Les frères Satori - Tome 1

Chapitre 13 : Deux pour le prix d'un

Isaac

« Une séparation forcée est toujours douloureuse.

Une séparation que l'autre a choisi l'est tout autant.»

Comme à chaque vacances scolaires, je ressors de l'aéroport le cœur lourd. Dès que je le peux, je prends un avion pour Brooklyn et ça fait cinq ans que ça dure.

Et oui, en plus du départ d'Abraham, j'ai dû supporter celui de Kay à quelques mois d'intervalle. Le seul qui m'ait supporté durant cette épreuve est lui aussi parti du jour au lendemain.

Pourquoi les seules personnes que j'aime me fuient-elles?

J'occulte ces pensées et avance vers la voiture d'Ezio qui est venu me chercher à l'aéroport. Ce dernier est au courant depuis longtemps du cas de ma famille, si on peut encore l'appeler ainsi.

Je l'ai rencontré deux ans après qu'Abraham ait disparu de ma vie, même si au début j'étais fermé à toute amitié. Je ne voulais rien, ni personne. Lui est arrivé dans cette nouvelle école où il ne connaissait personne car ses parents sont venus s'installer à la Nouvelle-Orléans pour le travail. Venant d'Argentine, il s'est retrouvé propulsé dans un nouveau pays, sans aucun repère.

À la rentrée, nous nous sommes retrouvés à côté en cours grâce au plan de classe, mais ce n'est pas ce qui nous a rapprochés. C'est plutôt le fait qu'on se soit retrouvé le lendemain dans le supermarché à côté de notre école, en train de sécher le même cours. Il m'a percuté en ne regardant pas où il allait, et nos regards se sont croisés avant qu'on éclate de rire, conscient que nous avions eu la même idée. Nous nous sommes retrouvés tous les deux avec une bosse sur le front et nous ne nous sommes plus lâchés depuis.

Il a très vite été au courant de mes relations familiales tendues. Il n'apprécie pas énormément mon petit frère, même s'ils ne se sont pas souvent croisés. Il éprouve une haine monumentale envers mon père, et demande à chaque fois des nouvelles de Kay.

Mon cœur se serre quand je pense à mon grand frère. Il se trouve depuis bientôt cinq ans, enfermé entre quatre murs, pour quelque chose qu'il n'a pas fait. Quand les flics sont venus le chercher et que mon père lui a annoncé qu'il n'était plus son fils, même si c'était déjà le cas depuis longtemps, il m'a regardé dans les yeux en me disant : « je te jure que je n'ai rien fais. Je n'aurais pas pris le risque de te perdre ».

Mon cœur n'a pas hésité à le savoir innocent. Et après de longues explications, mon cerveau non plus.

Comme Ezio, Indie et Ruben sont eux aussi au courant que mon frère est en prison. J'ai mis du temps à leur dire, et surtout à leur accorder ma confiance pour leur avouer ça, mais leur soutien est indéniable depuis. Je sais qu'en rentrant, ils demanderont des nouvelles de Kay, s'indigneront encore une fois que son propre père n'en a rien à faire, et feront tout pour me changer les idées.

Ce sont eux ma famille, plus que Jayden et bien plus que mon père.

Ezio relève les yeux de son téléphone, et sourit en me voyant approcher.

- T'es beau même quand tu fais la gueule, tu le sais ça?

J'éclate de rire et lui rend son accolade brève, mais réconfortante.

- Tes compliments me vont toujours droit au cœur, réponds-je alors qu'il m'a redonné le sourire en une seule phrase.

- Aller, monte dans mon carrosse princesse.

- Plus jamais tu m'appelles comme ça par contre, dis-je en le fusillant du regard.

C'est à son tour d'éclater de rire alors qu'il remonte en voiture. Je pose ma valise dans son coffre et m'installe côté passager.