Elle n'est partie qu'à la fin de la pause déjeuner. Une horreur. J'ai cru que j'allais mourir d'hypoglycémie et de faim. Pendant un moment, j'ai aussi pensé mourir à force de me retenir de rire. Entre Riley qui ne pouvait pas rester calme et qui se retenait de pouffer dès que nos regards se croisaient, et Reece qui semblait mourir d'inconfort et de chaud sous ce lit, ça a été les minutes les plus longues de ma vie. En plus, elle n'a fait que parler. Sincèrement, si je n'aimais pas Reece comme un membre de ma propre famille et que je ne le connaissais pas à sa juste valeur, j'aurais fini par le haïr avec tout ce que cette fille a raconté.
Qu'est-ce qu'il est beau ! Qu'est-ce qu'il est grand ! Et puis la couleur de sa peau est tellement belle ! Puis il lui sourit dès qu'elle passe _ c'est faux _ alors il y a forcément quelque chose qui se passe entre eux. Mais il est tellement timide et tellement demandé partout qu'il n'a pas pu lui répondre encore. Et bla. Et bla.
Par contre, ça a vraiment fatigué Reece mentalement. Lorsqu'on a pu se libérer, j'ai fini par lui demander s'il voulait qu'on sèche les cours et qu'on aille chez moi. Il a forcément accepté et nous voilà donc tous les deux sur la route de ma maison. Riley est retourné en cours. Il a dû comprendre que quelque chose n'allait pas parce qu'il nous a proposé de nous passer les cours qu'on allait manquer.
Le trajet se fait calmement, comme à chaque fois que l'un d'entre nous ne va pas bien. Une manière de le préparer à parler ou non une fois arrivé dans ma chambre.
Comme prévu, il n'y a personne chez moi. Cette fois-ci, c'est Reece qui monte directement dans la chambre pendant que je pars dans la cuisine, nous chercher quelque chose à manger. Je fais des sandwich poulet/mayonnaise et y ajoute beaucoup de cornichons. J'espère au moins que cette petite attention lui mettra du baume au cœur. Et pour m'assurer un bon résultat, j'attrape aussi dans le placard une tablette de chocolat noir.
Lorsque j'arrive dans la chambre, Reece est allongé sur mon lit, sous la couette et regarde le mur à côté de lui. Je pose le plateau sur mon bureau et pars le rejoindre. Je me retourne et colle mon dos contre le sien. Ça annonce ma présence et qu'il a le champ libre. Il peut parler, il peut pleurer, il peut insulter qui il veut, il sait que je suis présent mais que mon regard ne sera pas sur lui. Il sait que je ne le jugerai jamais mais je sais qu'il est plus simple de parler lorsqu'il n'y a pas de regard posé sur nous.
— J'y arrive pas tu sais ?
Je sursaute. Je ne m'attendais pas à ce qu'il se mette à parler aussi vite. Ce qu'il veut me dire doit lui peser bien plus que je le pensais.
— De quoi ? je réponds simplement.
— Ces filles au lycée. De ne jamais pouvoir répondre à leurs déclarations. Je peux pas les accepter.
— C'est pas grave. Tu n'es pas obligé de sortir avec elle si tu ne les aimes pas. En plus, la plupart des filles qui viennent te voir sont des folles furieuses. Je vois pas comment tu voudrais sortir avec elle. Même simplement pour tes ... affaires.
— Non, tu ne comprends pas !
Je sens son corps se raidir avant qu'il ne se tourne et m'oblige à lui faire face. Il a l'air furieux et en même temps ses yeux sont remplis de tellement de douleur que je ne sais pas ce que je dois faire. Je sens qu'il n'a pas fini de parler et que le nœud du problème arrive alors j'ai peur de faire un faux mouvement, de dire une mauvaise parole. Alors, je le regarde simplement.
— J'en suis incapable ! J'ai beau me dire que ça ne risque rien de sortir avec une des filles qui m'abordent, je n'y arrive pas. Imaginer dire oui à une d'entre elles me donne envie de vomir. Et le reste ... Les gars parlent de leurs coucheries avec autant de tact que lorsqu'ils vont acheter une baguette de pain. Mais moi, ça ne m'intéresse pas. Je ne peux pas m'imaginer faire quoi que ce soit avec une de ces filles. Et même avec n'importe quelle fille, lycée ou non. Et ... c'est pas la seule chose.
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Plus Sans Toi
RomansaImaginez. Chaque année, le 1er janvier à minuit pile, vous oubliez ce qu'il s'est passé durant ces 365 derniers jours et grâce à un minuscule comprimé, vous ne récupérez que les souvenirs qui en valent la peine aux yeux du gouvernement. La violence...