Chapitre trente-six.

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Mai 2026

Tout était flou, embrumé. Elio cligna des yeux mais les ferma aussitôt, agressé par la lumière vive. Il bougea légèrement avant de rouvrir les paupières. Il se redressa, un peu perdu.

— Eh doucement.

Elio tourna la tête, découvrant Sam, assis dans un fauteuil. Le rouquin se sentit démuni. Soudainement, tout lui revenait en tête. Ce qui s'était passé. Tim, Maé... La lame de rasoir. Elio baissa les yeux sur ses poignets, bandés. Il les frotta légèrement, sentant les larmes monter. Il avait échoué, encore. Même pour mourir, il était nul. Sam quitta le fauteuil pour s'asseoir sur le bord du lit.

— Tu nous as fait sacrément peur.

— Comme si j'allais manquer à quelqu'un...

Sam l'observa, d'un air peiné. Il n'était pas du genre à montrer ses émotions, il était même assez souvent froid, trop pragmatique, trop terre à terre. Mais la souffrance d'Elio le touchait. Cela l'avait toujours touché. Même quand lui et Maé étaient au lycée... Sam était jeune, à cette époque mais il n'avait jamais oublié la tristesse et la mélancolie qui se dégageaient d'Elio. C'était comme un parfum enivrant, dont l'odeur nous revenait souvent.

— Va dire ça à la femme qui t'a sorti de la baignoire. Elle était terrifiée à l'idée que tu meurs.

Elio le regarda sans comprendre.

— Je sais pas son nom mais j'crois qu'elle bosse au lycée. Une grande black avec des dreads.

— Charly...

Le rouquin était étonné. Il ne comprenait pas très bien ce que Charly était venu faire chez lui... Il ne savait même pas s'il devait la remercier ou non. Après tout, il voulait mourir. Mais de toute évidence, la vie en avait décidé autrement. Elio était épuisé. Il n'avait pas la force de repartir pour un tour... Il se rallongea un peu, s'adossant contre les coussins de son lit d'hôpital.

— Je suis là depuis longtemps ?

— Quelques heures. Tu as perdu beaucoup de sang... A quelques minutes près, tu étais mort, Elio.

— Vous n'auriez pas dû me sauver.

Elio fixa un point, ses doigts jouant machinalement avec les draps. Il ne savait pas trop ce qu'il ressentait... Il n'était même pas certain de ressentir quelque chose. Il avait l'impression d'avoir un trou béant dans la poitrine, un trou noir, qui aspirait toutes ses émotions. Il se sentait vide. Un peu en dehors de lui-même, encore. Elio savait qu'à la seconde même où il serait seul, il basculerait de nouveau. Et Sam devait le savoir aussi, parce qu'il n'avait pas l'air d'avoir l'intention de bouger. Le rouquin leva les yeux vers lui.

— Pourquoi t'es là ?

— C'est moi qui suis intervenu et qui t'ai conduit ici.

— Non, je veux dire, pourquoi t'es encore là ?

Sam ne répondit pas de suite. En vérité, il n'en savait rien mais il n'avait pas pu abandonner Elio, le laisser seul dans cette chambre triste et impersonnelle. Il ne le connaissait pas bien mais quand ce dernier sortait avec son frère, à l'époque du lycée, les quelques fois où ils s'étaient croisés, le rouquin avait toujours été gentil avec lui. Elio s'était toujours intéressé à lui, à ce qu'il faisait. Il se frotta la nuque.

— Tu te souviens de ce jour où tu étais avec Maé à la maison et que ma mère l'a appelé parce qu'elle avait besoin d'aide au garage ? Maé t'as dit qu'il revenait vite et il t'a laissé seul avec moi. Je pensais que t'allais faire comme tous les potes de mon frère, que t'allais m'ignorer mais t'es venu t'asseoir sur le canapé près de moi et tu m'as demandé si j'avais envie de jouer à la console.

Notre amour pour seule limite [BxB] [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant