𝟑𝟎

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J'aurais dû l'écouter.

Bien trop têtue, je n'avais pas pris en compte la réflexion de Liam concernant le fait qu'il fallait que je me repose avant la tombée de la nuit, et pourtant mon corps lui aussi mourrait d'envie de s'éclipser dans les bras de Morphée.

Mais ça m'était impossible.

Chaque fois que mes paupières se fermaient et laissaient place à ce voile sombre, les images du corps sans vie d'Eva me revenaient à l'esprit, mais aussi celles des traces de sang éparpillées sur les murs de la maison sans dessus dessous, et même celles du visage méconnaissable de ma cousine...

Il était deux heures du matin d'après la pendule qui se tenait devant le lit sur lequel j'étais étalée. Je partageais ma chambre avec Valérie qui somnolait sur un matelas étendu au sol. Le sommeil était introuvable et l'heure affichée me fit penser au message de Cameron.

"Il faut qu'on se voie... Rejoins-moi au Woods, ce soir. Urgent. J'y serais jusqu'à 3 h 00."

Valérie dormait à poings fermés, Laure aussi et j'avais entendu Liam s'enfermer dans sa chambre. Avec un peu de chance, je pourrais faire le mur et rejoindre Cameron au bar avant 3 h 00.

J'ai besoin d'un verre.

Et de lui coller une gifle.

Je me levai alors rapidement et enfilai à toute vitesse un survêtement que Laure m'avait rapporté de l'appart. Ils avaient ramené une grande partie des affaires qui allaient sûrement suffire à ce temps d'hébergement qui, je l'espérais, allait être de courte durée.

Une fois prête, je sortis de ma chambre sur la pointe des pieds et parvins à refermer la porte derrière moi, en toute discrétion. Valérie dormait à poings fermés et ne s'était absolument pas rendue compte de mon départ. Il ne me restait qu'à descendre les escaliers et c'est en y posant lentement le pied que je compris vite que cette étape de ma fugue allait être la plus compliquée.

Le parquet grinça au contact de mon pied et je grimaçai à l'écoute de ce bruit qui allait sûrement bientôt me trahir. Je pris une grande inspiration avant de retenter ma démarche et avec la plus grande des concentrations, je descendis les escaliers en prenant soin de ne laisser derrière moi aucun signe de mon évasion.

Une fois arrivée dans le salon du rez-de-chaussée plongé de l'obscurité, un soupir m'échappa. Je soufflai un instant soulagée de n'avoir alerté personne, mais malheureusement, ce sentiment s'échappa bien vite lorsque je sentis une présence familière prendre place derrière mon dos, puis quand la lumière du salon s'alluma.

Mon cœur se mit alors à battre à tout rompre jusqu'à en pulser le sang de mes oreilles. Je regardai autour de moi pour constater que le salon était vide, mais un nuage noir de fumée vint familièrement se dresser devant moi pour laisser place à la grande carrure de mon prédestiné au regard sévère. De mon côté, je me sentis submergée par cette chaude et douce enveloppe qui venait s'emparer de moi comme toutes les fois où j'étais en sa présence.

Il se tenait devant moi, son expression était impassible et il avait son regard rivé dans le mien. Sa taille, bien plus développée que la mienne, l'obligeait à baisser la tête pour me regarder et je vis sans difficulté son agacement.

— Tu m'emmerdes, Emy.

Il m'avait soufflé ces mots avec un ton qui laissait parfaitement percevoir sa lassitude. Alors que son regard était toujours rivé dans le mien, je vis ses sourcils se froncer puis ses yeux faire des allers-retours entre les miens.

— Tu n'as pas dormi, constata-t-il.

Je levai les yeux au ciel avant de croiser les bras contre ma poitrine. Je penchai la tête sur le côté, l'expression agacée.

BITING REVELATIONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant