❄️Chapitre 21 : Noé ❄️

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❄️Confrontation cauchemardesque❄️

Je suis tellement fière du résultat ! J'ai passé la totalité de ma journée avec mon père. Mis à part son dédain pour les chansons de Noël, je me suis plus amusée que je ne l'aurais pensé. Ma mère nous a rejoint alors que nous étions en train de terminer. Mais j'ai été contente de passer un peu de temps avec lui. Nous avons parlé de tout et de rien, sauf du lycée ! Ce qui m'a confortée dans l'idée qu'il pouvait s'en détacher quelques heures. Il m'a également fait beaucoup rire. Je l'ai vu danser et même fredonner ! Choses qu'il n'avait jamais faites devant moi. Maman a été heureuse de nous retrouver tous les deux, passant du bon temps. Je la soupçonne même d'en avoir touché quelques mots à papa.

— Nicolas veut qu'on aille voir ses illuminations dehors, déclare ma mère lorsque nous sommes arrivés au bout du couloir.
— Laisse-moi deviner, il s'accorde encore tout le mérite ? ricané-je.
— Oui.
— Pauvre Julio, le plaint mon père.

Je souris en fixant le dernier bout de ma guirlande au mur. Si on se donne tant de mal, c'est pour que la magie soit présente dans tout le chalet. Mon père ferme notre boîte et décide qu'il est temps de rejoindre tout le monde en bas. Je n'ai pas très envie de voir ma grand-mère, mais je ne peux pas l'ignorer pendant ces deux semaines.

— Tu vas prévenir Lisa et Joshua ? demande ma mère.

J'acquiesce et me rends jusque dans la chambre de Benson. Lui et sa sœur sont devant la cheminée.

— C'est moche comme ça, Josh ! Mets la boule rose.
— Je ne vais pas mettre du rose alors que le thème c'est rouge et doré ! rétorque celui-ci.

Ils ne m'ont pas entendue. Lisa sautille pour poser un cerf sur le meuble d'à côté. Joshua soupire, mais finit par la porter et elle glousse en passant ses doigts dans les cheveux de son frère. Je souris, attendrie de la scène. Elle croise mon regard et baisse la tête pour chuchoter quelque chose à son oreille.

— Ne recommence pas, Lisa ! la prévient-il.

Elle s'entortille dans tous les sens pour qu'il la lâche.

— Pécho, pécho, pécho, répète-t-elle en boucle.

Nos regards se croisent et il se fige.

— Noé, grommelle-t-il.
— Joshua.

On se fixe un instant.

— Et moi c'est Lisa, au cas où on m'oublie.

Je ris à gorge déployée et Benson secoue la tête.

— Votre père et mon oncle ont terminé de décorer dehors.
— Ouais ! On va pouvoir voir les lumières ! s'exclame la petite en se précipitant à l'extérieur.

Au passage, elle me bouscule et la porte se ferme violemment.

— Doucement ! s'écrie son frère.

Je reste stoïque quand il passe à mes côtés. Son odeur pique agréablement mes narines et sa paume effleure la mienne. Mon cœur s'emballe, mais je refoule cette réaction en me disant que c'est parce qu'il me fait peur. Nos doigts s'accrochent et il se fige à mes côtés.

— Cesse de jouer, Meunier.

Je suis confuse parce que rien de tout ça n'est voulu.

— Je ne joue pas.

Ma respiration devient courte lorsque mes phalanges remontent sur son avant-bras. Nos épidermes paraissent communiquer en symbiose. Je distingue ses poils se hérisser. Pourquoi un simple toucher me met-il dans tous mes états ? Pourquoi dès qu'il est si proche, je semble en oublier tout ce qu'il s'est passé ?
Je le lâche et cours presque jusqu'à la porte, mais il attrape ma main avant que je ne l'atteigne. Je fixe mon regard sur le bois, le souffle court en m'imaginant tout ce qu'il aurait pu se passer. Je ne sais même pas pourquoi mon cerveau songe à de telles choses.

— Qu'est-ce qu'il y a, Noé ?

Entendre mon prénom dans sa bouche me provoque un frémissement.

— Je...

Il touche mon épaule afin que je fasse volte-face et je déglutis au moment où ses billes chocolat s'ancrent dans les miennes.

— Ne... ne t'amuse plus à poser tes sales pattes sur moi, le préviens-je.

Tout ça parce que je n'assume pas le flot de mes pensées. Tout ça parce que j'ai peur de ce qu'il pourrait arriver si notre contact perdure. Il ne m'écoute pas et amorce quelques pas en avant pour briser la mince proximité.

— Il faudrait que l'on discute de notre dispute sur les pistes...
— Les autres nous attendent.
— Ils attendront, Noé. On a des choses à se dire.
— Pas moi, rétorqué-je.

Son regard suppliant m'attendrit alors qu'il me lâche.

— Oh si. Comme m'expliquer pourquoi ta belle bouche a failli se retrouver sur la mienne à cinq heures du matin alors que tu ne voulais plus rien avoir à faire avec moi !

Je baisse les yeux sur ses lèvres avant de les fermer. Il faut que je chasse ce mauvais souvenir.

— Je pensais que je rêvais.
— Ne me mens pas.
— Qu'est-ce que tu veux que je te dise, Joshua ?! Je n'en sais rien, OK ! Je suis toujours prête à devenir une criminelle lorsque tu es dans la même pièce que moi, mais...
— Mais ?

« En même temps, j'apprécies celui que tu me montres, celui qui se préoccupe de moi et me voit. Celui qui tente de me comprendre et reconnaît ses erreurs sans les banaliser ». Ça c'est ce que je pense, pourtant, ce n'est pas ce que je lui dis, malgré les espoirs que je perçois dans son regard.

— Je n'irais pas en prison pour tes beaux yeux.

Il prend sa tête entre ses mains. La colère a transformé tous ses traits.

— Parfois, j'ai l'impression que tu te forces à m'en vouloir.

Je t'en veux parce que je te veux...

Je lui en veux parce que si je ne le rends pas coupable de tout mon malheur, j'ai l'impression d'être une incapable. C'est peut-être insensé, mais remettre la faute sur lui a toujours été plus simple que de viser le vrai monstre. De Joshua, je réussissais à en parler, son nom me venait facilement. Emilio, c'était mon déni. J'avais l'impression qu'agir comme s'il n'avait jamais existé rendrait ma vie meilleure. En réalité, ça a seulement contribué à m'enfermer dans un silence dont je ne peux plus détacher.

— Oui et non, avoué-je.
— Noé, je...
— Parce que je comprends ton silence. Tu étais aussi victime de lui et tu n'as jamais remis la faute sur Emilio, seulement sur toi. Tu as tout endossé, tu as des regrets qu'il n'aura jamais me concernant. Tu m'as souvent protégée bien que je ne le voyais pas ainsi sur le moment. Et ça m'embrouille, Joshua... Je me demande si j'ai toujours su qui tu es ou si je suis trop naïve.

Mon visage est si près du sien que c'en est insupportable, pourtant je ne bouge pas et soutiens son regard.

— Qui est-ce que je suis ?

Mes paupières se plissent alors que je le jauge. Ma conscience part dans tous les sens, mes envies interdites se réveillent.

— Pousse-toi, j'aimerais passer, réponds-je à la place.
— Promets-moi que tu ne joues pas, Noé.

Je mords les lèvres avant de souffler :

— Je ne peux rien te promettre, Joshua.

Son expression s'affaisse et il soupire :

— Je sais que tu as compris.
— Compris quoi ?

J'attends sa réplique, sauf qu'elle ne vient pas. Mes nerfs sont aussitôt ravivés.

Il n'esquisse aucun mouvement tandis que je quitte la chambre.

Qu'est-ce qu'il m'est passée par la tête ce matin ? On ne pactise pas avec le diable... Et je crois qu'en effleurant ses lèvres, c'est ce que j'ai fait.

Nightmarish ChristmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant