Chapitre 33

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- Si l'on parle de puissance mentale brute, votre lien n'est pas assez fort.

La voix de Deaton, aussi habituellement douce soit-elle, claqua comme une malédiction, une fatalité à laquelle personne ne pouvait rien. Derek faillit lâcher le téléphone qu'il maintenait fébrilement contre son oreille. Déjà deux jours que le trio était au chalet, et deux jours qu'il se torturait l'esprit pour savoir s'il devait ou non tenir le vétérinaire au courant de la situation. En soi, il n'aurait même pas dû hésiter, mais la manière dont la situation empirait, insidieusement et subtilement, l'avait poussé à s'isoler un peu. Il n'en était pas fier. Non seulement il laissait Jackson passer la plupart de son temps avec Stiles, l'empêchant de s'occuper de lui-même, mais en plus il n'arrivait pas à trouver de solution de son côté. Alors, il avait fini par craquer et appeler le vétérinaire qui, il l'espérait, avait trouvé des choses. Une prémisse de piste. Mais ce qu'il venait de lui lâcher brisait tous ses espoirs.

- On a tout fait comme il le fallait, souffla-t-il.

En son for intérieur, il en était convaincu. En tout cas, de son côté, il avait tout tenté, s'était rapproché de lui plus que de raison, jusqu'à même changer sa vision de l'hyperactif. Plus qu'un simple ami à aider, il le voyait comme quelqu'un d'extrêmement précieux à qui il tenait énormément. Et ça, c'était sans prendre en compte le fait que Stiles était son ancrage, ce qui le rendait d'autant plus important à ses yeux. Un ancrage bien affaibli, mais qui tenait encore un peu le coup.

- Il semblerait que cela ne soit pas suffisant.

Les mots étaient durs à entendre, mais atrocement vrais, et le reconnaître relevait de la torture. Derek se frotta les yeux. Il avait l'air éreinté. Des situations tendues, il en avait affronté, certaines plus dangereuses que les autres. Mais ce qui différenciait celle-ci des autres, c'était la peur viscérale qu'il ressentait. Oui, il était terrifié.

- Peter doit avoir une trop grande emprise sur Stiles, lâcha la voix plate du vétérinaire. Dis-moi comment il est, physiquement et mentalement. Y a-t-il eu de grands changements depuis la dernière fois ?

La gorge nouée, Derek ne sut que dire. Des changements ? Oh, oui, et pas qu'un peu. S'il lui avait au départ dit l'essentiel – que les choses n'évoluaient pas dans le bon sens –, il ne lui avait néanmoins rien décrit de probant.

- Il est maigre, finit-il par articuler. On a du mal à le faire manger correctement.

Il s'en rendait bien compte et son ventre se nouait chaque fois qu'il voyait son regard angoissé se poser sur l'assiette qu'on lui mettait sous le nez. Stiles n'aimait plus manger et c'était d'autant plus perturbant lorsque l'on se souvenait de celui qu'il était avant, raffolant sans arrêt des curly fries, se vantant de pouvoir manger ce qu'il voulait sans prendre un kilo, racontant ses exploits en matière de dégustations culinaires, où il se retrouvait parfois à mélanger des saveurs étonnantes, juste parce qu'il aimait ça et que sa curiosité menait ses envies.

Envies qu'il n'avait plus.

- Il dort de plus en plus.

- Il fait des cauchemars ? S'enquit le vétérinaire d'un ton grave.

- Régulièrement, oui.

Et c'était une torture. Stiles se tordait dans tous les sens, repoussait tout ce qui était proche de lui : les draps, son oreiller, Derek, et parfois Jackson lorsqu'il les rejoignait dans le lit, par sécurité. Il se démenait comme un diable, hurlait, tentait vainement de se soustraire aux horreurs que devait lui infliger Peter. Quant à ce côté narcoleptique qui commençait à bien se développer, c'était aussi étrange qu'inquiétant. Stiles ne passait pas une journée sans rester éveillé. Il enchaînait les siestes, les dodos plus ou moins longs, et en ressortait toujours plus fatigué que la fois précédente. C'était comme si le sommeil lui prenait toujours plus d'énergie au lieu de lui en rendre. Chaque jour, ses cernes devenaient plus sombres et il était impossible de prédire les moments où il allait s'endormir. C'était souvent rapide et il devenait difficile de le garder éveillé un moment. Une chose était certaine, il ne tenait jamais plus de deux heures d'affilée.

Sweet DreamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant