Chapitre 27 : Sous tension

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Malgré la déception causée par la veille, j'avais préféré me changer les idées en retournant au travail, peut être qu'en me noyant dans les photos, mon esprit arrivera à y trouver un échappatoire à tous ces sentiments douloureux...
Mais malgré mes efforts, rien ne me parvenait, mon regard resta fixé sur l'ordinateur posté devant moi, regard vide comme inanimé. Tout comme mes pensées, qui, même si je ne songeais à rien, poussaient mon corps à rester immobile comme prisonnier de lui-même. Ma main pressant la souris, glissa le long du petit tapis de bureau sans but, ne sachant pas vraiment ce qu'elle faisait, pour parraître machinalement en train de travailler. Une voix me fit débloquer de mon point fixe qui me rongeait l'esprit depuis déjà plusieurs minutes :

- Woow je savais pas qu'on travaillait avec un cadavre ! s'écria Hugo, mon collègue d'une humeur joyeuse

À mon habitude, j'aurais eu tendance à répliquer d'une blague sur le même ton, mais plus aucune répartie ne se bouscula dans ma tête, alors ma seule réaction fut un simple rire.
Cette remarque si futile, eut pourtant le don de m'actionner inconsciemment des souvenirs, me rappellant de ces mêmes paroles, délivrées par Jordan le jour de mon emménagement : "Et puis déjà là t'es déjà crevée, alors j'imagine pas si t'avais fait ça toute seule, j'avais pas envie de retrouver un cadavre la prochaine fois que je serai venu !" M'avait-il dit lorsque nous étions affalés par terre côte à côte après avoir déballé une multitude de cartons.
Mon souvenir se coupa une fois de plus en entendant Hugo réprimandait :

- Tu penses encore à Jordan ?

Je le dévisagea, incrédule, me demandant comment aurait-il eu accès à mes pensées. Il avait constaté mon interrogation, alors il poursuivit, une nouvelle fois, un rire au lèvres :

- C'est pas compliqué de le comprendre, vu que t'es en train de griffonner son prénom depuis tout à l'heure, sans t'en appercevoir !

Un simple coup d'oeil me permis de m'attarder sur mon bureau, et comme il l'avait prédit, j'avais récemment troqué ma souris contre un stylo, griffonnant involontairement le prénom "Jordan" sur un bout de papier. J'avais souvent ce tic, d'écrire et de gribouiller quelque chose ou un dessin lorsque j'étais pensive, et ça depuis que j'étais au collège.
Je souriais spontanément en y repensant et finit par rire honteusement à la remarque de mon collègue.

- Désolée je n'avais pas remarqué que t'étais là !

- C'est pas grave ! Et puis je viens juste d'arriver après tout !

Je lui souris timidement une fois de plus, avant qu'il ne vienne s'installer sur un tabouret pour venir le rapprocher de mon bureau.
Bizarrement Hugo fut l'un des premiers à qui j'avais parlé vaguement de tout cette histoire.
Bien sûr j'en avais parlé à Clara, car à elle on ne pouvait rien cacher. J'avais pris le temps de respirer un bon coup la veille, encore adossée à ma porte d'entrée, séchant les nombreuses larmes qui se sont déversées de mes yeux. Repris un peu de force pour finir par raconter tout ça à Clara, puis à Hugo, me poussant à croire qu'une vision extérieure de mon histoire pouvait peut être m'aider. Et heureusement pour moi, Hugo avait réussi à trouver les bons mots pour réussir à me consoler, malgré qu'il n'était pas très sentimental, il me fallait sûrement un avis masculin pour peut être pouvoir comprendre un peu plus la décision et le comportement de Jordan.

- Ça va lui passer t'en fais pas ! Un jour il comprendra que tu n'y es pour rien ! m'avait-il dit au téléphone d'une voix simple mais réconfortante

- Je l'espère !

- Tu sais à quel point il peut tenir à sa famille, alors laisse lui du temps et tout finira par s'arranger...

- Merci Hugo !

- Je suis là pour toi, t'en fais pas !

Un sourire triste se dessina sur mon visage, ma respiration se calma peu à peu. Il me raconta un peu sa vie, pour faire en sorte que je ne m'attriste plus sur la mienne le temps d'un appel.
J'avais beaucoup rit grâce à lui, même si il me manquait toujours la présence du vidéaste, je m'efforçais de penser que ces beaux jours reviendront, et que l'on construira de nouveaux souvenirs avec Jordan, quelque soit le temps qu'il lui fallait pour digérer tout ça.

𝙴𝚟𝚎𝚛𝚢𝚝𝚑𝚒𝚗𝚐 𝚒𝚝'𝚜 /𝙸𝚖/𝙿𝚘𝚜𝚜𝚒𝚋𝚕𝚎 { 𝐽𝑜𝑦𝑐𝑎 }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant