Les âmes vagabondes

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Pdv de Ken

On est dans la voiture depuis à peine 5 minutes et je me repasse la scène de cette fin de repas en boucle. Héloïse a enfin osé lui dire tout ce qu'elle avait sur le cœur. Au fur et à mesure je voyais ses épaules se détendre, signe que tout ce qu'elle a balancé lui pesait sur le cœur depuis des années. J'ai cru que j'allais moi aussi lui cracher à la gueule tout ce que je pensais d'elle. Elle m'aime pas mais de là à dire que pour moi Héloïse est une « pute » c'est pas passé, mais alors lui mettre une baffe, ça a failli me faire vriller. Mais ça n'aurait rien réglé, au contraire. Le silence qui règne dans la voiture est un silence pesant. On a jamais vécu de silence pareil. Mais je vois bien qu'elle lutte pour ne pas pleurer, et je sais qu'un mot de ma part et elle va pas pouvoir s'arrêter. Je vais attendre qu'on soit à l'appartement.

Après presque 1h de route nous sommes enfin de retour chez-nous. Je porte Gaby pour éviter qu'il ait à se réveiller, après l'avoir déposé dans son lit je me dirige vers notre chambre où Héloïse est en train de se changer. Même enceinte elle est magnifique. Elle est dos à moi, alors elle ne me voit pas arriver. J'embrasse sa clavicule et elle frissonne. Depuis 4 ans que nous sommes ensemble ses réactions n'ont pas changées. Et j'aime ça. Elle met un t-shirt avant de se tourner vers moi.

-On va sur la terrasse ?

J'hoche la tête et je la suis. Elle a toujours préféré réfléchir à l'air libre. J'ai jamais compris pourquoi, et honnêtement je penses pas qu'il y ait de raison particulière. Je sais qu'après avoir dit ce qu'elle avait à dire à sa mère, c'est mon heure d'avoir mes 4 vérités. Même si c'est moi qui l'ai poussée à s'exprimer, je la suis à reculons. Elle s'assoit sur le fauteuil à bascule et moi je tire une des chaise en métal pour être face à elle. Elle réfléchit de longues secondes, je sais qu'elle aurait aimé avoir une cigarette à ce moment-là mais c'est impossible aux vues de son état. Elle finit par souffler avant de se lancer.

-J'ai peur. Elle marque une pause de plusieurs secondes, elle semble réfléchir aux mots qu'elle va employer, alors je ne la coupe pas. J'ai été abandonné par mon père avant même ma naissance, par ma mère à mes 16 ans. J'ai peur que toi aussi tu m'abandonnes Ken. Elle commence à pleurer. Ça me brise le cœur qu'elle pense ça. Je lui prends ses mains et je la tire vers moi pour qu'elle s'assoit sur mes genoux. J'ai cru que c'était ce qui était arrivé en février quand t'es parti. J'ai cru que toi aussi tu partais sans explications, parce que tu t'étais rendu compte que ta vie avec moi était moins bien.

-Hélo... je pose mes mains sur ses joues l'obligeant à me regarder. Ma vie elle a jamais eu autant de sens que depuis que je t'ai rencontrée. T'es formidable, même si t'es un peu chiante. J'ai réussi à lui arracher un petit sourire avec cette réflexion. C'est une victoire. Gaby est un enfant incroyable, je suis tellement heureux d'être son père. Et cet enfant. Je pose ma main sur son ventre bien arrondis. Je l'aime tellement. Hélo tu m'as offert une vie que je pensais ne jamais pouvoir avoir. Elle me regarde intensément, comme si mes mots avaient un sens particulier ce soir. Jamais tu m'as pris la tête avec le rap, avec les tournée, avec les voyages. Jamais. Je sais que c'est pas un truc facile à gérer pour toi, mais putain Hélo t'es incroyable. Et puis je sais que si tu crois ça c'est pas pour rien. J'aurais jamais dû partir comme ça la dernière fois. Je suis désolée, je sais que c'est facile à dire, mais je peux pas me faire pardonner, alors c'est tout ce que j'ai trouvé.

-Ken promet moi une chose

Je fronce les sourcils, c'est bizarre Hélo n'aime pas les promesses. Je sais que si elle me le demande c'est que ça compte pour elle.

-Dis moi

-Si un jour tu veux partir quelques jours dis-le moi. Reste pas juste pour nous, prends quelques jours pour toi et reviens. Ok ?

-Je te le promet mon amour.

-Je suis sérieuse Ken. Je veux pas qu'on s'engueule parce que tu t'obliges à rester. C'est pas bon pour nous, et pour nos enfants, je veux pas qu'ils vivent avec leurs parents qui s'engueulent, ou qui se parlent plus.

Elle a raison, comme souvent.

-Hélo je te le promet, OK ?

Elle sourit et m'embrasse doucement. Je peux pas imaginer ma vie sans elle, sans Gaby, sans notre futur enfant. En passant à cet enfant faut vraiment qu'on règle un truc avec Hélo

-Par contre Hélo, faut qu'on se mette d'accord sur le prénom de cet enfant

Oui elle est enceinte de 8 mois mais on galère à trouver un prénom. En fait faut qu'on en trouve 2. Un si c'est une fille et un si c'est un garçon. Deux fois plus chiant.

-Ouais... Mais on peut voir ça demain s'il te plait. Je suis fatiguée

Je peux pas lui en vouloir, elle fatigue super vite en ce moment. C'est encore pire quand on prend la voiture. Ma meuf devient un marmotte.

-T'as intérêt à garder cet enfant au chaud le temps qu'on trouve un prénom

-Arrête t'as qu'une hâte, c'est que j'accouche.

Elle a raison. Je veux trop voir la tête de notre enfant, le sentir dans mes bras, pouvoir lui parler.

-Surtout parce que tu veux plus coucher avec moi oui

Je voyais bien qu'elle avait pas la force. J'ai jamais forcé, ce qui est normal. Mais j'avoue que même enceinte elle me fait toujours autant d'effet

-Ta gueule Samaras

On rejoint silencieusement notre chambre. Héloïse s'installe dans le lit pendant que je me change. Quand je la rejoint elle pose sa tête sur mon torse et moi j'embrasse son front.

-Bonne nuit Hélo

-Bonne nuit Ken