Chapitre 49

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Stiles n'avait pas perdu connaissance à proprement parler. Il ne s'était pas évanoui, n'avait pas fermé les yeux... Mais revint à la réalité un long moment plus tard. Fut-ce grâce aux tentatives répétées de Jackson et Derek de le ramener parmi eux ? Nul ne saurait le dire – pas même eux. Parce que ces derniers n'avaient pas compris ce qu'il s'était passé, ce qui était arrivé. C'était à la fois tout et rien, fort et faible. Inquiétant.

Ainsi, lorsque ses yeux se mirent à bouger, qu'il les regarda tour à tour, complètement confus, on poussa des soupirs de soulagement, on l'appela. Il répondit d'un filet de voix seulement. Il ne comprenait pas... S'était-il passé quelque chose ? S'était-il, par hasard... Endormi dans les bras de l'un d'eux ? Cette fois, Derek et Jackson se trouvaient face à lui, qui se découvrit allongé sur le canapé, partiellement couvert à l'aide d'un plaid fort épais. Presque un peu trop. Chose étrange, Stiles eut l'impression d'avoir... Chaud, ou presque. La sensation, il ne la connaissait plus vraiment en tant que telle, du moins lorsqu'il était seul. Par là, il entendait le fait de ne pas entrer en contact avec l'un des deux loups-garous. Généralement, la seule chaleur qu'il percevait, c'était la leur. Il ne fit cependant pas plus attention à ce détail qu'il jugea insignifiant par rapport à la confusion qui le minait actuellement. La main de Derek s'approcha de lui – il ne la craignit pas, ne chercha pas à reculer. Elle se posa sur son front, d'abord la paume contre sa peau, puis le dos.

- Tout va bien, fit le loup-garou, même s'il peinait à croire à ses propres mots.

- Pas de fièvre ? Lui demanda Jackson, l'air perturbé.

- Aucune.

Ils se regardèrent d'un air particulièrement inquiet que Stiles ne comprit pas. Il se racla la gorge.

- Je... Je suis là, hein. Vous... Vous p-pouvez parler de... Devant moi.

Il avait voulu se donner l'air un peu... Cool, désinvolte, un tantinet agacé... Quelque chose comme ça, mais rien de ce qu'il voulait exprimer ne transparaissait dans sa voix, si ce n'est l'angoisse sourde de ne rien comprendre. Il avait aussi cette peur de se voir peut-être... Peu à peu mis de côté. Stiles se savait faible de par son état, peut-être un peu plus fragile qu'avant du fait que c'était à sa tête que l'on s'attaquait en quasi-permanence, mais... Il restait capable d'entendre les choses, de les comprendre. Il avait d'ailleurs besoin de les entendre et c'était d'autant plus vrai qu'il était le principal concerné dans cette histoire. Une espèce de paranoïa le prit et lui fit se dire qu'on lui cachait des choses. Qu'on en savait un peu plus que ce qu'on lui disait et... Que Derek et Jackson n'en parlaient qu'entre eux. Or, Stiles devait savoir les choses. Peut-être même que cette idée l'aiderait à avancer. Le fait est qu'il n'aimait pas les regards que ses deux compagnons se lançaient – ils lui faisaient vraiment peur.

Mais une main prit la sienne, la serra doucement. Stiles croisa les yeux de Derek, avant de les baisser pour regarder ses doigts qui caressaient doucement sa peau, presque de façon distraite.

- On est juste inquiets, tu nous as fait peur, lui expliqua-t-il simplement.

De son côté, Jackson hocha la tête en guise d'assentiment... Et Stiles pensa que ce sentiment de peur-là, il le cultivait chez eux – sans le vouloir, certes. En cela, il se rendait bien compte que les choses n'allaient pas en s'améliorant, que... L'avenir ne s'annonçait pas clairement. De toute façon, l'hyperactif ne l'imaginait plus radieux depuis un moment déjà. Lui apparaissait-il seulement comme existant ? Parfois, dans de rares moments. Le plus souvent, il songeait que son temps s'écoulait à vitesse grand V sans qu'il ne puisse rien faire et que songer à l'après était d'une futilité sans nom.

- Il s'est... P-passé q-quelque chose ?

Dieu que parler était difficile. Stiles ne saurait même pas dire s'il y arrivait mieux qu'avant ou non, mais... Le fait était que s'exprimer restait un calvaire et pourtant, il ne voulait pas s'arrêter complètement. Quelque part au fond de lui, une petite voix – qui elle, ne bégayait pas – ne cessait de lui répéter qu'il devait continuer de parler. Qu'il s'agissait d'un moyen pour lui de résister à l'envahisseur et, dans une moindre mesure, de se borner à exister autrement que de façon uniquement physique. Car possédé ou non, son corps resterait là. C'était sa tête, qui flanchait régulièrement.

Et ça le terrifiait toujours autant.

- T'étais juste, enfin... T'as eu une absence, finit par lui expliquer Jackson, de façon si simple que Stiles comprit clairement ce que ses mots sous-entendaient.

Mais Derek choisit d'énoncer plus clairement la chose :

- On a eu peur que Peter soit là.

Pour atténuer la dureté de ses mots, l'ancien alpha lui caressa doucement la main. Il tenait à lui rappeler son contact, sa présence physique. Il rattrapait le temps perdu à sa manière et s'efforçait de lui apporter ce dont il avait besoin. D'affection.

- Il ne... Il ne l'était... P-pas, leur assura Stiles, l'air assez sûr de lui.

Il l'aurait senti, comme à chaque fois que l'oncle Hale s'immisçait dans son esprit déjà en lambeaux. C'était tel que Stiles savait qu'il pouvait y entrer et en sortir à sa guise, quand bon lui semblait... Alors le fait qu'il ne tente pas de plus grosses attaques pour s'emparer de sa psyché en elle-même le surprenait – mais il s'en réjouissait. Il n'était pas contre un peu de répit et... Un peu d'espoir.

- J'étais, j-je... J'étais juste... Fa-fatigué.

Epuisé serait un terme plus approprié, mais Stiles parlait simplement, comme les mots lui venaient. Enfin, il essayait... Tout en se battant contre ses problèmes d'élocutions de plus en plus prononcés.

Mais mis à part ce fait, Stiles ne mentait pas, au contraire : il faisait preuve d'une honnêteté des plus claires, frappantes... Parce que mentir ne lui servait à rien et qu'il n'en avait de toute façon pas envie. Puis de toute façon, il n'avait rien à cacher. Quoique son cœur s'emballa quelques secondes plus tard, juste après qu'il se soit fait cette réflexion.

Il y avait bien une chose qu'il gardait pour lui, en lui... Toujours la même.

Mais elle n'avait aucune importance.

Stiles la mit tout de suite de côté, préférant s'atteler à expliquer tant bien que mal ce qu'il avait ressenti avant d'avoir cette absence inquiétante – laquelle pouvait légitimement laisser penser à une intervention de Peter. Mais ses mots honnêtes rassurèrent les deux loups-garous, lesquels poussèrent un soupir soulagé, de façon discrète, l'un après l'autre. Le premier à reprendre la parole fut Derek après quelques secondes de silence :

- N'aie plus peur de nous, Stiles. On ne te rejettera jamais, tu m'entends ? Qu'importe notre état, qu'importe ce à quoi on pense, ce qui nous inquiète...

Il le regardait, tentant de lui transmettre, en plus de ses mots, ses émotions, ce qu'il ressentait. Parce que parfois, les mots seuls ne suffisaient pas... Surtout lorsque l'on savait que d'autres, de sens tout à fait contraires, pouvaient surgir de l'intérieur et empoisonner l'esprit malmené de Stiles.

- On sera toujours là pour toi, affirma Derek en serrant doucement sa main, sans jamais détourner le regard.

Mais ce « nous » ce « on » – et leurs variantes –, aussi sincère soient-ils, ressemblaient à s'y méprendre à un « je ».

- Tu es notre priorité.

Stiles crut entendre un « ma » à la place de « notre ».

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