Chapitre 1

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♧Muse♧

Inspiration. Expiration.

Je jette un coup d'œil à Uma, ma meilleure amie, qui vient d'arrêter sa jolie Mercedes, au bord du trottoir. Dehors, les trois déménageurs sont déjà en train de sortir mes maigres biens de leur petit camion. Nous sommes tous partis de New-York il y a quatre heures déjà.

Il y a quelques mois, j'ai décidé de rejoindre Uma ici, à Saratoga springs, pour deux raisons principalement. La première: j'ai besoin d'elle au quotidien pour servir d'intermédiaire entre moi et le monde extérieur. Le monde du mal, le monde maudit. La seconde: elle me manquait énormément.

Si elle a emménagé dans cette ville il y a deux années de ça, c'était uniquement pour une raison professionnelle. Elle a été mutée au SUNY Emoire State College Administratives Offices en tant que professeur de langues étrangères.

Je sursaute et poste mes avant-bras devant mon visage pour me protéger, lorsque je sens une main enserrer mon épaule. Réflexe. Uma me rassure en me souriant. Mais ça n'apaise pas pour autant le tambourinement de mon cœur, ni mes tremblements et encore moins le sentiment de culpabilité qui me consume.

C'est juste Uma, calme toi Muse...

Inspiration. Expiration.

-Tu vas voir, la maison est magnifique et elle donne directement sur le lac. Tu seras au calme.

Oui. Je loue une maison sans meme l'avoir vu. Mais je fais confiance à Uma, je sais qu'elle a fait attention aux accès à la maison, ainsi qu'au voisinage.

-Il faut que j'aille me laver...

Elle me sourit tristement en jouant avec ses doigts. Je vois encore les déménageurs vider le camion. Mes derniers cartons. Je reffoule mon envie de vomir. Il faut que je me lave. Il faut que je lave tout.

-Muse... Pourquoi tu ne ferais pas...
-Non!

Je n'ai pas besoin d'en entendre plus. Je sais qu'elle va encore vouloir me dissuader de me laver. Je sais qu'elle va encore vouloir m'aider. Je sais qu'elle fait tout ça pour que j'aille mieux. Mais c'est peine perdue.

-Muse, ma belle...
-Il faut que je me lave Uma. Il faut que je me lave. Je suis sale. J'ai...

Je ferme les yeux pour chasser mes larmes. Pourquoi tout le monde souhaite m'empêcher d'être de nouvelle propre? Pourquoi personne ne comprend que j'ai besoin d'enlever cette saleté, celle qui se coule dans chaque recoin.

Commences par toi, et ensuite tu t'occuperas de cette maison. Tout doit être propre.

-D'accord, excuse-moi, je ne voulais pas te faire pleurer. Je vais m'occuper des cartons. Et de... eux... Vas-y.
-Merci.

J'ouvre la portière en trombe, manquant presque de tomber. Je ne dois pas rester dehors. Je dois rentrer. Les trois hommes me fixent, comme si j'étais une folle furieuse, une hystérique.

Ils n'ont pas tort. Je le suis.

Je manque de vomir sur le goudron du trottoir tant la situation me met sous tension. Des hommes. Et ils me regardent. Il faut que je me lave. Que je me lave de leurs regards.

Sans regarder les alentours, je fonce vers la porte d'entrée fermée, dont je tiens les clés dans ma main tremblante. J'ai l'impression de ne plus contrôler mon corps. Sur ma droite, je sens une présence.

Réflexe. Je lève les yeux pour fixer le danger. Car le danger me suis toujours. Partout. Tout le temps. Un homme. Encore. Il me regarde, les mains pleines de victuailles. Serait-ce une salade dont je vois les feuilles?

À cœur perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant