Chapitre deux.

687 86 182
                                    


Octobre 2025

— Bonne nouvelle les gars ! Le dirlo a enfin trouvé un coach pour l'équipe de basket, j'les ai vus discuter près du gymnase.

— C'est pas trop tôt ! On est bientôt fin octobre, on est déjà hyper en retard sur la saison...

Dans le fond de la salle des professeurs, assis seul à une table, Elio écoutait ses collègues d'une oreille distraite, le nez dans son livre. Cet été, le coach Witham de l'équipe de basket, qu'Elio avait connu lors de ses propres années lycée, avait pris retraite après plus de quarante ans de loyaux services. Si le remplacement de ce dernier s'avérait compliqué – peu de gens avaient envie de venir s'enterrer dans une petite ville du Texas – ce qui chagrinait surtout Elio était le départ du coach en lui-même. Déjà lorsqu'il était lui-même élève de cet établissement, il appréciait énormément Witham, qui était un des seuls adultes à faire attention à lui. Plus de douze ans après, c'était toujours le cas... Le coach était un peu un père de substitution et son départ faisait mal au cœur d'Elio. Même maintenant qu'il était professeur de littérature, depuis désormais six ans, Elio avait gardé une affection particulière pour le coach. Ils avaient l'habitude de souvent déjeuner ensemble, à vrai dire c'était surtout Elio qui se réfugiait dans le bureau de Witham à l'heure de la pause, comme lors de sa dernière année de lycée... Et Witham ne l'avait jamais flanqué à la porte. Il aurait pu, Elio le savait bien mais il ne l'avait jamais fait et le jeune homme lui en était reconnaissant. Mais désormais, tout était différent... Elio avait perdu son oasis et il devait donc affronter ce qu'il redoutait le plus : les autres. Ses collègues. Pas méchants, en soi, mais comme à l'époque du lycée, le professeur de littérature était en marge... Jugé trop solitaire. Trop angoissé, trop lunatique. Trop « bizarre », encore. C'était sûrement l'adjectif qui revenait le plus souvent quand on demandait aux gens de le décrire. « Il est gentil hein mais il est bizarre ». Elio en était bien conscient. Il voyait les regards, il entendait les chuchotements. C'était sa vie depuis le jour de sa naissance.

— Et vous savez qui c'est, ce nouveau coach ?

— J'ai entendu vite fait le dirlo et lui parler. Visiblement, c'est un ancien d'ici ! Eh Everlast, p't'être que tu le connais !? Toi qu'est jamais vraiment parti d'ici !

Il y eut quelques rires dans la salle des profs et Elio releva les yeux de son bouquin, essayant de ne pas paraître agacé. Pour une fois qu'on lui parlait, aussi anxiogène que ce soit pour lui, il n'allait pas tout foirer.

— C'est possible. On va vite le savoir de toute façon, je suppose que Monsieur Miller va venir nous le présenter.

Comme pour appuyer ses dires, la porte de la pièce s'ouvrir, laissant apparaître le directeur. Quelques secondes après, le nouveau coach fit son apparition et Elio sentit son livre lui échapper des mains. Ce dernier tomba sur la table dans un bruit sourd, renversant au passage son verre qui, lui, roula sur le sol dans un tintement léger, sans se briser cependant – fort heureusement. Tous les regards se tournèrent vers lui et, Elio en était persuadé, le sien aussi.

— Ah Everlast, toujours aussi maladroit.

Elio plissa le nez et se contenta d'aller ramasser son verre, essuyant au passage l'eau qui avait coulé sur le sol. Le directeur détourna son attention de lui pour présenter leur nouveau collègue à tous les professeurs.

— Messieurs, dames, après quelques semaines de recherche difficile, je vous annonce que notre lycée va officiellement pouvoir se lancer dans la saison de basket-ball. Les matchs commencent bientôt, nous sommes en retard mais je nous ai trouvé le meilleur coach que l'on pouvait espérer !

Notre amour pour seule limite [BxB] [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant