Les Racines du Saule ~HS. Le Lichen~

Chapitre 30

— Et comment va-t-il ?, interrogea la lieutenante.

Havre de Chaleur poussa un long soupir encore plus inquiétant que les paroles qu'elle allait prononcer.

— La blessure s'est infectée.

Patte de Lichen poussa un long soupir à son tour.
Quelques levers de soleil plus tôt, le chef du Clan Tournoyant, Étoile Aride, avait affronté un renard qui attaquait une patrouille frontalière, et s'était fait mordre à la gorge. La brune était arrivée juste à temps pour faire déguerpir la vilaine bête, et s'assurer qu'elle était bien sortie de leur territoire et miraculeusement, la guérisseuse du Clan, Havre de Chaleur, avait réussi à stopper l'hémorragie du meneur.
Celui-ci se retrouvait en convalescence dans la tanière des guérisseurs, si proche de la mort que tout le camp tournoyant restait silencieux, comme si les guerriers espéraient que le bruit soit la seule chose mortelle chez leur chef.

— Combien lui en reste-t-il, de toute façon ?, questionna abruptement Patte de Lichen.

— Quoi donc ?, fit Havre de Chaleur avec incompréhension.

— De vies, expliqua l'autre. Combien lui reste-t-il de vies ?

La soigneuse secoua la tête, et murmura.

— Ce n'est pas une information que j'ai l'autorisation de donner...

— Oh ! Bon sang !, s'exclama Patte de Lichen. Havre de Chaleur, notre chef est au bord de la mort ! Je veux juste savoir si je devrai devenir cheffe s'il ne tient pas le coup, ou s'il pourra retrouver ses fonctions de meneur...

L'autre sembla partagée entre son intégrité et les arguments de la lieutenante, et elle finit par avouer.

— Deux... Il lui reste deux vies...

— Ah, et bien voilà, soupira Patte de Lichen. Ce n'est pas demain la veille que je deviendrai meneuse, il me reste un peu de temps.

La femelle ne savait pas trop si elle se sentait prête à assumer ce poste, et elle préférait ne pas se poser la question.

— Havre de Chaleur, appela Nuage de Pommier, l'apprenti guérisseur. Les toiles d'araignées d'Étoile Aride sont pleines de sang, je dois les changer, ou non ?

— Il faut d'abord désinfecter la plaie !, informa la guérisseuse.

Elle se tourna vers la guerrière aux poils bruns.

— Excuse-moi, Patte de Lichen, je dois y aller...

— Pas de soucis, souffla l'autre.

La soigneuse rentra dans sa tanière, tandis que Pelage Roux arrivait près de la lieutenante.

— Ah, tu es là, affirma celle-ci. Bouffée de Fleur et Plume de Rapace ont-ils choisi des guerriers pour partir en patrouille ?, demanda-t-elle.

— Je n'en sais rien, déclara Pelage Roux, mais à vrai dire, je ne suis pas du tout là pour ça.

Patte de Lichen se rendit compte en sentant sa gorge se nouer qu'elle n'aimait pas du tout l'expression résignée de son ami. Même si les deux chats étaient toujours restés un peu en froid, depuis la mort de Soir d'Ambre leur relation était devenue moins tendue, et la guerrière ne voulait pas que cette situation régresse.

— Qu'est-ce qu'il y a ?, s'enquit la femelle nerveusement.

— Et bien..., commença Pelage Roux.

C'est seulement à cet instant là que Patte de Lichen remarqua Moustache de Lilas, derrière le guerrier, qui sortit de sa cachette avec un sourire désolé.