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Dansent les flammes, rouges et brûlantes, seules conscience de la folie qui les habitait. Dansent les flammes, hautes, dévastatrices. King's Landing brûlait et on chantait la mort du roi, célébration. On avait pensé que Rhaenyra était venu les sortir de la misère, reine rouge écarlate sur un champ noir. Elle était le phare de l'espérance. La libératrice. La reine de ce peuple abandonné à l'inconsciente conscience des Targaryen et Hightower. N'est-ce pas la Reine Mère pendue aux portes du Donjon Rouge après tout? Alicent Hightower, chaines dorées au cou, le visage violet, les yeux exorbités, ses cheveux retombant sur elle comme une cape mortuaire. On chantait la chute de la Grande Tour de Villevieille. À bas la flamme verte, à bas la Reine Mère.

Sous terre, la folie était contenue, secrète, murmurée. Violet dans le brun, corps sans vie d'un autre innocent parti trop vite. Pauvre Gaemon pensa Aegon. Pauvre fils. Les dieux semblaient cruels et pourtant, le Roi présumé dans les Sept Enfers pensa que cette fin valait mieux que toute celle qui les attendrait très bientôt. Ô, s'ils pouvaient partir. Mourir ici. Quelle douce idée. Aegon caressa alors le poignard dans la main de Strika mais la rousse refusa de lâcher prise. Elle le gifla si fort que le blond fut sonné un instant. Perdu. Choqué. Elle l'avait frappé. Sa Strika. Et puis il se souvint. Strika. On lui avait donné ce nom à cinq ans puisqu'elle frappait comme les garçons de son âge, fort et brutalement.

Il hocha sa tête, caressant sa main pour la convaincre, se montrant doux, mielleux, plein d'une tendresse fabuleuse. D'accord. Ils ne mourraient pas ici. Aegon se leva alors, laissant sa cape recouvrir le corps inanimé, pour détourner l'attention de Strika des lèvres bleus, du visage violet, des yeux rouges qui semblaient prêt à sortir de leurs orbites. Ils devaient fuir. Ils devaient trouver la sortie et peut-être, ô peut-être, une rédemption les attendrait quelque part. Aegon imagina alors un endroit chaud, plein de soleil, doré comme l'astre brillant qui réchauffait leur peau le jour de leur rencontre. La jeune femme murmura une prière puis elle accepta. Fuir. Fuir pour leur vie.

Elle ne remarqua pas tout de suite l'aspect de l'homme à ses côtés. Non. Elle s'était concentrée sur le chemin qu'il empruntait, ses yeux se méfiant de chaque coin, de chaque détour. Et puis quand il s'arrêta et qu'elle continua, Strika fronça ses sourcils. Elle manqua de lui crier dessus, de lui dire de se presser, d'aller plus vite. Ils n'avaient pas toute la journée après tout. Le Donjon Rouge pourrait d'effondrer sur lui-même et eux avec, écraser par une montagne de brique qui briserait chacun de leurs os. La pensée lui retourna l'estomac mais elle ne se vida qu'en voyant le bras d'Aegon. Elle n'éclata en sanglot que devant la misérable apparence qu'il avait. Plus Roi-Cafard que Roi des Sept Couronne. Maintenant. Toujours.

« Aeg... Qu'est-ce qu'il s'est passé? Est-ce que tu t'es fait attaqué ? Dieux. On doit partir, se dépêcher. Ton bras...

— Peut-être que tu pourrais t'en occuper? Tu as été formé à ça non? susurra le blond, tremblant.

— À soigner les maux de ventre et les plaies ouvertes, pas à soigner les os cassés. Oh Dieux. Oh Dieux... On va mourir. »

Il la serra contre lui, caressant ses cheveux lentement. Aegon n'avait plus les mots nécessaires pour lui promettre que tout irait bien. Il ne savait pas où ils étaient. Il ne savait pas s'il arriverait à se repérer malgré sa connaissance des sous-terrains mieux que personne. Une toux brûla sa gorge et Strika grimaça légèrement. Rouge sur les lèvres, goût métallique sur la langue. Les excès le rattrapait enfin pour de bon, Roi des Rats, Roi des Bas-Fonds. Aegon ne tiendrait pas la nuit s'ils n'allaient pas plus vite, s'ils ne trouvaient pas une solution. Et Strika respira profondément, elle respira encore et encore et encore. Il lui fallait reprendre la situation en main. Ses doigts trouvèrent les trois restant de la main du blond. Ils devaient avancer.

Fumées, éclats de voix. Fumée, bannières en feu en bas d'une série d'escalier. Le dragon tricéphale doré du Roi des Sept Couronne était en feu. Il brûlait vicieusement, les flammes brûlant le tissu. Aegon sentit ses larmes monter. Il était honteux, misérable, battu à un jeu qu'il n'avait jamais souhaité rejoindre. Il était monté sur le trône poussé par l'ambition de personnes qui avaient disparu sans laissé de traces. Strika, elle, se mit à réfléchir. Si le feu était ici, c'est que quelqu'un l'avait déposé. Il n'y avait pas de torches au mur sur cet intervalle de leur chemin. Quelqu'un. La jeune femme serra alors le poignard dans sa main et Aegon passa devant elle. Il était mort de toute façon, il ne craignait pas de partir trop tôt si cela permettait à son amante de fuir. De vivre.

Et bien vite, ils virent des soldats à la cape dorée. Les Hommes du Guet. Les manteaux d'Or. Ironique, pensa Strika. Ils reconnurent sans peine Aegon, ses cheveux blancs, son teint pâle, ses yeux violets, son visage de chérubin. Ils reconnurent sans peine le roi qu'ils haïssaient sans peine, le roi qu'ils jetteraient volontiers en pâture aux Noirs, fier présent pour Rhaenyra Targaryen et le Prince Consort. Strika sentit ensuite les yeux sur elle et pendant une seconde, elle se sentit menacée. Elle repensa à la brûlure qui avait irradié ses reins, à la respiration d'Aemond contre son oreille, son parfum plein d'épice, de feu et de bois. Elle se souvint de ses grandes mains sur les siennes, de la douleur qui l'avait déchirée de part en part. Tout sauf ça. Pas encore. Et la rousse serra le poignard contre sa cuisse en tenant le bras d'Aegon dans la main qui avait tenu la sienne.

« Vous ! Où est-ce que je peux trouver la Reine. J'ai trouvé ce rat trainer dans les cachots. Strika se surprit elle-même, sa voix crachant un venin qu'elle avait contenu tout ce temps.

— Et qui es-tu toi, ma jolie? Peut-être que je devrais te faire tater de mon braquemart pour être sur de ton allégeance. Mh? demanda un homme à l'apparence rustre.

— Avec plaisir, mais uniquement après ma récompense obtenue. J'aime pouvoir dépenser mon argent pour vous entretenir mes chéris. »

L'assurance de la jeune femme leur permit alors de se sortir de là et Aegon fondu en larme contre sa poitrine quand ils arrivèrent dans le septuaire. Ils étaient sortis des souterrains mais le plus dur était encore à venir. Aegon toussa à nouveau et Strika observa le sang sur sa poitrine, essuyant les lèvres de cet homme qu'elle aimait. Ils devaient s'en sortir. Ils devaient s'en sortir. Et leurs pas résonnèrent à travers le septuaire jusqu'à la sortie. Quand Aegon poussa son premier cri en 107 après le Conquête de son ancêtre du même nom, son père l'enveloppa d'une soierie noire et dorée, ses cheveux blancs contrastant contre le tissus qui l'enveloppait si précieusement. Quand Aegon poussa les portes du début de sa fuite, il fut enveloppé dans une soierie noire et dorée poussiéreuse, son visage sale se fondant dans le décor.

Dansent les flammes, rouges et brûlantes, seules conscience de la folie qui les habitait. Dansent les flammes, hautes, dévastatrices. Alicent Hightower, chaines dorées au cou, le visage violet, les yeux exorbités, ses cheveux retombant sur elle comme une cape mortuaire. On chantait la chute de la Grande Tour de Villevieille. À bas la flamme verte, à bas la Reine Mère. On chantait la mort des Verts et dans le siège de ses chants, le Roi fuyait au bras de la Flamme Rouge.

HOTD - The Lesser Lord [Aegon x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant