Les frères Satori - Tome 1

Chapitre 9 : Survivre

Abraham

« Surmonter une crise d'angoisse, c'est comme survivre à une tempête. Tout est brisé, mais on s'acharne à reconstruire, en sachant pertinemment que la suivante détruira tout une nouvelle fois».

Le bruit qui émane de la salle de réception s'assourdit lorsque les portes se referment derrière moi. 

- Abraham! S'exclame Adah alors que je file à toute vitesse à travers les murs de l'aréna de hockey. Attend!

Elle arrive finalement à côté de moi et cale son allure à la mienne. Je ne jette qu'un rapide coup d'oeil à ma colocataire, sans y prêter plus attention et accélère le pas.

- Laisse-moi seul Adah, râlé-je en la voyant persister à vouloir me suivre.

- Mais pourquoi t'es parti comme ça?

Je n'arrive même pas à lui répondre. Ma respiration ne cesse de s'accélérer et je sens que ma carapace menace de céder.

Calme-toi Avi putain!

Je sers les dents, pris d'une envie de buter tout ce qui bouge. Ma nervosité grimpe en flèche. Je commence à ne plus être maitre de moi-même. Je vois tout en rouge. Les murs qui défilent à côté de moi m'oppressent. Ma poitrine me fait mal. Mes yeux parcourent les environs à la recherche d'une sortie.

Elle est où cette sortie putain?! Hurlé-je pour moi-même.

- Abraham? Ça va?

La voix d'Adah résonne dans ma tête comme dans un rêve. J'ai l'impression que mon corps est sur terre alors que mon âme est ailleurs. Je sens la crise de panique arriver, bien plus forte que d'habitude. C'est comme un cyclone. Un séisme. Une tornade. Pas une simple petite tempête. Je sens mon coeur à travers tout mon être.

Bordel.

Je me hais d'être faible à ce point.

J'aperçois enfin le panneau « sortie de secours » qui me nargue car ce n'est pas ça qui pourra me sauver, et pousse violemment la porte. L'air frais me claque le visage et je ne pensais pas que le temps avait filé aussi vite puisque la nuit commence déjà à tomber.

Le silence des lieux peine à me calmer, mais je suis enfin seul et je peux tout relâcher. Je m'avance vers un recoin, tapis dans l'ombre. Ma jambe se met à trembler alors que je suis encore debout. La pression quitte mon corps. Mes mains s'activent toutes seules et frottent ma peau jusqu'à la faire rougir.

Une toux s'échappe de ma gorge, suivie d'une deuxième et une fontaine de larme se libèrent de mes yeux. Je peine à respirer. J'ai cette sensation de sauter dans le vide, mais que la chute ne se termine jamais. Mes mains sont moites, alors que ma gorge est sèche. Mon coeur se comprime.

Aidez-moi.

Aidez-moi.

S'il-vous-plait...

Je hurle qu'on vienne m'aider alors que je supplie d'être seul. Je ne sais même plus ce qui est rationnel. Plus rien ne fonctionne correctement dans mon cerveau.

- Abraham? Reprend doucement Adah.

Je sursaute en prenant conscience qu'elle m'a suivi jusqu'à ici. Sa voix est plus calme que toute à l'heure, comme si elle était plus réelle. J'aperçois son regard inquiet se poser sur le mien.

- Je t'ai demandé de partir putain, lui dis-je mort de honte. 

Ma voix déraille en crachant ses mots. Je ne me contrôle plus.