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Le regard du Disciple brillait d'une détermination sans concession. Duo ferma les yeux et respira profondément, avant d'éclater en sanglots. 

Tensor le serra dans ses bras et lui murmura à l'oreille :

— Tu n'es plus seul.

Peut-être que cette fois, le debugger n'allait pas sombrer dans le sentiment de rage et d'impuissance auquel il s'était accoutumé depuis le tragique accident dans lequel sa famille avait disparu. Dans les années qui avaient suivi, son oncle l'avait soutenu de loin, s'assurant qu'il ait de quoi vivre dans sa propre cellule. Le jeune homme s'était malgré tout retrouvé livré à lui-même : indépendant, mais privé de toute forme d'affection de la part de ses semblables.

Alors qu'il reprenait son souffle, ils entendirent la voix de Magic.

— Duo ?

Elle venait d'entrer dans la pièce.

Les transports étaient complètement paralysés dans le quartier de Madame Kiel; elle avait donc dû rejoindre la station de la ligne express à pied. Les réseaux de communication étaient, eux aussi, en partie inopérants : les derniers messages de Duo ne lui étaient parvenus qu'une fois débarquée à la gare du complexe tertiaire abandonné.

Après avoir constaté l'état de l'Arrangeur, elle tenta d'appeler la centrale au moyen de la 22K locale, qui était parfaitement fonctionnelle. Elle parvint à l'atteindre sans difficulté. Le standard lui proposa de lui envoyer une équipe dans la journée : il n'y avait plus une ressource disponible en raison des troubles du secteur nord, qui avait sombré ce matin dans un chaos inexpliqué. Elle demanda à parler à Pelobate, mais il refusa la communication et la renvoya vers un poste déporté. Visiblement, il avait d'autres circuits à dresser en ce moment. Le service de proximité avait été sous-traité à une association locale qui avait pris le relais des autorités. Duo et Tensor n'avaient pas fini de relater à Magic le cours des événements que cinq officiers  volontaires des "Voisins du Lagon" les avaient rejoints pour prélever à leur façon des échantillons, piétiner les preuves et emmener la dépouille de Nvi en lieu sûr.

Le concept de police du début de siècle n'avait plus de sens aujourd'hui, grâce à l'omniscience du système. En cas d'anomalie, les actions à prendre étaient essentiellement mécaniques et logiques : nettoyer, ranger, rétablir les fonctions d'infrastructure, restaurer, corriger les programmes et calibrer les capteurs. Les disciplines d'expertise médico-légale, de profilage, d'analyse comportementale ou de psychiatrie s'étaient effacées devant l'omniprésence des faits et des données.

— On va commencer par regarder les logs du bâtiment, proposa Magic une fois les officiers partis.

— Il n'y en a pas ; le secteur fonctionne en mode énergétique autonome. Tout est débranché, j'ai déjà vérifié, lui répondit Duo.

— On n'a donc aucune idée de ce à quoi ils ressemblaient ?

— Je te dis qu'ils ont tout effacé. Je n'ai plus aucun souvenir ! À part... l'enregistrement de Tensor.

— Oui, je n'ai pas pu les approcher, mais quand même, la plus détraquée d'entre eux, celle qui a assassiné mon Maître, elle avait une voix vraiment bizarre. Elle a dû la choisir exprès pour se donner un genre.

— Bingo ! Si son timbre est vraiment spécifique, l'algo pourra sûrement la localiser ! s'exclama la boss.

Tensor tendit le bras :

— Allez-y. Téléchargez.

En quelques instants, elle avait récupéré la signature de la voix des trois criminels et l'avait transférée dans le réseau d'identification universel. Il ne fallut pas une minute pour que le système leur retourne les résultats : il n'y avait aucune correspondance au-delà de 99.99% avec un individu connu, par contre la voix de Liz avait été perçue il y a quelques heures dans une dizaine de points aux abords du secteur, avec une marge d'erreur infinitésimale.

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