- Acte VIII (part. 1) -

166 14 1
                                    

Vi : 

- Caitlyn !!

Je hurle à m'en déchirer la voix sans pouvoir contrôler la panique qui me traverse comme un court-circuit. Un voile recouvre mes pensées et je me jette sans réfléchir sur cette ordure de Silco. Réagissant avec une fraction de seconde d'avance, Ekko repousse violemment Jinx et parvient à s'enfuir. Je distingue à peine sa course en direction de la rambarde du pont, trop occupée à balancer mon poing dans la face de mon ennemi. Je l'atteins de justesse à la mâchoire, aussitôt repoussée par Jinx avec qui s'engage une lutte à mains nues nous amenant près du bord. Dos à la rambarde, le corps à moitié au-dessus du vide, je baisse les yeux vers le canon qu'elle pointe désormais sur ma gorge, alors que son bras me presse contre la barrière en métal. Nos yeux se croisent un instant et je regarde, désemparée, celle qui autrefois jouait avec des morceaux de ferraille en leur donnant des noms, fabriquait des bombes artisanales avec tout un tas de bricoles trouvées ici et là, celle à qui je contais des histoire avant de dormir, à qui je laissais la lumière allumée quand elle avait peur du noir, et que je venais réconforter lorsqu'elle faisait des cauchemars la nuit. Cette personne, ce n'est pas celle que j'ai en face de moi, pas cette inconnue au regard froid qui me menace de son arme sans une once d'empathie. 

- Cogner... C'est tout ce que vous savez faire, vous les rats des Bas-Fonds, crache Silco en essuyant le filet de sang qui s'écoule de sa narine. Mais la fin est proche..

Il s'avance vers moi d'un air mauvais, contournant Jinx qui ne me lâche pas des yeux. 

- Tu vois, malgré tout, il y a quand même une chose que Vander et moi avions en commun.. Un unique point faible, la seule faille capable de faire tomber un homme et qui nous aura tous les deux porté préjudice. 

Il lance un regard paternel à celle qu'il considère désormais comme sa propre fille. Voir soudain une telle expression sur un visage d'ordinaire froid et hautain me laisse un peu perplexe, et je dois admettre qu'il semble sincère. 

- Un enfant..

Le canon de Jinx se rapproche jusqu'à s'enfoncer légèrement dans mon cou. J'avale ma salive, le souffle court. 

- C'est sans doute la principale chose qui l'aura mené à sa perte. À vouloir à tout prix protéger ces êtres fragiles qui n'écoutent pas et n'en font qu'à leur tête, on finit par devenir aussi faibles qu'eux.  

Il a un petit sourire en disant ça, comme s'il se remémorait lui-même quelques passages compliqués dans l'éducation de sa progéniture. 

- Je suis moi aussi tombé sans m'en rendre compte dans cette boucle infernale : on commence à avoir peur, on angoisse à l'idée qu'il lui arrive quelques chose, la crainte de le perdre efface toute rationalité tant on s'est attaché.. J'ai connu plus d'un réveil nocturne en sursaut, le corps couvert de sueurs froides, avant de constater à chaque fois qu'elle dormait paisiblement dans son lit.. 

Et moi, combien de fois avais-je ouvert les yeux dans le froid et l'obscurité de ma cellule à Stillwater, gardant encore son visage imprimé sur ma rétine.. 

- Cette peur là, elle est atroce, et je conçois qu'un homme, aussi impétueux soit-il, décide de rester dans son confort pour se préserver de toute conséquence.

- On dirait que tu t'es enfin trouvé un cœur.., je rétorque, même si je comprends où il veut en venir. 

- Mais moi, reprend-il en m'ignorant, contrairement à mon frère, je n'ai pas laissé cette peur avoir raison de moi. Non.. J'ai fais de ma fille ma meilleure arme, pour ne plus jamais craindre, et pour la savoir capable de survivre et se débrouiller seule. Vous êtes sacrément tenaces dans la famille, je ne peux pas vous enlever ça. 

What could've been...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant