26 - the fall of a city

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Le monde était une zone de guerre. Une zone sans partage. Une zone ruinée par les actions des Grands au détriments des Petits. Les petits du peuples qui n'avaient rien demandé. King's Landing n'avait jamais été très belle, il s'agissait d'une ville qui grandissait toujours un peu plus, débordant des ramparts pour grignoter un peu plus le paysage dehors. Aegon s'était toujours demandé à quoi ressemblait le paysage par delà les murs. Est-ce que tous les endroits du monde ressemblaient aux Terres de la Couronne? Est-ce qu'on y vivait d'une manière aussi misérable? Serait-il à sa place partout où il pourrait aller? Terreux, sale, puant. Créature née des entrailles de la ville.

Quand ils quittèrent l'insécurité du Donjon Rouge, le Roi sentit son coeur louper un battement. La capitale était en flamme. Son minuscule théâtre, son domaine brûlait sans que personne ne fasse quoique ce soit pour arrêter le carnage. Il eut envie de secouer les garde, d'hurler à tout ceux présent de faire quelque chose. Il se moquait des petites gens, de ceux qui mourraient ou vivaient, mais la ville, sa ville était entrain de disparaître, rendant son dernier souffle. Elle ne renaîtrait pas de ses cendres, impossible. Il regarda la tour du grand septuaire tomber, sa cloche résonnant dans les rues comme un cri déchirant.

Dieux. Ils avaient quitté l'insécurité du Donjon Rouge pour l'insécurité de King's Landing et pendant un instant, Strika se demanda s'ils parviendraient à atteindre Fosse-Dragon, là bas, si loin. Il le faudrait de toute manière. Ils étaient au pieds du mur. Mourir ou vivre, il était le moment de choisir. Les rugissements de Syrax au dessus de leur tête les décida, les rires cruels des soldats aussi. Et dans les rues sinueuses marchaient deux silhouettes à l'apparence miteuse. Rats dans un amas de décombres, décadence d'un temps révolu. Le dragon avait perdu toute sa grandeur, toute sa flamboyance. Ombre serpentine sur les pierres, murmures effrayés.

On se bousculait ici et là, dans la panique, dans l'hystérie du moment. On criait à tout va, on suppliait, on chantait. Certains dansaient même. Culciper. Les Bas-Fonds avaient atteint la surface, les premiers étaient les derniers, les derniers étaient les premiers. Le monde était sans dessus-dessous, rires d'une folie qui existait depuis toujours. Les Manteaux d'Or ne contrôlaient plus rien, les petits et les grands déambulaient, couraient, la panique, l'hystérie, la folie de l'instant. Strika sentit une sueur froide couler le long de sa colonne vertébrale. Une fille étendue, des charognards sur elle, son regard vide, froid.

La ville était tombé dans une aliénation la plus totale, des animaux plus que des hommes, des animaux avides d'un sang qu'ils avaient toujours rêvé de verser. La confusion était totale et dans cette confusion, tout était permis. On violait, on tuait, on volait. On hurlait à la lune comme une meute de loup sans chef, perdus, à la recherche d'un repère sans voir qu'il était là, juste là, tout proche. Aegon trébucha. Il se plaignit d'une douleur à la jambe, tremblant, suant abondamment. Son état s'empirait d'instant en instant et sur son visage, la peur, la terreur la plus pure, la plus totale.

« Debout Aeg. S'il te plaît. Je ne te laisse pas ici, viens avec moi. Essayons d'atteindre la maison. Viens. Aller. »

Strika le souleva avec la plus grande peine du monde, son bras autour de lui, le trainant comme elle le put. Le Roi des Sept Couronnes était rongé par les excès. Les excès les plus décourageants, qui noircissait l'âme et alourdissait le corps. Il n'était plus que l'ombre du Prince qu'elle avait rencontré il y'a tant d'années. Diable à l'apparence si charmante, dodue, coupable d'une vie luxueuse quand on mourrait de faim dehors. La rousse aussi était coupable. Elle s'était prêtée au jeu de la cour, brûlant la vie de part et d'autre. Année après année, vie de luxure, vie douloureuse. Ses dernières semaines avaient été le théâtre de l'Acte final d'une vie qui n'avait plus de sens.

Fosse Dragon. Fosse Dragon. Fosse Dragon. Feux-du-Soleyl. Feux-du-Soleyl. Feux-du-Soleyl. Or sur le Noir. Cri d'une créature à la colère bestiale au loin. Dieux. Pitié. Aegon essuya son front en marchant difficilement. Il se demanda pendant un instant s'il ressemblait à son père, s'il avait l'apparence de Viserys dans ses derniers moments. Ressemblait-il à la Mort elle-même? À l'Inconnu? Il cracha au sol, observant son sang noircir la pierre. Il mourrait. Il crevait. Pas comme ça, pensa-t-il instantanément. Pas comme ça. Impossible. Non. Aegon avait toujours fantasmé son départ pour l'au-delà. Il avait imaginé empoisonner son vin et celui de Strika. Il avait imaginé s'enfoncé profondément au creux de ses reins, son corps réchauffant le sien, lèvres conte ses lèvres, rideaux de cheveux roux protégeant son corps tout entier. Et puis ils seraient morts dans les bras l'un de l'autres, enlacé. Pas comme ça. Pas à même le sol, sur la pierre crasseuse.

La jeune femme tourna dans une rue et la scène la plus déchirante noya ses yeux de larmes. La maison. Là. Non loin de Fosse Dragon s'était tenue une large maison sur deux étages. Elle avait eu de larges colonnes sculptées de roses grimpantes, une balustrade en argent, fine et brillante, des murs très propres et un jardin parfaitement entretenu. Derrière ses portes closes avaient ri deux jeunes femmes toutes de blancs vêtus. Aujourd'hui, la brune était allongée dans une mare presque noire, sa robe tâchée d'écarlate, ses yeux grands ouverts, la peur sur le visage. Mysaria. La porte avait été enfoncée et à l'intérieur, on devinait sans peine le chaos. Tout avait été retourné, détruit, perles, diamants et chaines dorées pavaient le chemin emprunté par les coupables. Crime partout, justice nulle part.

Aegon tira doucement le bras de Strika. La rousse était incapable de détourner ses yeux de ce spectacle atroce. Son amie était morte et elle n'avait même pas pu lui dire au revoir. Jamais. Pendant un instant, sa colère et sa haine furent tournée vers le blond à ses côtés puis... Elle se demanda si tout n'était pas sa faute en réalité. Dieux. Elle l'avait abandonné comme elle avait abandonné Gaemon. Dieux. Les larmes coulèrent sans peines, inondant son visage d'une amertume innommable. Et ils reprirent leur route. Non loin de Fosse Dragon s'était tenue une large maison sur deux étages. Elle avait eu de larges colonnes sculptées de roses grimpantes, une balustrade en argent, fine et brillante, des murs très propres et un jardin parfaitement entretenu. Aujourd'hui se tenait la misère. Tout revenait à la terre un jour ou l'autre.

Et puis on tira la jeune femme vers l'arrière avec une force peu commune. Aegon chuta au sol, un cri quittant ses lèvres misérablement, Strika trébucha vers l'arrière et elle reconnue sans peine l'Homme du Guet qu'ils avaient évité plus tôt. Strika resta là, bouche béante, ses yeux humides d'une peur qu'elle hurla silencieusement dans le vacarme environnant. Aemond. Elle vit son visage remplacer celui de l'inconnu, ses cheveux blonds d'or argentés fantomatiques chatouillant ses joues. Il n'était pas. Ce n'était pas lui. Et pourtant, cela était tout comme. Un sourire fou marqua ses lèvres, il s'apprêta à parler mais à la place de paroles, une cascade sanguinolente tomba sur le visage de la rousse.

Quand elle se releva, elle reconnue sans peine la Mère Supérieur du Septuaire, tremblante, le regard fou. Strika passa alors ses bras autour de la femme, son visage tordu par l'horreur de toute cette scène, l'horreur de toute cette vie. Elle repensa au jour où elle lui avait proposé de revenir, de devenir quelqu'un d'important, de réel. Une personne bien qui aiderait. Peut-être que tout cela aurait changé quelque chose. Et puis une douleur aiguë, brûlante, une douleur qui lui donna le vertige comme aucune autre auparavant. Ses yeux s'ouvrirent alors largement et ses doigts palpèrent l'objet planté au creux de sa taille, tirant de toute ses forces. Et elle pressa. Elle pressa de toute ses forces. Strika le savait, il ne fallait pas retirer la lame. Il ne fallait jamais retirer la lame. Mais la panique, la peur, la douleur. Tout était trop pour elle et soudainement, elle souhaita disparaître, remplacer Mysaria sur le pavé, étendue dans son propre sang.

Aegon était à genoux. La rousse se demanda comment il avait réussi à se mettre dans cette position. Il l'observa régurgiter, impuissant. Ses doigts retirèrent la soierie qui l'enveloppait, la pressant contre la blessure et la douleur fut plus forte encore. Ils devaient fuir. Ceci était une évidence. Orange contre Blanc. Quelques pas de plus. Marches et portes dérobées. Tout ce qu'il faudrait pour vivre quelques instants de plus. Fosse Dragon. Fosse Dragon. Fosse Dragon. Feux-du-Soleyl. Feux-du-Soleyl. Feux-du-Soleyl. Or sur le Noir. Cri d'une créature à la colère bestiale au loin. Dieux. Ils devaient vivre. Ils devaient vivre.

HOTD - The Lesser Lord [Aegon x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant