourdissaient. Thomas se massa laborieusement les yeux, et parcourut les dossiers épars sur son bureau, parachevant les rapports, détaillant parfois d'un oeil distrait le quotidien pénible diffusé par les ordinateurs. Ce tour avait déjà un an. Thomas en avait dix-sept. Maintenant ses actions avaient muté en mécanismes responsables, - il n'attendait plus rien de nouveau de ce devoir, plus rien de bon. Les minutes passaient lentement, et puisque l'urgence de se désobéir devenait insoutenable, Thomas observa ce qu'il s'était défendu de voir depuis qu'il avait pris place sur sa chaise. Il y eut un chargement court, - Thomas crut attendre des heures -, et l'angle des caméras se remania. La douleur monta aussitôt un goût âcre de bile dans sa salive. Il choisit de l'ignorer, saisit hâtivement son stylo, et murmura tout en notant sur un papier vierge : « Sujet A5, 9 h 57. »
Il croisa son regard sur l'écran. Ils étaient face à face. Son cœur battait de panique, ses mains devenaient moites, son souffle court. Car il ne pouvait pas s'y faire. Pas ici, pas dans cette salle, loin, si loin de lui, - pas quand les yeux qui l'avaient toujours tendrement aimés le défiaient aujourd'hui à travers le scarlarme. Pourtant Newt s'agenouilla, comme s'il avait toujours su, et se mit à secouer une main devant la créature.
« Eh, les plonks ? On arrête de jouer et on nous libère, maintenant ? Ce serait sympa de votre part, les tocards. »
Une chose tenace serra son coeur, comme un serpent venimeux s'enroule au cou de sa victime. Entendre sa voix était un supplice, une nécessité monstrueuse. Elle piquait son manque atroce, cette dépendance accrue, ce désespoir insatiable qui l'empoisonnait depuis des mois entiers sans qu'il ne puisse jamais trouvé de remède. Elle fit aussi jaillir une vision. C'était un souvenir de l'an passé. Newt, dans le dortoir, l'appelant, ses mains sur son torse, gémissant au-dessus de lui. Cette même voix qui souriait en lui disant je t'aime.
« Merde, reprends-toi, idiot... dit-il entre ses dents, prenant sa tête dans ses mains. C'est fini, maintenant... tout est fini. »
Quand il releva les yeux, le garçon était parti. Et Thomas éclata en sanglots.
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Le Bloc - 12 h 36
« Tu te fais des idées. assura encore Frypan, déchirant un morceau de pain avant de le dévorer.
- Je te dis qu'ils m'observent sans arrêt. insista Newt avec plus de force. C'est anormal.
- Ils sont là pour ça, les scarlames. C'est leur job.
- Je sais, je sais, mais avec moi, ils sont... différents.
- Différents... répéta-t-il confusément. Différents comment ?
- Ils me suivent partout, tout le temps, même dans le labyrinthe. Et ils ne fuient pas. Ils restent là, à me regarder jusqu'à ce que je m'en aille, - ça ne change jamais.
- Nous sommes des bêtes de foire, pour ces gens. Ca ne m'étonne pas.
- Ce... Ce n'est pas l'un de ces gens. rectifia-t-il. Je le sais.
- Quoi ? Le scarlarme ? Non, je te le confirme, c'est un robot. Un robot chargé de s'assurer qu'on ne profite pas trop de la vie et qu'on ne sorte pas d'ici. Peut-être que celui-là sent que tu es le moins conciliant de nous tous.
- Je ne plaisante pas, Frypan. Ce robot n'est pas juste "robot", il est contrôlé par un homme. Et cet homme n'est pas comme eux, - je le sens.
- Il n'y a que ces gens qui nous observent, Newt. Personne d'autre.
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Pouvoirs - Newtmas
FanfictionThomas est capturé par l'hôpital WICKED le jour de ses cinq ans, alors que ses parents signalaient naïvement son immunité et son don encore inexploitable de télékinésie aux autorités. Le temps n'existe plus pour le garçon ; au laboratoire, les jours...
