Chapitre 2

4 0 0
                                    

Après un mois et demi à la voir toujours aussi régulièrement, Sofia avait fini par se confier de plus en plus à lui et à lui raconter des choses dont elle n'avait encore jamais parlé à personne :

— Tu écris des histoires ? s'étonna Donn-Sleibhe en reposant son café devant lui.

— Oui, enfin j'essaie d'en écrire une, rectifia la brune.

— Tu me la ferais lire, un de ces jours ?

— Pourquoi ? C'est un peu fantaisiste, tu sais, je ne pense pas que ça te plairait.

— Tu rigoles ? J'aimerais beaucoup lire ce que tu écris !

Elle rougit doucement en buvant le contenu de sa tasse. La couleur de ses joues ressortait d'autant plus grâce à l'ensemble blanc qu'elle portait ce jour, mais aussi grâce au chignon qui dégageait ses cheveux de son visage.

— Alors, dis-moi, de quoi ça parle ? reprit le Maître.

— Ça parle d'un magicien, répondit avec innocence la brune.

Donn-Sleibhe crut s'étouffer avec le liquide qu'il venait d'avaler.

— Excuse-moi, tu disais ? demanda-t-il en reprenant ses esprits et en essayant de ne rien laisser paraître. Un magicien ? Et de quoi est-il capable ?

— Il voit des choses, ou plutôt il les ressent. Je ne sais pas l'expliquer, mais c'est comme s'il était capable de voir des fantômes, des esprits, même s'ils ne ressemblent pas vraiment à ce qu'on nous montre dans les films.

— Ah bon ? Et à quoi ressemblent-ils alors ?

— Je ne sais pas trop. Une sorte de masse noire, comme une ombre.

— Tu vois les Ombres ? s'étonna Donn-Sleibhe à voix haute.

— Heu... Il voit des ombres, oui.

Alors que Sofia avait, depuis leur rencontre, ressenti une sorte connexion entre Donn-Sleibhe et elle, la brune se referma subitement sur elle-même. L'homme le sentit, il avait perdu la branche qu'il tenait et qui allait peut-être lui donner certaines réponses.

Foutu pour foutu, se dit-il avant de reprendre oralement :

— De toutes manières, ce n'est que de la fiction, n'est-ce pas ?

— Il paraît, répondit-elle vaguement, plongeant dans ses propres souvenirs.


* * *


Sofia se souvenait d'un soir où elle était en service de fin de journée. Elle avait pris l'un des derniers métros, en pleine nuit, il n'y avait presque personne, seulement des jeunes bourrés et des gens qui rentraient tard du travail comme elle. La brune avait la chance de rarement se retrouver debout dans le métro ; soit elle trouvait directement une place, soit un jeune homme lui proposait la sienne, mais, dans ce second cas, elle refusait.

Elle avait horreur de ce genre de pervers qui pensait qu'en faisant cela, elle lui appartenait et passerait la nuit dans son lit.

Ce soir-là, il y avait une femme assise sur la rangée de sièges face à elle, elle était sur son téléphone, écouteurs aux oreilles, et n'avait rien de spécial à part qu'elle écoutait sa musique déprimante si fort que toute la rame de métro aurait très bien pu chanter en chœur. Sofia l'observait aussi discrètement que possible, elle aimait s'imaginer des tas d'histoires sur chaque personne qu'elle croisait. Alors qu'elle essayait de deviner ce qui pouvait bien arriver à cette femme – une rupture amoureuse, une révélation familiale ou bien le retour d'un fantôme du passé ? –, le regard de la brune fut attiré par le siège à la droite de sa muse. Intriguée, elle se demandait pourquoi elle se sentait ainsi appelée par cette place, comme si quelqu'un s'y trouvait et la fixait. Pourtant il n'y avait personne...

DaemoniumOù les histoires vivent. Découvrez maintenant