CHAPITRE 11

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JUDE

Je n'aurai jamais imaginé que se perdre dans les bois de Windorf pourrait être aussi facile. A aucun moment, je n'ai pensé que la forêt pouvait être un labyrinthe aussi compliqué et traître. Je trouvais les arbres majestueux et presque réconfortants. Ils me donnaient l'impression d'être protégé de tout, surtout du monde extérieur.

Maintenant, on dirait qu'ils essaient de me piéger et de m'engloutir. Il a suffit que le prof de sport propose une course d'orientation pour que mon idée de la forêt change littéralement. Je n'ai pas mis longtemps avant de me perdre dans cette étendue de feuilles et d'écorce. J'ai pourtant suivi les instructions et j'ai réussi à trouver les quatre premières balises de mon itinéraire. Je ne comprends pas ce qu'il s'est passé pour que les choses tournent au vinaigre.

Espèce de naze, incapable de se servir d'une boussole.

C'était vraiment une idée à la con de nous envoyer dans la forêt sans binôme. Je me demande comment les autres s'en sortent, tout seuls et livrés à eux-mêmes. J'espère que je ne suis pas le seul tocard à m'être perdu aussi facilement. Je me fiche de passer pour un con auprès des autres mais j'aimerai seulement ne pas être l'idiot du village. Je vaux probablement mieux que ça.

Entouré de toutes parts par la forêt, je consulte une nouvelle fois le plan que le prof m'a donné. Mes prochaines étapes me semblent inatteignables à présent. Je crois que je suis définitivement perdu. Ma boussole pourrait peut-être me sauver si je savais mieux m'en servir. Je ne suis clairement pas un explorateur dans l'âme et je ne le serai jamais.

Très vite, le calme de la forêt que j'aime tant devient assourdissant. Je me mets à le détester de toutes mes forces. Je n'ai plus vu personne depuis trop longtemps. Les bois sont tellement grands qu'il est facile de se retrouver seul en trop peu de temps pour s'en rendre vraiment compte. On dirait que le monde entier a disparu. Je n'ai plus aucun repère et c'est trop déstabilisant.

Ce n'est qu'au bout de plusieurs longues minutes que j'aperçois une ombre courir entre les arbres. C'est le premier signe de vie que je croise depuis près d'une demi-heure. Une vague de soulagement me transperce instantanément. Je me sens mieux tout à coup. Je n'ai plus l'impression d'être la brebis égarée du troupeau.

Au fur et à mesure que la silhouette s'approche, je reconnais les traits d'un visage et une démarche que je croise régulièrement dans les couloirs du manoir. Cette crinière bouclée et brune m'est familière elle aussi. Je n'ai pas besoin qu'il avance plus pour reconnaître River. En fait, je crois que je pourrais le repérer dans une mer de gens.

Maintenant qu'il m'a repéré lui aussi, il fonce vers moi vêtu de son jogging noir et d'un sweat shirt trop grand pour lui. Il semble bien moins désespéré que moi avec son sourire en coin et son attitude nonchalante. J'aimerai avoir l'air aussi confiant que lui, aussi bien dans ma peau.

-Enfin quelqu'un ! s'écrie-t-il en arrivant à ma hauteur.

Un sourire idiot se dresse instantanément sur mes lèvres.

-Je commençais à désespérer de croiser âme qui vive.

-Tu as de la chance puisque je suis là, m'esclaffe-je.

-Je parie que tu m'attendais.

-C'est plutôt toi, oui.

-Arrête, ricane-t-il à son tour. Tu as l'air aussi perdu que moi. On dirait un pauvre oisillon tombé du nid.

Une mèche brune tombe devant ses yeux. Je voudrais la dégager de son visage mais je me retiens. Il trouvait ça bizarre et je ne veux pas qu'il s'imagine quoi que ce soit. Je ne sais même pas ce qui me prend. Il me pousserait à faire n'importe quoi.

The Pretty BoyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant